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Aurélie Jean : «J’aime dire que la transformation digitale est finie»

En partenariat avec Les Sommets du Digital

Les #womenintech soutiennent les Sommets du Digital. Nous avons questionné une de leurs représentantes, Aurélie Jean. Docteur en sciences, experte en mathématiques appliquées et en code informatique, Aurélie est aujourd’hui une entrepreneure aguerrie. Elle accompagne les entreprises dans leur transformation digitalo-analytique et dans le développement d’une plus grande diversité, en France et aux Etats-Unis. Elle est aujourd’hui CTO/CIO de la startup MixR à Los Angeles.

Jeune, mais déjà pleine de ressources, Aurélie s’attache à transformer les individus en utilisateurs éclairés des nouvelles technologies et à nourrir leur culture scientifique.

On a commencé à vous connaître en France au travers de votre approche originale : “le code comme moyen efficace pour l’émancipation de la femme”. Pouvez-vous développer et est-ce toujours d’actualité ?

Aurélie Jean: Oui absolument. Étant moi-même développeuse depuis plus 15 ans et ayant utilisé le code dans de nombreux domaines de la médecine à la finance de marché, je vois les avantages et bénéfices pour les femmes qui restent encore minoritaires dans cette discipline. Savoir coder, et idéalement à un haut niveau, vous permet de naviguer dans de nombreux domaines, d’avoir un impact large dans la société, de vous stimuler intellectuellement, et vous permet d’être comme j’aime le dire “marketable”. Cet écosystème apporte de nombreux avantages aux hommes et aux femmes bien évidemment, mais j’aime parler aux femmes car je souhaite qu’elles saisissent les opportunités maintenant. Sans l’engagement des femmes dans cette discipline, nous allons reproduire le phénomène des années 80 lors de l’arrivée du personal computer (PC) qui s’est accompagné d’une désertification de la discipline par les femmes. Aussi je pense qu’il est important que les outils de demain soient développés autant par les femmes que par les hommes afin d’assurer les bénéfices pour tous. J’explique dans un article récent de Business O féminin pourquoi les femmes doivent produire les outils du futur, en lien avec une étude du cabinet Roland-Berger.

Vous évoquez régulièrement les nouveaux enjeux pour les entreprises et pour les postes au travers de la transformation digitale analytique… Pouvez-vous approfondir et donner quels leviers pour les participants des Sommets du Digital ?

J’aime dire que la transformation digitale est finie. Nous sommes en train de vivre une transformation que je nomme digitalo-analytique. La transformation digitalo-analytique combine l’utilisation des outils digitaux (Twitter, Google, Facebook…), et la collecte et l’analyse de la data. L’analyse de cette donnée se fait par l’écriture et l’implémentation d’algorithmes dans des codes de calculs. Les conséquences pour les entreprises sont évidentes: là ou l’entreprise pouvait encore utiliser des outils déjà développés tels que les réseaux sociaux pour créer une campagne de marketing ou de communication; elle doit à présent développer des outils analytiques en interne car ses données, ses clients, sa culture et les questions auxquelles elle souhaite répondre sont propres à son domaine et à son identité. L’entreprise embauche des nouveaux talents tels que des développeurs informatiques ou des data scientists, elle transforme les postes existants (le digital marketer doit devenir un digitalo-analytique marketer), ou encore transforme sa structure en créant de nouveaux départements tournés vers la data et le numérique. Les entreprises deviennent Tech : du retail, au luxe et l’alimentaire en passant par la banque ou le consulting.

Je pense que s’initier un peu au code est un moyen de comprendre l’écosystème, les mots, le langage, et la manière de penser des développeurs avec qui les employés non tech vont devoir travailler. Comme je le dis souvent, cette transformation digitalo-analytique est une occasion pour les entreprises de développer des stratégies qui considèrent davantage l’humain. Là où la transformation digitale nous a permis d’atteindre le client, la transformation digitalo-analytique va permettre de le comprendre. Nous orientons les stratégies de plus en plus vers le client et de moins en moins vers le produit. Les marketers, experts en communication et ressources humaines vont devoir s’engager encore plus dans la compréhension de l’humain et dans une relation-client de plus en plus particulière… de belles opportunités pour l’entreprise et les employés !

Le 3 octobre dernier, vous étiez présente à Microsoft Expérience où vous avez dit que “les algorithmes ne sont pas coupables”. Qu’est-ce que cela signifie ?

Dans cette présentation je parle d’un sujet encore peu évoqué auprès du grand public : les biais et discriminations algorithmiques. Nous utilisons au quotidien des outils technologiques qui possèdent d’une certaine manière nos propres biais, et qui résultent à des discriminations en écartant une partie des utilisateurs.

Pour prendre un exemple parmi tant d’autres, les premiers algorithmes de reconnaissance faciale ne reconnaissaient pas les teints foncés car les algorithmes avaient été calés sur des images d’individus à peaux claires uniquement. Pourquoi ? Surement parce qu’un groupe composé uniquement d’individus à teint clair avaient conçu le produit. C’est humain, nous avons tendance à ne pas penser aux gens différents de nous quand nous sommes entre individus similaires, d’où les avantages de la diversité dans les entreprises. Les biais sont introduits quand on conçoit un produit ou une idée, quand on définit le type de data à collecter sur laquelle caler un modèle, ou encore la manière dont on analyse ces données. Nous ne pouvons pas rejeter la faute sur les technologies, les algorithmes ne sont pas coupables, nous sommes les seuls coupables.

Je suis une grande avocate des technologies et de l’innovation dans son sens premier qui est d’améliorer la qualité de vie de l’humain, mais je pense aussi que cela passera par notre implication à tous. Nous tous devons prendre conscience de ces biais et d’agir en conséquence, en étant des développeurs et consommateurs éclairés. Je remercie Thomas Kerjean de Microsoft France de m’avoir permis de transmettre mon message !

Question cash – réponse cash: Les codeurs d’aujourd’hui ne sont-ils pas les ouvriers de demain ?

Que veut dire demain ??? Cette question est difficile, et d’autant plus compliquée que codeur est un mot clé, les niveaux et postes entre codeurs varient profondément. Ce que je peux vous dire est que nous entrons dans une période de forte demande en développeurs de tous niveaux. Une étude de Microsoft a montré qu’en 2020 les USA allaient avoir 1 million de postes à pourvoir sans personne pour remplir ces postes. En France on parle d’un manque de 300 000 développeurs. Dans un futur plus lointain, si la demande de développeurs évolue dans l’autre sens, ce spectre de qualification se réduira à des compétences beaucoup plus élevées avec des qualifications et expertises plus pointues. Nous générons déjà une partie du code automatiquement et je pense que c’est une bonne chose. Nous, développeurs et scientifiques pouvons donc nous concentrer sur les points les plus compliqués et les plus stimulant intellectuellement, là où sont les challenges techniques.

Les 4, 5 et 6 février 2019 se tiendra à La Clusaz la 4e édition des Sommets du Digital. Un événement hors du commun qui, une fois encore, bousculera notre cadre de référence, agitera nos neurones et marquera durablement nos esprits.

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Un commentaire

  1. Fumeux article.
    J’aimerais bien savoir quels langages informatiques Mme Jean a utilisés. Car coder en C, en java, ou en Prolog, ce n’est pas pareil. Multithreadé ? Dans le kernel de Linux ?
    Quant à savoir pourquoi il y a si peu de femmes dans l’informatique, c’est simple ! Elles sont moins bêtes que les hommes et ont bien compris que l’informatique est un métier difficile et abrutissant !

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