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Mark Zuckerberg malmené lors de son grand oral devant le Sénat américain

C’est un tournant dans l’histoire de Facebook. Pour la première fois, Mark Zuckerberg, le PDG de la firme américaine, a été auditionné par le Congrès des États-Unis à Washington ce mardi 10 avril. Devant deux commissions du Sénat, celles du commerce et de la justice, il était invité à venir s’expliquer sur les pratiques du réseau social portant atteinte à la vie privée alors que l’entreprise est engluée dans l’une des plus graves crises de son histoire avec l’affaire Cambridge Analytica. Pour rappel, cette société britannique est accusée d’avoir siphonné les données personnelles de 87 millions d’utilisateurs du réseau social. Le visage pâle, avec de larges cernes, et cravate bleue assortie à la couleur de Facebook, Mark Zuckerberg, qui a passé les derniers jours à préparer en profondeur son audition, a ainsi fait face aux sénateurs américains, qui l’ont interrogé pendant plus de trois heures rythmées par quelques échanges tendus.

D’emblée, le sénateur républicain John Thune a mis le patron de Facebook face à ses propres responsabilités. «Ce que vous avez créé représente le rêve américain, vous êtes une source d’inspiration pour beaucoup. Vous avez l’obligation de faire en sorte que ça ne se transforme pas en cauchemar sur les données», a-t-il lancé à Mark Zuckerberg. Acculé, ce dernier a sorti la carte de l’apaisement en présentant ses excuses. «C’est mon erreur, et j’en suis désolé. J’ai fondé Facebook et je l’ai développé, je prends la responsabilité de ce qui est en train de se passer», a-t-il ainsi assuré. Pour appuyer ses propos, il a présenté les mesures prises par le réseau social au cours de ces derniers mois, comme le renforcement des équipes de sécurité, dont l’effectif va passer de 15 000 à 20 000 personnes pour vérifier les contenus publiés sur le réseau social, ou l’examen de toutes les applications ayant eu accès à des grandes quantités de données. «Vous vous excusez depuis quatorze ans», a rétorqué John Thune face au mea culpa du patron de Facebook.

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Mark Zuckerberg mis en difficulté sur des questions basiques 

Toutefois, il en fallait plus pour calmer la colère des sénateurs américains, qui ont multiplié les questions mettant en difficulté la défense du PDG de Facebook, à l’image du sénateur démocrate Dick Durbin. «Monsieur Zuckerberg, pourriez-vous dire à tout le monde ici dans quel hôtel vous avez dormi hier soir ?», a-t-il lancé au milliardaire américain. Réponse par la négative de ce dernier, qui en a repris une salve dans la foulée : «Voudriez-vous nous dire avec qui vous avez échangé des messages la semaine dernière ?» Une nouvelle fois, Mark Zuckerberg a refusé de répondre. «Pourtant, c’est bien de cela dont on parle aujourd’hui : votre droit à la vie privée. Il s’agit de votre droit et de savoir si vous êtes prêt à l’abandonner afin, je cite, de connecter le monde. Tout le monde devrait pouvoir contrôler la façon dont ses données sont utilisées», a déclaré Dick Durbin pour conclure.

Déstabilisé par ces questions intimes, Mark Zuckerberg l’a également été avec des questions pourtant simples en apparence et inévitables compte tenu des faits reprochés au réseau social. «Facebook trace-t-il les données de navigation des internautes, même lorsqu’ils ne sont pas connectés ?», «D’autres applications ont-elles pu récupérer de grandes quantités de données ?», «Des mineurs ont-ils pu être concernés par la collecte de données d’appels téléphoniques ?» ou encore «Combien de temps gardez-vous les données des utilisateurs qui suppriment leur compte ?» Autant de questions auxquelles Mark Zuckerberg s’est contenté de répondre en lâchant «je l’ignore», «je reviendrai vers vous» ou encore «mes équipes vous tiendront au courant», ce qui n’a pas manqué d’agacer profondément les sénateurs américains.

Vers une version payante de Facebook ?

Les élus ont également voulu tester le patron de Facebook sur sa vision de la concurrence. Peinant à citer un concurrent du réseau social, Mark Zuckerberg a préféré se raccrocher aux autres GAFAM en mentionnant «Google, Apple, Amazon et Microsoft». La réponse n’a pas convaincu le sénateur républicain Lindsey Graham. «Si je suis lassée de Facebook, à quel réseau social équivalent puis-je m’inscrire ?», a demandé l’élu, attendant de Mark Zuckerberg qu’il évoque de «vrais compétiteurs». Moment de flottement chez le patron de Facebook, qui n’a pas eu le temps d’aller au bout de sa réflexion, face à la ténacité du sénateur républicain. «Vous ne pensez pas que vous avez le monopole?», a ainsi renchéri ce dernier. Face aux rires de l’assistance, Mark Zuckerberg a simplement lâché qu’il «n’avait certainement pas cette impression».

Outre la concurrence, le milliardaire a également été interrogé sur le modèle économique de Facebook. Ainsi, le sénateur démocrate Bill Nelson a demandé au PDG de la firme américaine s’il envisageait de proposer une version payante du réseau social aux utilisateurs qui veulent que leurs données personnelles ne soient pas utilisées à des fins commerciales. «Il y aura toujours une version gratuite de Facebook», a répondu Mark Zuckerberg, laissant ainsi la porte ouverte à une version payante. Cependant, il a préféré défendre le modèle économique du réseau social basé sur la publicité. «Si vous voulez une expérience sans publicités ciblées, vous pouvez désactiver cette option. Mais les gens n’aiment pas les publicités qui ne sont pas pertinentes, ils préfèrent les publicités pertinentes. Sans publicité, nous aurions besoin d’un autre modèle économique.»

Un premier pas vers la régulation 

Enfin, et c’est peut-être l’un des enseignements majeurs de ce grand oral de Mark Zuckerberg devant le Sénat américain, l’hypothèse d’une régulation des GAFAM n’est plus une illusion. Face à la volonté des élus d’instaurer d’une législation plus stricte pour réguler l’activité des géants du numérique, dans la lignée du Règlement européen sur la protection des données qui devra être respecté à partir du 25 mai prochain, le patron de Facebook se dit ouvert à cette perspective. «Notre position n’est pas qu’il ne devrait pas y avoir de réglementation. Mais nous voulons être certains que c’est la bonne réglementation», a-t-il déclaré.

Cependant, Mark Zuckerberg estime qu’une réglementation plus stricte pourrait constituer un frein à la création de nouvelles entreprises technologiques. Facebook veut changer mais pas trop. «Nous traversons un grand changement philosophique au sein de la société», a-t-il assuré. Et d’ajouter : «Nous devons prendre plus largement conscience de nos responsabilités, nous assurer que Facebook soit utilisé à bon escient. Au final, les gens finiront par voir une vraie différence.» Reste désormais à voir si les sénateurs américains verront cette différence dans les prochains mois.

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4 commentaires

  1. Aucune difficulté de la part de Mark Zuckerberg, qui n’a fait qu’éviter les balles grâce à l’incompétence et l’incompréhension des sénateurs qui n’avaient AUCUNE IDEE de la manière dont fonctionne Facebook. Et il n’a pas non plus annoncé une possible version payante du site mais a uniquement expliqué que, s’ils devraient obtenir des revenus autrement qu’avec la pub, ils devraient réfléchir à un autre modèle économique. C’est Sheryl Sandberg qui a répondu, sur un ton (quelque peu piquant) « et bien payez pour Facebook dans ce cas » le matin même dans une émission de télé, pour rappeler le business model de l’entreprise. Rien à voir.
    Bon article de la CNN ici :
    http://money.cnn.com/2018/04/10/technology/senate-mark-zuckerberg-testimony/index.html?sr=twCNN041118senate-mark-zuckerberg-testimony0647AMStory

    1. Bonjour Claire,

      A chacun sa grille de lecture et la liberté de son analyse. Qu’il y ait un choc des cultures c’est évident, toutefois les interventions des sénateurs étaient loin d’être naïves. Les questions posées avaient un sens juridique qui visiblement vous a quelque peu échappé.

  2. bjr,
    côte ouest, c’est plutôt la commission qui est malmenée par les médias. Pas tous incompétents les sénateurs, mais certaines questions laissent effectivement pantois. Zuck s’en est plutôt bien sorti, jusqu’à présent. Si vous voulez voir à quoi ressemble un patron voyou vraiment malmené, checkez l’audition de Troy Alstead par Margaret Hodge. Hier c’était franchement gentillet mais au moins, les politiques bougent. En France vous continuez de fournir la vaseline à FB: Station F, labo d’IA, IS et taxes, data privacy, …

  3. Ce résumé est super détaillé et bien écrit pour ceux qui n’ont pas suivi le grand oral. Beau boulot !

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