
Apple, le lobbying discret mais méthodique de Cupertino à Bruxelles
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En matière de lobbying, la firme de Cupertino ne ménage pas sa peine et consacre chaque année entre 7 et 8 millions d’euros à ses activités d’influence auprès des institutions européennes. Particulièrement active cette année, Apple a tenu 32 réunions avec la Commission et ses cabinets, rien que de janvier à juillet, illustrant une intensité rare autour de l’IA, des paiements et de la publicité en ligne. Pour ce faire, Apple mobilise 30 personnes, épaulées par des cabinets comme Flint Europe, APCO Worldwide, Acumen Public Affairs, Fourtold ou Freshfields. Toutefois cette présence soutenue s’inscrit dans une stratégie d’influence discrète, marque de fabrique d’Apple.
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Une présence aussi forte que discrète
Dix de ses vingt-neuf lobbyistes déclarés disposent d’un badge d’accès au Parlement européen. Le reste de l’influence s’appuie largement sur des tiers de confiance (Flint, APCO, etc.) et la majorité des interventions vise des dossiers à fort impact réglementaire pour ses produits, le plus souvent avec une logique défensive.
Une couverture réglementaire exhaustive
Apple est actif sur l’ensemble des grands textes de l’agenda numérique et environnemental européen (DMA, DSA, AI Act, Cyber Resilience Act, eID, FiDA; écoconception, Green Claims, batteries, emballages; CSAM/e-evidence; App Store/SEPs/data portability).
En 2025, trois fronts dominent:
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IA et compétitivité: échanges sur ‘Apple Intelligence’ et le Code of Practice pour les IA à usage général (18 mars, Bruxelles), préparation et tenue d’une séquence avec la nouvelle EVP Henna Virkkunen (mars→mai) puis rencontre à San Francisco (14 mai).
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Paiements: discussion avec FISMA sur PSR/D3 (22 juillet)
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Publicité et données: participation aux ateliers du Code of Conduct on Online Advertising (4, 6, 13 et 19 mars.
S’ajoutent des dossiers environnementaux (écodesign/étiquetage énergie des smartphones et tablettes, 14 mars) et sociétaux (protection des mineurs en ligne, 11 mars; accessibilité, 11 juin).
Des récits alignés sur les priorités européennes
Le cadrage d’Apple épouse les priorités de la Commission:
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Accessibilité: mise en avant des engagements et de la conformité aux cadres européens (réunion dédiée le 11 juin).
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Confidentialité: narrative ‘privacy-by-design’ et chiffrement par défaut.
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Transition verte: neutralité carbone, écoconception, circularité (séquences récurrentes depuis 2019; suivi en 2025 via écodesign).
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IA ‘personnelle, privée, embarquée’: positionnement qui se distingue des modèles cloud-first.
L’Europe est pour Apple un terrain de test réglementaire
Ainsi Bruxelles demeure un laboratoire de conformité, c’est là qu’Apple a dû ouvrir iOS aux app stores tiers sous le DMA, et que se dessinent les limites d’usage d’Apple Intelligence dans des marchés régulés. C’est aussi en Europe que se négocient des obligations environnementales susceptibles d’être répliquées aux États-Unis. Face à quoi, l’entreprise transforme la contrainte en levier et n’hésite pas à intègrer les règles européennes pour en faire, de facto, des standards globaux, tout en restant très ferme sur ses fondamentaux, notamment l’accès aux données de ses clients, sujet sur lequel de nombreux gouvernements se sont vu opposer une fin de non recevoir.