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Pierre-Etienne Pommier (Pythagora): «L’État a peur de travailler avec des start-up»

L’école doit faire un peu plus sa révolution numérique à la rentrée 2016. Annoncé en 2015, le plan numérique pour l’école qui consacre 1 milliard d’euros d'investissements sur trois ans, prévoit notamment le déploiement d’« équipements individuels mobiles », des tablettes, dans un quart des collèges publics. 

Pour nourrir ces cours en contenus numériques, le gouvernement avait lancé un appel à projets en novembre 2015 auprès d'entreprises éditrices de formats scolaires innovants. Pythagora, producteur de vidéos éducatives, faisait partie des start-up répondant à cet appel public. Sur son site, la société parisienne revendique une production de «300 vidéos de révision de bac, plus de 50 heures produites». Alors qu'elle estime avoir présenté une offre de contenus attractive au Ministère, Pythagora a appris en mars 2016 que son dossier n'avait pas été retenu. Son fondateur dénonce la sélection du Ministère de l'Education Nationale qui, estime-t-il, a privilégié les éditeurs traditionnels.

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Frenchweb: Quelle a été votre stratégie pour répondre à cet appel à projets?

Pierre-Etienne Pommier, fondateur de Pythagora: Nous avions des contacts avec le Ministère de l'Education depuis trois ans. Dans cet appel à projets, nous étions face à 50 candidats; un mélange de start-up et de grands groupes, devant remporter 18 lots, à raison d'un lot par matière et par cycle. Pendant un an, toute notre stratégie avait été orientée pour y répondre. Je me rappelle m'être dit "si le marché s'ouvre, il faut qu'on y aille". On s'était bloqué là-dessus dès le mois de juin 2015. Côté ressources, cela représentait deux salariés à temps-plein pendant trois mois. Leur travail était notamment de solliciter une multitude de partenaires, des associations de professeurs de mathématiques, des laboratoires de recherche, ou encore le Canadien MappleSoft pour la brique technologique. Nous avons fait des pilotes et des maquettes.

Ce que l'on peut dire, c'est que la réponse que nous attendions a mis du temps à tomber. Nous l'avons eu en mars 2016 pour apprendre que nous n'avions même pas passé le premier tour. Nous avons découverts notre note (sur 100), avec des écarts hallucinants entre les cycles, alors que nos produits pour les 3e et 4e étaient quasi similaires. Au final, c'est Hachette, Belin, Editis et les autres grands éditeurs qui ont remporté les 18 millions d'euros prévus sur 3 ans. J'ai hésité à lancer des poursuites judiciaires sur le non respect des règles d'attribution dans le cadre d'un marché public, mais j'ai tourné la page. 

 

Ne peut-on voir des raisons objectives au choix du Ministère, quand des petits acteurs (Tralalère, DigiSchool, Unowhy…) reçoivent un soutien du Ministère sur d'autres appels à projets?

Pierre-Etienne Pommier : La raison c'est que l'État a peur de travailler avec des start-up. Un Hatier est beaucoup plus rassurant, mais ces acteurs n'innovent pas. Les critères de départ du Ministère étaient grotesques. Sans parler de la novlangue. L'appel à projets portait sur "des ressources ganulaires". Ils ont décomposé en "grains pédagogiques (…) comprenant une intentionnalité pédagogique ". On m'a reproché de ne pas avoir assez de granules et de "conforter les enseignants dans une démarche transmissive". 

Aujourd'hui, je me rends compte que le marché est impossible à investir si l'on veut y vendre des services. Au mieux, le Ministère achète des outils, comme pour l'appel à projets que vous citez, mais il ne permet en rien la création d'un marché de l'édition scolaire.

 

Un partenariat start-up/ grand groupe, avec une maison d'édition, ne vous aurait-il pas donné plus de chances?

Pierre-Etienne Pommier : Les maisons d'édition n'en veulent pas. Elles le feront seulement si elles sont actionnaires de votre start-up, comme dans le cas de Bayard. J'avais envoyé une proposition à tous les acteurs traditionnels. Mais en France, ils ne travaillent pas avec les start-up. Aux Etats-Unis, vous avez le géant Pearson qui a ouvert un accélérateur thématique sur le sujet. Demandez à Hachette, ils n'ont rien sur l'open-innovation.

Les éditeurs ont gagné parce qu'ils étaient aussi moins chers que nous (ce qui est facile compte-tenu de leur taille et des subventions qu'ils ont reçues par ailleurs). Dans cette histoire, je les soupçonne même d'avoir fait pression sur la livraison des manuels papiers pour rafler les produits numériques.

Mon erreur a été de dire qu'on va constuire quelque chose d'innovant en répondant à des marchés publics. 

Quels sont vos objectifs aujourd'hui?

Pierre-Etienne Pommier : J'abandonne le marché de l'édition scolaire pour me recentrer sur la production média. Je vais lancer un fonds de dotation pour financer les acteurs innovants avec plusieurs partenaires privés. 

 

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2 commentaires

  1. Au delà du fond et des raisons invoqués du choix du ministère, ce que je retiens une fois de plus est le coût exorbitant des processus d’AO qui mettent en concurrence des très/trop nombreuses entreprises sur des AO qui demandent énormément de temps pour y répondre. En extrapolant par exemple ce qu’annonce M. Pommier comme ressource qu’il a dû mobiliser, l’AO a couté et ce, uniquement pour sa 1ere phase et sans compter les ressources mobilisées sur la rédaction de l’AO et le processus de sélection, je compte 50*2*20 soit 2000 jours ouvrés ETP…

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