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Que dit le licenciement des trois salariés d’Alten sur Facebook ?

Vendredi dernier, le Conseil des prud’hommes de Boulogne-Billancourt a confirmé la légalité des licenciements pour fautes graves de trois salariés de la société informatique Alten.

Chacun d’entre eux avait publié un week-end sur son mur Facebook, et depuis son domicile, des critiques sur la hiérarchie de l’entreprise et s’était proclamé membre du « club des néfastes ». D’autres salariés d’Alten avaient pu lire ces publications par le jeu de l’accessibilité des murs aux amis d’amis et  l’un d’entre eux en avait informé la direction de la société.

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Les trois salariés ont donc été licenciés pour fautes graves en l’occurrence  « dénigrement de l’entreprise » et « incitation à la rébellion« . Les prud’hommes ont estimé que « dès le moment où l’on a plusieurs amis susceptibles de lire le message, celui-ci prend un caractère public ».
En clair, à moins de n’être « ami » sur Facebook qu’avec de véritables amis, tout ce qu’on peut y dire est du ressort de l’expression publique et peut prêter à conséquence dans le cadre professionnel. Certains parlent d’une nouvelle jurisprudence à propos de ce jugement que les avocats des trois salariés devraient maintenant porter vers la cour d’appel.

Entretien avec Maître Emmanuel Sordet du Cabinet Granrut Avocats

Autre avis, celui de Maître Etienne Pujol du même cabinet d’avocats :

« Cette affaire est une des premières en droit social sur des propos tenus sur un « mur » de Facebook.
Il faut d’abord voir qu’il y a non pas un mais deux jugements car il y avait deux salariées licenciées pour avoir écrit sur le mur d’un autre, tous trois travaillant dans la même société.
L’attitude de l’une des deux était a priori la plus « contestable » puisque c’est elle qui a écrit un commentaire décrivant le rite initiatique pour être considéré comme « néfaste », se terminant par « hi hi hi ». L’autre a ajouté « Bienvenue au club » avec un smiley.

Première critique à ce jugement : curieusement, la juge a considéré que ni le « hi hi hi » ni le smiley n’étaient preuve d’un caractère humoristique.

Deuxième critique : les deux salariées ont été sanctionnées de la même manière alors que les propos tenus pas l’une ne peuvent être de même poids que ceux tenus par l’autre.

Troisième critique : le jugement indique que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, puis que leur comportement est constitutif d’une faute grave. Pour autant, l’un n’est pas interchangeable avec l’autre et le juge n’a pas caractérisé en quoi il y avait faute grave, c’est-à-dire en quoi la poursuite du contrat de travail pendant le préavis n’était pas possible.

Quatrième critique : est-ce que ce qui est écrit sur le mur d’un tiers est de la correspondance ? Le jugement ne se prononce pas sur ce point. Par ailleurs, le jugement explique que le « propriétaire » du « mur » avait paramétré son compte pour en laisser l’accès aux « amis de ses amis » permettant ainsi un accès ouvert notamment par les salariés ou anciens salariés de la société. Mais ses seuls amis pouvaient aussi être des salariés et anciens salariés de la société. Ce n’est pas un argument qui permet d’établir si la sphère de communication est privée ou pas. A partir du moment où le propos n’est pas accessible par tout tiers notamment via un moteur de recherche, il n’est normalement pas public.
La cour de cassation a indiqué que des propos publics sont ceux échangés entre des personnes n’étant pas liées entre elles par une communauté d’intérêts. Ici il y en avait, a priori. Par ailleurs, la cour d’appel de Paris a pu décider qu’une correspondance privée pouvait être échangée entre un nombre restreint de destinataires… Les amis des amis sont forcément en nombre limités : si cette publication sur le mur d’un tiers était limitée à un certain nombre de personne pouvant le voir, ils étaient un nombre restreint de personnes ?

Cinquième critique : Les deux salariées qui ont publié leur commentaire n’avaient aucun moyen de savoir si le mur du premier salarié était réservé aux amis de ses amis et non pas à ses seuls amis. Est-ce que ce point leur serait opposable ?

Sixième critique : le jugement, qui a donc mis de côté le caractère humoristique des propos tenus, n’indique pas en quoi il y a intention de nuire à l’employeur ou dénigrement de l’employeur.  L’entreprise n’est pas citée et un lecteur ami d’ami ne pouvait savoir avec certitude qui était visé par ces propos…

Un débat intéressant en perspective devant la Cour d’appel… »

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3 commentaires

  1. Alten fait encore plus fort en organisant parallèlement un concours Idmobile.
    Le cout en matière d'image pour une SSII qui se prétend innovante, va faire très mal, au niveau du recrutement.
    C'est ce qu'on peut appeler un effet boomerang explosif. Espérons qu'en appel, il y aura un changement de cap.

  2. Je suis pas tout à fait d'accord avec l'intervenant, lorsqu'il fait le parallèle avec l'usage de la messagerie professionnelle. Car c'est l'usage des outils professionnels qui est réglementé, par contre « le salarié a droit, pentant son temps et sur son lieu de travail, au respect de l'intimé de sa vie privée.
    Cela veut dire que lorsqu'il écrit un mail, il y a le secret de la correspondance.
    L'employeur ne peut donc sauf, dans un cadre légal et juridique avoir accès à la boite personnelle de son salarié. Et les tribunaux ont confirmés que l'employeur n'avait pas gain de cause, lorsqu'il obtenait des preuves en accédant à la boite mail de son salarié sans 'autorisation"
    Si un autre salarié qui reçoit le message "personnel" le transmet à la direction. Cela ne sera recevable que si le contenu est illicite. 'Menace, insulte etc…)
    Ce qui me dérange dans cette affaire, c'est la sanction qui me semble disproportionnée par rapport aux propos tenus. Je pense réellement que cette affaire est grave et peut entrainer des dérives. Alten a tout à perdre avec ce type de publicité. Les personnes qui ont été licenciés ont fait preuve d'imprudence, mais il faut se re-situer dans le contexte. Les critères de confidentialités n'étaient pas si évident à cerner, sur Facebook pour un néophyte.
    La seul leçon à retenir, les contenues du web sont en grande partie de l'écrit et les écrits restent.

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