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BonneGueule lève des fonds… et on vous dit tout

Après presque 10 ans d’existence en tant que site de mode masculine, et 5 ans après le premier euro de l’entreprise, BonneGueule lève des fonds (NDLR : près d'un million d'euros).

Alors que le secteur de la mode masculine est souvent vu comme accumulant les difficultés, nous y voyons une formidable émergence de jeunes marques avec de très belles offres. Ce sont ces acteurs que nous voulons aider et mettre en avant.

C'est aussi un secteur porteur d’espoir car il peut montrer l’exemple.

Un secteur que l’on essaye de sensibiliser au «monde d’après» en réconciliant les hommes et le vêtement, et proposant de l'information de qualité et utile pour les futurs choix des consommateurs.

Avec toujours une mission claire et simple : «aider les hommes à se sentir bien dans leurs vêtements.»

Mais alors pourquoi lever des fonds, alors que tout va bien et que tout avance ? Et d’ailleurs c’est quoi une levée de fonds ? Qu’est ce qui va changer (ou pas) chez BonneGueule ?

Toujours avec notre envie d'user de pédagogie et de clarté, on va vous donner les raisons et les détails de cette «étape».

Même si pour nous ce n’est qu’un moyen (un peu comme souscrire à un prêt bancaire plus important que les autres), et un moyen qui n’a rien d’une fin en soi.

Et attention, c’est un peu long.

Mais déjà, c’est quoi une levée de fonds ?

C’est la question qu’on se posait encore il y a un an, sans vraiment trop savoir de quoi il s’agissait précisément. On savait juste qu’il nous faudrait des sous pour financier tous nos projets.

Alors commençons par poser les bases.

Dans une levée de fonds, des investisseurs apportent de l’argent (donc des fonds) en échange d’une partie du capital d’une entreprise.

En d’autres termes, en échange de l’argent qu’ils apportent à l’entreprise (qui se compte en centaines de milliers d’euros, voire en millions), des entrepreneurs leur accordent une partie du capital de leur société.

Plusieurs années après (entre 5 et 7 ans lorsqu’il s’agit de fonds d’investissement), quand l’entreprise a bien grandi grâce à ces ressources supplémentaires, les investisseurs revendent alors leurs parts plus chères. Soit à d’autres investisseurs, soit à une entreprise du secteur plus avancée, soit aux fondateurs qui récupèrent ainsi leurs parts (le plus rare, mais probable dans notre cas). 

On dit alors des investisseurs qu’ils «font une sortie», ou une «exit». 

Vous vous demandez peut-être comment on décide de combien de parts on cède aux investisseurs et pour quels montants ?

Là, on entre dans des problématiques complexes de valorisation de société.

Pas de méthode miracle ici pour décider de la bonne répartition des parts, à part de longuement discuter des désirs, des ambitions et de l’implication de chacun. C’est une recette unique à chaque entreprise.

Et comme un mariage, c’est parfois lourd de conséquences !

Pourquoi est-ce que des gens investissent dans des start-up ?

Quand on a beaucoup d’argent, il y a un tas de moyens de le faire fructifier : immobilier, art, placements, etc. Et l’investissement dans une entreprise est loin d’être le moyen le plus sûr pour récupérer sa mise (la boîte peut royalement se planter).

Alors qu’est-ce qui peut bien pousser des investisseurs à investir chez nous à part être sympas ?

Evidemment, ils espèrent faire une plus-value, mais il n’y a pas que ça.

Ils sont aussi dans des logiques d’apprendre des choses à notre contact car, d’une certaine façon, on défriche de nouvelles manières d’être un «média de mode», une «marque», et on promeut des manières alternatives de consommer qui tendent à se répandre («acheter moins mais acheter mieux», transparence, éthique, rationalité, etc.). 

Mais ils veulent aussi transmettre leur expérience à des «plus jeunes». Ils ont été des entrepreneurs et des dirigeants de haute volée. Ils ont réussi mais ils ont aussi été aidés et accompagnés à certains moments de leur vie. Alors ils poursuivent d’une certaine manière un cycle d’entraide.

La création d’une entreprise, sa vie souvent mouvementée, l’aventure humaine, son évolution, tout cela les fascine, et ils veulent prendre part à ces projets car ils aiment ça, tout simplement.

Pour quelqu’un qui n’est pas du tout dans l’entrepreneuriat, c’est quelque chose de difficile à concevoir, car on a souvent tendance à ne voir que les galères : gros horaires de travail, peu de vacances, moral mis à rude épreuve, rémunérations pouvant être inférieures à celles de la voie classique.

Mais entreprendre, c’est avant tout une passion. Il faut le vivre pour comprendre, et on aime tellement ça que quand ça s’arrête, certains veulent absolument garder un pied dans l’entrepreneuriat : ils deviennent investisseurs.

Donc vous avez plus ou moins été rachetés ?

Pas du tout !

Quand de nouveaux investisseurs entrent au capital, ce n’est pas forcément synonyme de rachat. 

BonneGueule est très loin de leur appartenir, Geoffrey et moi sommes toujours les actionnaires très majoritaires, et donc les décideurs finaux. C’est possible car nous n’avions jamais levé d’argent, et nous le faisons aujourd’hui à un stade de développement avancé, soit une position qui nous avantage.

Vous avez d’ailleurs plus que jamais votre mot à dire et, en interne, on partage d’ailleurs tous vos retours.

Chaque retour fait réfléchir la totalité de l’équipe.

Et ça, les investisseurs l’ont bien compris : ils sont dans un rôle où ils donnent leur avis, font partager leurs expériences, nous font rencontrer d’autres experts, mais ils ne nous imposeront jamais rien en ce qui concerne la stratégie ou la mission. D’ailleurs ils n’en ont pas le pouvoir, étant actionnaires minoritaires.

Ils ont investi sur une équipe avant tout, une vision, et leur intérêt est précisément de préserver ce fragile mélange, si unique, qui a fait ses preuves.

Finalement, leur mission, c’est de nous permettre de rester bien concentrés sur notre mission et de nous préserver des aléas, des craintes, et de certains doutes. Ça s’appelle de la bienveillance.

Je sais, la presse généraliste aime parfois relater l’histoire de fonds d’investissements qui désossent des entreprises, les font rentrer dans des logiques court-termistes, mais ce n’est pas le cas avec nos business angels.

La seule obligation qu’on a envers eux est de les informer chaque mois de nos évolutions (ça s’appelle un «reporting»), mais c’est une démarche très saine, qui nous pousse à être vigilants et disciplinés dans notre gestion.

Mais si vous étiez rentables, avec de belles perspectives de croissance, pourquoi lever au lieu d’avancer tranquillement tout seul année après année ?

C’est THE BIG QUESTION qu’on a retourné 1 000 fois dans nos têtes !

On est rentable et en croissance, pourquoi ne pas continuer tout seul ?

Il y a en fait de nombreuses raisons.

Les raisons financières

Comme vous le savez, BonneGueule a été autofinancé pendant près de 10 ans. Cela ne s’est pas fait sans certaines frayeurs quand il fallait par exemple payer le même mois les taxes du trimestre et les stocks de vêtements d’hiver, et toutes les charges fixes (salaires, loyers, prestataires), le tout dans un contexte de croissance.

On n’a jamais vraiment été en risque, mais on a déjà eu très peur. 

Ce stress du cap de trésorerie à franchir, c’est quelque chose que je ne souhaite à personne.

Nous avons créé des emplois et maintenant, nous avons la responsabilité de la protection de ces emplois (ceux de BonneGueule, mais aussi ceux que nous créons indirectement via nos fournisseurs ou nos prestataires).

Ce n’est pas non plus la peur au ventre que nous sommes le plus productif, pour lancer de nouveaux services et écrire les meilleurs articles possibles.

En levant, on sort de ce stress, on est capable de mieux servir nos lecteurs et nos clients, et c’est un choix responsable par rapport à l’équipe.

Enfin, petit point sur l’utilisation de l’argent de la levée : si c’est la question qui vous taraude, Geoffrey et moi n’avons pas souhaité faire de cash out (BonneGueule est notre seul “investissement”). Nous n’avons donc pas touché d’argent dans cette levée.

Les raisons opérationnelles

Comme on devait avoir une gestion de notre trésorerie extrêmement (trop ?) prudente, il y a aussi plein de choses qu’on ne pouvait pas faire : 

  • commander suffisamment de stock lors de certains lancements, et après les lancements
  • lancer certains produits a priori risqués, ou à marges trop faibles pour soutenir BonneGueule, si on n'atteint pas certains volumes
  • sortir plus de vidéos YouTube, et innover sur les formats
  • lancer des projets technologiques d’envergure pour faire évoluer le blog en une vraie plateforme communautaire, avec de la personnalisation, des annuaires des marques et des e-shops, une structure SEO performante, etc.
  • être présent à l’international, ou du moins avoir un service e-commerce 100 % opérationnel dans ces pays.

 

Les raisons stratégiques

Vous l’avez remarqué, le marché de la mode masculine bouge beaucoup en ce moment. Et celui des médias encore plus.

De plus en plus d’acteurs commencent à comprendre que vos attentes ont changé, et la concurrence est encore plus rude qu’avant : il faut à présent vous donner de très bons contenus pour vous garder comme lecteurs, et de très bons produits pour vous garder comme clients.

Il faut aussi avoir le meilleur service client, l’offre la plus transparente, les produits les plus éthiques possibles, continuer à répondre avec beaucoup de soin à chaque mail que vous nous envoyez, et tant qu’on y est être une marque que même Kévin, votre petit cousin chelou mais attachant, trouvera cool.

Bref, être «dans la moyenne» ne suffit plus. 

Il faut être excellent.

Partout.

Hélas, il faut une certaine taille critique pour être «le meilleur partout».

Et mine de rien, même pour les grands acteurs historiquement puissants qu'on ne peut arrêter, c’est un sacré casse-tête à résoudre.

Mais ces évolutions nous fascinent. Et nous ne sommes plus forcément en train de subir ce que les grandes marques de vêtements nous imposent. On estime qu’on a notre mot à dire et on veut avoir des positions fortes et pionnières sur ces nouveaux sujets. 

Cette ambition, elle demande à se matérialiser sous formes de projets en tous genres (boutiques, contenus, ambassadeurs, etc).

Et derrière ces projets, il y a des personnes qui s’assurent que tout est bien fait dans les temps (dans le jargon, on parle «d'exécution»). Il faut des personnes avec de l’expérience, qui ont déjà traversé de nombreux projets, afin de ne pas perdre de temps et d’éviter toutes les erreurs possibles.

La levée de fonds va donc nous servir à recruter ces profils experts, qui doivent bien sûr aussi partager nos valeurs.

Les raisons liées à la vision personnelle

Notre rêve d’entrepreneurs, ce n’est pas d’être petit à petit écartés par des acteurs plus gros, qui se mettront eux aussi à faire de beaux contenus et de beaux produits, simplement par manque de ressources. D’avoir été une “tentative louable”. Un truc sympa dont on parlera avec nostalgie.

Notre rêve d’entrepreneurs, ce n’est pas non plus d’être racheté par Lagardère, Webedia ou LVMH. D’intégrer un «portefeuille de titres». 

Notre rêve d’entrepreneurs à nous, c’est de vivre une grande aventure de 40 ans «à la Patagonia», de devenir un «small giant», une entreprise suffisamment grande pour ne pas être en risque, et suffisamment indépendante pour continuer à innover, pour amener de l’éthique sur le marché, pour repousser encore les standards de qualité.

Ça fait 10 ans qu’on est avec vous. Qu’on occupe une petite place dans vos vies. Certains nous lisent hebdomadairement depuis des années ! Certains nous ont découvert en fin d’adolescence, on fait leur initiation vestimentaire, et se font leurs premiers kiffs avec leurs premiers revenus ! 

Eh bien, on veut être avec vous pour les 50 années qui viennent (on se fera une petite camomille au coin du feu, et des tests sur les meilleurs prothèses auditives).

Geoffrey et Benoît, vous allez donc être moins disponibles pour la communauté après la levée ? 

Pas du tout ! 

Geoffrey et moi, on intervient toujours sur le forum, nous continuons de répondre à tous les emails qui nous sont personnellement destinés, et aux commentaires de temps à autres.

Par contre, une équipe de numéros 10 nous permet de nous spécialiser davantage sur nos points forts.

J'aurai ainsi plus de temps pour écrire de longs formats comme «S’habiller après 40 ans» ou l’article sur Maharishi.

Mais aussi développer des contenus plus «spontanés» et personnels tels que :

  • un podcast audio (rapide et facile à faire, avec beaucoup de valeur ajoutée dans les conseils qu’on peut délivrer)
  • les contenus «live» comme Facebook Live ou les webinaires (oui je sais, on n’en fait pas assez)
  • un vlog face caméra où je parle chaque mois de mes découvertes et réflexions sur le vêtement, avec Long qui se débrouille pour rendre le résultat hyper dynamique grâce au montage et à des inserts.

 

Et Geoffrey pourra de son côté davantage réfléchir aux évolutions du site, à ses fonctionnalités, à de la personnalisation automatique, et à la stratégie pour faire découvrir nos articles à plus de monde.

Même s’il aime toujours de temps en temps se fendre d’un petit article de 4 000 mots.

Et vous ne le voyez pas forcément quand un rédacteur signe, mais il fait une passe derrière chaque article, pour que ce soit toujours de la «qualité BonneGueule» qui sorte dans nos colonnes.

Maintenant, posez-nous toutes vos questions sur la levée ! 

Voilà, tout est dit.

Et je sais que c’est une nouvelle qui peut interpeller, faire réagir, voire faire peur à certaines personnes. 

À chaque étape de la vie de BonneGueule, on a eu les mêmes interrogations : quand on a lancé les collaborations de vêtements, au lancement de la marque, de la boutique… 

Pourtant à chaque étape, on a fait exactement l’inverse : toujours plus de contenu gratuit, toujours plus fouillé, toujours plus de services gratuits pour les lecteurs, toujours plus de transparence pour les vêtements, toujours les mêmes fondamentaux.

Et c’est ce qu’on va encore accentuer. Parce que c’est c’est qui nous fait kiffer depuis presque 10 ans.

À présent vous savez tout ! Alors n’hésitez pas à utiliser les commentaires. On répondra, comme d’habitude, à chacun. Parce que c’est ça qu’on fait.

Billet initialement publié sur BonneGueule.

Benoît WojtenkaBenoît Wojtenka a fondé le site de mode masculine BonneGueule en 2007. Depuis, il aide les hommes à construire leur style en leur prodiguant des conseils clairs et pratiques, mais aussi des réflexions plus avancées.

 

 

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