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Entrepreneurs: attention aux vendeurs de pelles!

«Pendant la ruée vers l’or, ce n’est pas les chercheurs d’or qui se sont le plus enrichis, mais les vendeurs de pelles et de pioches….»

Et si cette citation datant du 19e siècle aux Etats-Unis était plus que jamais d’actualité? Aujourd’hui, de nombreux entrepreneurs se lancent dans la création d’entreprise. Chemin faisant, les propositions vont affluer de prestataires divers et variés prêts à vous apporter des milliers de solutions extraordinaires pour développer votre start-up. Pour le meilleur et pour le pire.

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Ainsi, il y a quelques mois nous décidions de lancer notre plateforme de réservation de services à domicile. Etant excessivement radins, nous pensions être immunisés contre les propositions qui gaspillent votre précieuse trésorerie. Nous avions tort…

L’or de temps moderne: les clients

Alors quel est cet or des temps modernes après lequel courent des milliers de start-up? Ce sont les clients, tout simplement!

Souvent, au démarrage d’une start-up, l’équipe va se défoncer pour proposer un produit réussi et une belle expérience client qui rende les utilisateurs contents. 

Mais pour que le client soit content, encore faut-il … qu’il soit client! Ce qui est le drame au moment du lancement: avoir un super produit, mais que personne ne connaît. Et si en plus on est impatient…

Alors, l’entrepreneur va chercher des solutions pour se faire connaître plus largement, pour se développer, pour faire les bons choix. Et sur cette route, il rencontrera alors de nombreux vendeurs de pelles.

Les vendeurs de pelles

Alors qui sont ces vendeurs de pelles des temps modernes? Il s’agit simplement des centaines d’entreprises dont le modèle est de vendre en BtoB aux start-up différents services plus ou moins utiles. Elles profitent alors souvent d’erreurs de débutant du dirigeant, parfois de l’euphorie post levée de fond, et toujours des faibles ressources de la start-up qui l’empêchent de se défendre convenablement.

Le vendeur de pelles n’est pas une arnaque à proprement parler. Comme le chercheur d’or a besoin d’une pelle pour creuser, l’entrepreneur a besoin d’outils pour se développer. Mais certains vendeurs de pelles feront rêver l’entrepreneur de cet or de clientèle qu’il convoite, et lui feront payer cher ces rêves. Avec des offres potentiellement utiles, mais rarement rentables dans le cadre d’une start-up.

Ce fut donc une de mes surprises en tant que nouvel entrepreneur de découvrir le nombre de sollicitations reçues pour améliorer tout ou partie de mon acquisition client. Avec des propositions potentiellement intéressantes, mais souvent cher payées comparées à ce j’aurais pu obtenir en faisant moi-même le travail, et rapporté aux faibles moyens d’une entreprise en création.

Mon expérience personnelle

Le vendeur de pelles auquel j’ai succombé était une agence digitale. L’offre était alléchante: un article sponsorisé dans un magazine à grande audience (pile-poil notre cible clientèle, ça tombe bien), mis en avant en rotation sur la page d’accueil avec 100.000 vues garanties et des liens SEO dans l’article.

L’intérêt pour nous était donc double: un trafic immédiat pour le site, estimé par la commerciale lors de nos échanges entre 400 et 1500 visites, et un travail à plus long terme sur la réputation du site et le SEO.

Le budget était, forcément, très important pour nous puisqu’il correspondait à presque 2 mois de notre budget marketing habituel. Cependant, un retour sur investissement semblait réaliste, au moins à moyen terme.

Le résultat relève de la blague, tellement énorme qu’on a du mal à y croire. 2 utilisateurs.

pierre-andre

 

Face à cette situation, l’agence m’expliquera que:

  • La commerciale n’aurait pas dû me donner de chiffres de performances. Tellement mieux de vendre sans prendre d’engagements…
  • Le contrat ne mentionne pas cet engagement. Logique, et bien fait pour moi, je n’aurais qu’à mieux relire la prochaine fois.
  • Ce que j’ai acheté, c’est de l’image de marque (avec un article que personne ne lit) et du référencement. Sauf que je n’aurais jamais payé ce prix-là pour cela, à ce stade de l’entreprise.
  • Les 100.000 vues ont bien été réalisées. L’avantage, c’est que je n’ai aucun moyen de vérifier. Vous y croyez vous à 100.000 vues qui génèrent 2 visites?

 

Et voilà comment j’ai réalisé mon plus mauvais investissement dans la jeune histoire de ma start-up.

Le vendeur de pelle ultime: Google

Et quand on y regarde de près, le vendeur de pelle ultime n’est autre que Google: quelle fortune ont laissé dans Adwords différentes générations d’entrepreneurs? Avec parfois de la rentabilité, parfois pas. Mais toujours une facture à la fin…

Attention, cela ne signifie pas qu’Adwords soit un mauvais investissement. Je continue d’ailleurs à y avoir recours.

Simplement:

  • Vous payez pour voir: c’est vous qui payez pour savoir si votre campagne fonctionne. Et le temps qu’elle soit optimisée, vous perdez de l’argent. Ainsi, j’ai tenté une campagne display qui s’est révélée totalement catastrophique car diffusée par Google aux mauvais endroits. Mais tant pis pour moi, la facture tombe quand même.
  • Le ROI est souvent limité: avec la forte concurrence maintenant sur Adwords, le ROI devient compliqué à atteindre. Au mieux arrive-t-on à équilibrer tant bien que mal.
  • Google gagne à tous les coups: et au final, que vous gagniez de l’argent ou que vous en perdiez, que vous ayez beaucoup de concurrents ou pas, celui qui gagne à tous les coups, c’est Google.
  • Google est une drogue: une fois qu’on a pris l’habitude, difficile de se désintoxiquer de ce «shoot» de visiteurs supplémentaires.

 

4 enseignements pour jeune entrepreneur

Ainsi, quelques conseils personnels tirés de mes erreurs pour les jeunes entrepreneurs et créateurs de start-up.

Ne soyez pas trop pressés

Quand on sort enfin notre produit, qu’il est réussi, que les clients l’aiment, on a envie de le crier à la face du monde et que tout le monde le connaisse. Pour aller plus vite, la tentation est forte de «payer pour voir». Mauvaise décision.

Mieux vaut donc aller un peu moins vite, mais construire une clientèle et une réputation qui ne soit pas dopée aux investissements publicitaires. Plus solide, plus durable, mais moins rapide…

Faites-en le maximum vous-même

En tant qu’entrepreneur, la seule chose gratuite, c’est vous! Alors faites le maximum par vous-même. Cette approche présente de nombreux avantages:

  • Economique car vous évitez de dépenser inutilement.
  • Formatrice car vous allez apprendre à utiliser les outils, et serez ensuite plus pertinent pour en comprendre le fonctionnement et l’utilité réelle.
  • Durable: en tant qu’entrepreneur, vous aurez à prendre des décisions sur de nombreux sujets hors de votre champ d’expertise d’origine. Avoir fait par soi même pendant un temps permet ensuite d’être plus pertinent et de mieux comprendre son business.

 

Attention, ce conseil s’applique surtout aux débuts d’une start-up. Avec la croissance de l’entreprise, votre temps devient de plus en plus contraint. Il sera alors pertinent de sous-traiter certains sujets à des employés ou des prestataires. Mais au moins, vous saurez de quoi vous parlez.

Soyez Radins

Dans une start-up, l’argent manque ou manquera inévitablement. C’est le nerf de la guerre dans la durée. Soyez radins, mesurez chaque dépense, négociez les prix sans cesse.

Cette démarche est assez naturelle quand on est en early stage ou love money. Mais ce conseil s’applique aussi après, et notamment après la première levée de fond. D’un coup, cet afflux d’argent disponible peut donner la folie des grandeurs et l’envie de dépenser après s’être privé si longtemps. Pouvoir enfin accéder à toutes ces offres alléchantes… Combien d’entrepreneurs ont regretté ensuite d’avoir dépensé trop vite?

Pour un entrepreneur, la pression sur les dépenses vient de tous côtés: un salarié à augmenter, du matériel à acheter, des vendeurs de pelles qui font rêver… Garder les pieds sur terre et rester prudent dans les dépenses est le meilleur moyen d’être moins dépendants des levées de fonds et de gagner du temps pour construire une entreprise durable. Le prix de l’indépendance en quelque sorte.

ROI, ROI, ROI

Pour autant, il faut parfois semer pour récolter, et dépenser pour gagner ensuite. Une seule approche à cela: le retour sur investissement (ROI).

  • Calculez systématiquement la rentabilité d’un investissement, particulièrement marketing.
  • Investissez dans des campagnes à la performance, où vous ne payez qu’en cas de succès. Au moins, votre intérêt et celui du prestataire seront alignés.
  • Fuyez ceux qui vous expliquent qu’il ne faut pas penser en termes de ROI mais de réputation à long terme.

 

Keynes disait «A long terme, nous sommes tous morts». Pour une start-up, l’adage pourrait être «à court terme, nous pouvons très vite mourir». Investissez en gardant cette maxime en tête.

Et méfiez-vous des vendeurs de pelles!

Pierre André

 

Pierre André est le cofondateur de Wecasa.fr, un site de réservation de prestations de service à domicile. Il était auparavant directeur des opérations chez Quelle Energie, un service d'accompagnement des particuliers dans le domaine de la rénovation énergétique.

 

 

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2 commentaires

  1. Très bonne prise de position, à lire par tous les entrepreneurs, en particulier les moins expérimentés !

    Je veux juste rajouter un point et du coup modérer un peu l’une des quatre recommandations, celle de « faire le maximum par soi-même ».

    Sur les +150 startups que j’ai accompagnées, 100% d’entre-elles n’avaient pas correctement défini leur positionnement, à savoir quel problème crucial elles résolvaient pour quelles cibles exactement. Dès lors, impossible pour elles de cibler correctement leurs actions marketing qui toutes donnaient des résultats pitoyables en termes de ROI.

    Donc, avant de s’adresser à des prestataires de marketing opérationnel, il faut déjà connaitre parfaitement ses cibles, leurs habitudes de consommation, évidemment leurs besoins, donc les messages auxquels elles sont sensibles ainsi que la meilleure façon de les toucher. On peut ainsi choisir le bon vecteur (Adwords, SEO, Emailing, …) et du coup le bon prestataire : si on a besoin d’une pioche, s’armer d’une pelle sera inefficace !

    Une fois que cette hypothèse stratégique de positionnement (donc de cibles) est faite, il faut faire des essais d’actions marketing à budget très modéré pour tester sa pertinence. On ne peut pas toujours faire ces actions soi-même, il faut alors privilégier des prestataires qui offrent des services très modulaires permettant la montée en puissance progressive.

    1. Merci de votre commentaire. Evidemment, ma recommandation de tout faire soi-même est à mesurer en fonction du stade de développement et de l’importance des sujets.

      Surtout, votre observation est très juste : lorsqu’on a créé un service qui fonctionne, l’envie est grande d’arroser largement et de communiquer de manière insuffisamment ciblée. Ave des résultats décevants en ROI.

      Et effectivement, avant d’investir des sommes importantes à l’échelle de la start-up, il faut faire des tests à petite échelle pour valider et ajuster la rentabilité de l’opération…

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