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Transformation digitale : prière de ne pas oublier les cols bleus

Trop souvent dans l’entreprise la transformation digitale reste une affaire de cols blancs et cela à deux niveaux. Tout d’abord elle est pensée par des cols blancs et, ensuite, elle est faite à destination des cols blancs. Mon propos récent sur l’intranet et la digital workplace n’est en fait que l’illustration d’un problème beaucoup plus vaste.

La transformation digitale entre idées reçues et frilosité.

Ce problème à deux causes : des idées reçues sans fondements et une certaine frilosité quand il faut aller au fond des choses.

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Les idées reçues et raccourcis faciles pour commencer. Le digital c’est de l’internet et de l’informatique, donc un truc pour les gens qui utilisent un ordinateur au bureau et pour les professions qui « manipulent des symboles », autrement dit les travailleurs du savoir. En voilà un premier. Un second c’est de croire que le savoir et la lumière ne résident qu’au sein d’un cercle d’élus et que les collaborateurs n’ont rien à répondre à la question « avez vous des problèmes de terrain, des problèmes métier que le digital peut résoudre ». Et même si on le fait, le processus d’écoute s’arrête à la porte des bureaux et ne va pas salir ses semelles dans les usines, sur les chantiers ou ailleurs.

La frilosité ensuite. En admettant qu’on parte du principe que le digital a une vraie valeur pour les hommes de terrain et les cols bleus, encore faut il le leur rendre accessible. On parle alors d’informatiser et mettre en réseau des endroits improbables, d’outiller de tablettes ou de smartphones des gens qui avaient toujours vécu sans. Cela a un coût absolument pas négligeable qui fait qu’on y réfléchit à deux fois avant de lancer.

La transformation digitale n’est donc ni pour la femme de ménage, ni l’ouvrier, le vendeur en magasin ou la caissière. Pour ne citer qu’eux.

Le paradoxe digital : vouloir des bénéfices opérationnels sans s’adresser aux opérationnels

Vouloir un vrai bénéfice opérationnel d’un projet qui n’outille pas les opérationnels, voilà la difficile équation que s’imposent nombre d’entreprises. Le sujet me semble assez compliqué pour éviter, en plus,  de s’accrocher soi-même un boulet à la cheville, mais visiblement certains aiment ça.

J’ajouterai un second risque évident : le désengagement. De la même manière que de manière générale on voit les collaborateurs se démobiliser parce que tout l’effort digital part vers le client alors qu’on leur demande à eux de faire plus et mieux avec un outillage d’un autre âge et une expérience employé déplorable, on retrouve ce même fossé entre les bureaux et les usines, magasins et autres, à un niveau surement encore supérieur.

Les opérations : la face cachée, sale, mais rentable de la transformation digitale

Qui sont donc le plus souvent les grands oubliés de la transformation digitale ? Les opérationnels de bout de chaine, et a fortiori lorsqu’ils n’ont pas de poste de travail informatisé.

Alors que le travail de conseiller bancaire en agence se transforme de manière radicale, comment les outils mis à leur disposition les aident ils à remplir efficacement leur nouveau rôle face au client ?

Dans l’aérien les personnels navigants et au sol de certaines compagnies commencent à être équipés de tablettes simplifiant les tâches cœur de métier ainsi que le gestion de la relation client. Commencent….ça c’est loin d’être une généralité.

Le process de check-in de nombreux hôtels reste totalement archaïque, mais là encore tant qu’on ne généralise pas le self check-in et qu’on donne au personnel d’accueil des logiciels dignes de l’administration stalinienne rien ne va changer. Le pire c’est qu’à côté on exhorte ces mêmes personnels à être plus proactifs, plus réactifs, à apporter une valeur ajoutée de conseil dans la relation client alors qu’on ne leur en donne les moyens ni par la formation, ni par la mise en place de référentiels nouveaux, ni par les outils. De là à ce qu’ils se fassent disrupter un jour par des agents digitaux…

Lorsque vous allez sur le site de nombreuses enseignes de distribution vous êtes aujourd’hui reconnus en tant que client. « Bonjour Untel, dans les nouveautés vous devriez aimer ça vu que vous avez déjà acheté ça… ou sinon il y a ça ». Dans un magasin de la dite vous êtes un sinistre inconnu. Votre carte de fidélité sert à enregistrer votre transaction, pas à vous reconnaitre proactivement. Grand paradoxe que celui auquel nous sommes arrivés : le client connait mieux le produit que le vendeur et le vendeur connait moins bien le client que le site en ligne. Non seulement le vendeur n’est pas équipé pour la connaissance et la relation client, mais on lui interdit le plus souvent d’utiliser son propre smartphone pour aller chercher des informations avancées et des commentaires sur un produit pour renforcer sa valeur conseil. Le monde à l’envers.

A l’inverse, prenons une entreprise comme Codelco. Vous ne connaissez surement pas Codelco, mais c’est quand même un des plus gros exploitants de mines de cuivre au monde si ça n’est le plus gros. Eux sont partis de la vision d’une mine digitalisée et ce pour deux raisons : l’efficacité des opérations et la santé et la sécurité des employés qui ne devaient plus avoir à opérer dans un milieu à risque. Analyse des données d’un côté et recours à des machines « intelligentes et autonomes » de l’autre ont donc été aux programmes. Le digital y a transformé les process, les opérations, la prise de décision et in fine le rôle et la mission des hommes de terrain. Idem chez UPS ou la « face cachée du digital », comprenez objets connectés, capteurs et données a complètement révolutionné les opérations.

D’autres se demandent à quoi pourrait ressembler le « chariot connecté » pour la femme de ménage dans un hôtel, par exemple. Optimisation de son temps par rapport aux chambres qui sont ou non libérées par le client, rappel des préférences client (oreillers supplémentaires, etc.)

J’entendais dernièrement un salarié d’une entreprise me dire « on a lancé une grande opération de crowdsourcing d’initiatives digitales…on attendait beaucoup de choses du marketing, de la communication, des ventes… et ce sont les gens des usines et les magasiniers qui sont arrivés avec le plus d’idées. Mais ça n’est du tout ce que nous voulions faire… ». Bizarrement ne j’ai pas été surpris le moins du monde.

Il faut penser le digital par l’expérience employé

Si vous demandez à une entreprise quelle est sa ligne directrice dans le digital elle vous dira le plus souvent « l’expérience client ». Si vous lui demandez ce qu’elle entend par là elle dira souvent « simplifier et rendre agréable le parcours client au travers de différentes tactiques pour vendre davantage ». Autrement dit, rentabiliser le temps du client et augmenter sa satisfaction.

L’expérience employé c’est la même chose de l’autre côté de la barrière. Rendre le temps de l’employé plus productif et augmenter sa satisfaction au travail. Et plus on se rapproche du terrain, du client ou de l’exploitation, plus on a de bénéfices opérationnels directs et concrets. A condition d’associer non pas seulement la direction, le management voire le middle management au projet de transformation, mais également le terrain.

J’irais même plus loin en disant que lorsqu’on pose le sujet de la transformation digitale en haut de l’entreprise on se perd souvent en conjectures conceptuelles, philosophiques et parfois politiques qui sont autant de freins. Posez la question de l’amélioration et la simplification du travail par le digital sur le terrain vous aurez souvent beaucoup plus d’entrain.

bertrand-duperrinBertrand Duperrin est Digital Transformation Practice Leader chez Emakina. Il a été précédemment directeur conseil chez Nextmodernity, un cabinet dans le domaine de la transformation des entreprises et du management au travers du social business et de l’utilisation des technologies sociales.

Il traite régulièrement de l’actualité social media sur son blog.

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2 commentaires

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