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Infobésité Et Zéro Email : La Juste Cause D’Atos par Yann Gourvennec

Mon combat contre l’infobésité (non, le terme n’est pas trop fort) a commencé il y a longtemps. Infobésité, ce mélange d’information et d’obésité est un fléau qui n’est probablement pas né avec l’informatique. Aussi étrange que cela paraisse, quand les livres sont arrivés, il y eut de savants râleurs pour prédire l’apocalypse du savoir. C’est dire que, même cela n’est pas nouveau ! L’arrivée de l’Internet, il y a déjà une éternité (25 ans !), n’a pas amélioré les choses. Feu le Web 2.0 (2004) a passé la deuxième couche en multipliant les contenus générés par les utilisateurs (UGC) de manière spectaculaire. D’aucuns prétendent même que les informations générées doublent tous les ans. Pourquoi pas. Mais à côté de l’email, tout cela n’est que de la rigolade…

Infobésité : le courrier électronique est-il un (faux) ami

Le courrier électronique est à la fois notre meilleur ami (en tant que chef d’entreprise, il est mon lien avec mes clients, prospects, partenaires et mon réseau) mais il est aussi un fléau du monde moderne, avec ses tonnes de messages, et ses alertes permanentes, qui viennent troubler le repos de l’utilisateur, même dans ses heures les plus intimes. 30 % des e-mails aux USA sont lus sur les mobiles, voilà qui n’arrange pas les choses ! Enfin et surtout, c’est environ 40 % du temps des cadres en moyenne qui est utilisé à cette activité, pas toujours productive. Joyeux euphémisme (voir les chiffres dans la présentation).

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notre temps est-il absorbé par cette infobésité

Pas nouveau mais préoccupant

Le phénomène n’est pas nouveau. J’écris sur ce sujet depuis 2000, et je revenais alors déjà sur 12 ans d’expérience de l’usage du mail chez Unisys (120 000 employés dans le monde à l’époque et beaucoup de communications internationales). Et quand on soulève ce problème de surcharge pondérale lié au courrier électronique, il y a toujours au moins une personne de l’assemblée pour prendre la mouche et croire qu’on lui en veut personnellement. Il y a, je le sens, comme une sorte d’angoisse perçue par certaines personnes, vis-à-vis de l’éventuelle perte d’un repère, d’un outil devenu familier… Malgré ses défauts.

Pas seulement un problème de quantité

D’ailleurs, cette expérience des premiers jours d’Unisys (1988-1997) n’est pas anodine. Certes, en 88, le mail était très loin de ressembler à ce que nous avons aujourd’hui, et surtout, les messageries n’étaient pas reliées entre elles par l’Internet. Elle ne tournaient qu’en circuit fermé. Et pourtant… Tous les germes du mal étaient déjà observés à cette époque, comme le démontre mon article de Sam magazine de 2000. C’est, je crois, qu’il n’y a pas une seule problématique de surcharge de l’information, pas seulement une histoire de quantité. Mais surtout une problématique d’utilisation et de qualité de comportement. C’est ce comportement qu’il faut changer, et je partagerai demain, lors du congrès de l’agroéquipement qui se tiendra à Biarritz, mes recettes pour mieux gérer sa messagerie (voir présentation ci-après).

Le zéro e-mail

Tout ceci est joli, mais mes conseils, même parfois assez radicaux sur l’utilisation du mail (je n’hésite pas par exemple à suggérer de filtrer automatiquement les messages dont vous êtes en copie) ne sont rien à côté des tentatives beaucoup plus extrémistes de Luis Suarez d’IBM (voir mon interview), et surtout d’Atos. C’est sur cette dernière expérience que j’aimerais m’appesantir, car il s’agit d’un véritable projet entreprise. La vision de Thierry Breton tel qu’il a exprimé en 2011, était non seulement à contre-courant de tout ce qu’on entendait alors (et encore aujourd’hui hélas…), mais elle dénotait aussi un courage très net. Et surtout, cette démarche n’hésitait pas à mettre le doigt sur un véritable fléau de nos entreprises, dont l’impact sur la qualité de vie au travail est loin d’être négligeable. Beaucoup d’entreprises s’en sont rendu compte, puisqu’elles ont créé des no-email Fridays (Deloitte, et plus récemment Alcatel-Lucent). Mais ce ne sont là que des initiatives d’un jour, à des années lumières de la croisade de Breton chez Atos.

Un problème de qualité de vie au travail… et en dehors

Avec l’utilisation excessive de la messagerie sur mobile, les problèmes de qualité de vie vont même bien au-delà du travail. La démarche de Breton, était visionnaire car, tout en risquant de déplaire à cette minorité incompressible qui ne sait faire autrement que de s’envoyer des messages toute la journée, elle avait le mérite de montrer qu’une réduction du volume des messages, notamment en fonction de leur usage et de leur destination, pourrait avoir un impact positif sur la productivité. C’est cela qui est visionnaire. Pas seulement une volonté de réduire la quantité de messages. Comme d’habitude, les grincheux sont là

Mais voilà ! Ce qui est radical ne plaît pas toujours à tout le monde. C’est même par essence ce qui arrive avec ce genre d’initiatives. Alors, nul doute qu’on entende ici et là des grognons font état d’un éventuel retour en arrière de Thierry Breton et d’Atos sur la politique zéro e-mail. Face à ces critiques et à ce scepticisme, j’ai décroché mon téléphone et j’ai appelé les représentants de cette initiative qui ont eu la gentillesse de me donner des chiffres sur l’état d’avancement de la fameuse initiative d’Atos. Presque en s’excusant de ne pas être arrivés à 100% du zéro e-mail, ils m’ont confié des chiffres que j’estime impressionnants en termes de réduction des volumes (jusqu’à 60 % !).

Admettons qu’ils mentent, ce que je refuse de croire, ou qu’ils se trompent, et qu’il n’aient réduit le volume de messagerie que de 30 %. Voilà qui est déjà une énorme avancée, vers l’utilisation raisonnée de l’informatique de communication (voir aussi les autres chiffres dans la présentation).

Le courage des équipes d’Atos, est de s’être accroché à cet objectif certes un peu ambitieux, pour réussir quelque chose de déjà remarquable, et que tout le monde dans les entreprises devrait regarder avec intérêt. Et commencer à copier. (Ré)apprendre à se parler, retrouver le ton de communication juste en échangeant directement autour des outils synchrones de communication, y compris le bon vieux téléphone, et surtout la messagerie instantanée, le tout branché sur un outil de partage comme Bluekiwi (là aussi Atos a réussi un pari en devenant éditeur, avant les autres ESN qui cherchent toutes à faire la même chose), voilà la véritable voie vers l’accroissement de productivité, véritable bon usage de l’informatique. Parfois, souvent devrais-je dire, pour mieux utiliser un outil il faut savoir l’oublier.

Je ne manquerai pas demain après-midi, de tirer mon chapeau à mes confrères d’Atos. La conduite du changement n’est pas une science exacte et demande du courage et de la persistance. Je n’ai aucun doute sur le fait qu’Atos soit sur la bonne voie et, pour la bonne cause, je suggère que dans le zéro e-mail, on oublie le zéro.

Cet article a été écrit par Yann Gourvenec, fondateur de Visionary Marketing et auteur de La communication digitale expliquée à mon boss.

Crédit photo: Fotolia, banque d’images, vecteurs et videos libres de droits

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4 commentaires

  1. Zéro mail en interne en restant humain.
    Il y a dans toutes les entreprises des non digital natives, même friendly, pour qui le mail est encore un outil de travail et de transmission de l’information.
    On peut regretter que la mutation digitale et collaborative soit aussi lente mais le véritable visionnaire est humain.

    1. Oui le sujet est bien de remettre l’humain au coeur du débat et de ne pas « robotiser » la relation. Sur la fameuse « génération Y » je suis fatigué d’expliquer qu’elle n’existe pas, les mythes sont tenaces. Les études sociologiques menées en son temps par Orange Labs montraient clairement qu’il n’y avait pas de différence entre générations à partir du moment où les jeunes générations rentraient dans le monde du travail, elles adoptent rapidement les mêmes (mauvaises) habitudes. Hélas, je pense que je pourrai encore recycler mes articles sur le mail des années 2000 dans 10 ans ou plus, le temps que la collaboration et ses usages s’instaurent naturellement … il y a encore du boulot.

      Quelques articles sur la pseudo génération Y
      http://visionarymarketing.fr/blog/2012/11/les-digital-natives-nexistent-pas-12/
      http://www.slate.fr/lien/72945/etude-generation-narcissisme

  2. le problème est aussi que le mail est un outil qui « trace », genre : je reçois des mails du bureau d’à côté, et l’expéditeur peut s’en prévaloir.

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