BusinessLes métiers du net

[Femme de la Tech] Thu Trinh-Bouvier, responsable nouveaux médias chez Vivendi

A l’occasion de la Journée de la Femme digitale jeudi 9 mars, FrenchWeb vous propose de découvrir des femmes de la Tech au parcours original, tout au long de la semaine.

 

FrenchWeb: Quelles sont les activités que vous exercez dans le domaine du digital?

Thu Trinh-Bouvier, responsable nouveaux médias chez Vivendi: Je conçois et je mets en place les stratégies de communication digitale – avec sur certains projets, une problématique e-marketing – de différentes entités de Vivendi. En parallèle, je mène des études, sous un angle sociologique, sur les nouveaux modes de communication via l'image (d’où mon livre sur le nouveau langage de l'image: le Pic Speech). Je fais également partie d'un collectif d'artistes numériques (WeLoveTheNet). Ensemble, nous explorons les objets connectés. Certaines de nos installations proposent également une illustration de la communication cerveau/objet comme cela était le cas dans cadre de Futur en Seine 2016 car c’est le domaine de recherche de prédilection de l’un des membres du collectif.

Avez-vous toujours voulu exercer dans le secteur du numérique? Pourquoi?

T T-B: Je ne me suis jamais projetée dans le domaine du digital car au moment où je faisais mes études, il n’y avait pas ce type de formation.

Mes parents, professeur de sociologie et médecin, avaient une vision assez classique des études supérieures et ils n’ont jamais eu un intérêt particulier pour l’univers des nouvelles technologies. Plus jeune, je n’aurais jamais imaginé que l’avenir me proposerait un terrain de jeu et d’exploration aussi infini.

Le digital, je l’ai saisi comme une véritable opportunité et la rencontre avec ce domaine a été un vrai choc émotionnel et affectif!

Je travaillais dans le domaine de la photographie et un service numérique se montait. J’ai immédiatement eu envie de l’intégrer. C’était l’époque des premiers sites Web et intranet! Ce changement d’orientation a été vraiment la rencontre d’un secteur qui me correspondait parfaitement.

Soudain, j’ai rencontré un domaine tellement vaste dans lequel je me suis immédiatement sentie à l’aise. J’aime le fait qu’il rassemble beaucoup de compétences et qu’il nécessite une forte polyvalence dans un secteur toujours en évolution. J’ai senti que j’avais une facilité d’apprentissage dans ce domaine où se mélangent compétences techniques, éditoriales, graphiques et qui requiert agilité et réactivité. Travailler dans ce secteur, c’est être dans l’apprentissage en permanence. En même temps, mon antériorité dans ce secteur, me permet de me poser, je l’éspère, «les bonnes questions» sur les nouveautés technologiques et d’usages. Quels sont les «vrais» changements qu’il ne faut pas manquer en termes d’outils et de services et ceux qu’il faut observer afin de voir à quel moment ils arriveront à un bon niveau de maturité ou pas d’ailleurs? Car je ne suis pas devin! Nous sommes parfois surpris par le devenir des solutions que tout le monde pensait révolutionnaires et qui ne sont en fait que des feux de paille.

Je considère comme une véritable chance le fait de vivre cette révolution technologique et d’y participer à ma petite échelle à travers mes différentes activités.

Incontestablement, le digital impacte fortement ma vie : il nourrit ma curiosité, il me permet de m’interroger sur le monde que nous construisons.

Quelle est votre formation?

T T-B: J’ai plutôt une formation littéraire à l’origine: les classes prépa littéraires, option philo puis maîtrise de sociologie. J’ai un Post-diplôme AII -atelier image informatique– de l’ENSAD (École Nationale des Arts de Déco de Paris) et un Executive master communication à Sciences Po Paris. Il y a aussi une dimension autodidacte assez forte dans mon parcours. Pour ne citer qu’un exemple, le logiciel Flash très utilisé à un moment donné par les webdesigners (remplacé maintenant par le html5), je l’ai appris seule au travers d'un projet personnel réalisé pendant mes vacances car au début de l’avènement de ce programme, les formations n’existaient pas. Dans ces métiers, il faut souvent aimer apprendre seule avant que les formations officielles se formalisent.

Mère à mon tour, je valorise l’étude des nouvelles technologies auprès de mes enfants. Je crois qu’il y a encore aujourd’hui une méconnaissance de ces études et de l’incroyable palette des métiers qu’elles offrent. Je suis contente que ma fille ainée ait choisi cette orientation. D’ailleurs, je regrette qu’il y ait si peu de filles dans ces écoles. Dans la classe de ma fille, il n’y a que 10 filles sur 30 garçons alors que c’est un secteur tellement porteur et qui embauche.

J’aimerai vraiment qu’une fille propose un service ou un outil qui façonne le monde de demain comme peut l’être Facebook, Google, Amazon pour ne citer que ces 3 mastodontes de l’univers digital qui impactent nos vies au quotidien.

Quelle «Femme de la Tech» êtes-vous ?

T T-B: J’ai un véritable rapport ludique avec les nouvelles technos et les outils numériques. Et c’est un domaine tellement vaste que je ne fais que suivre mes appétences personnelles. Car tout ne m’intéresse pas et tout ne me touche pas dans la techno. Je suis mon instinct. Je me dirige naturellement vers le domaine de la communication, de l’art digital. C’est en suivant ces axes que je fais de belles rencontres humaines qui me permettent d’aller plus loin dans l’exploration du digital. WeLoveTheNet est avant tout une aventure humaine, des valeurs partagées qui nous donnent envie et l’énergie de créer et de réaliser des projets ensemble.

Il n’en reste pas moins que je trouve les périodes pendant lesquelles je n’arrive pas à me déconnecter un peu pathétiques. Le simple fait d’être parfois avec les êtres chers et d’avoir la tête continuellement dans mon smartphone est assez révélateur de mon niveau de dépendance à ces outils et services!

Mais en même temps, j’adore aussi observer ce que ces outils font de nous et ce que nous faisons avec.

Il me semble que le rapport au digital est le miroir de notre rapport au monde. Comme je suis quelqu’un de foncièrement optimiste, j’ai tendance à voir davantage les bons aspects de la technologie. Je vois toujours dans la technologie un espace de liberté où le monde des possibles s’ouvre en permanence –malgré le poids des GAFA et le concept de surveillance généralisée- avec des vagues d’avancées fulgurantes et des plages de stagnation. Dans ces moments de pause, c’est comme si le corps social avait besoin de temps pour digérer ces bouleversements survenus avant l’arrivée d’une nouvelle révolution.

Actuellement, je constate également qu’il y a une injonction à la créativité, à l’innovation, au mouvement permanent et une pression exercée dans le domaine professionnel et privé pour s’y adapter. Les bouleversements n’amusent pas tout le monde et je sais que nous ne sommes pas tous armés pour les affronter. De ce fait, il est important de démystifier la technologie. Pour moi, elle est là avant tout pour aider les hommes, faciliter leur quotidien. Il faut donc respecter les différents rythmes d’appropriation de chaque individu face aux nouveaux outils.

C’est une époque de marche forcée vers l’innovation qui peut être perçue comme violente pour ceux qui la subissent. En même temps, c’est une ouverture incroyable pour tous ceux qui souhaitent prendre le train en marche.

Aujourd’hui on ne sait pas quels métiers occuperont nos enfants. De nouveaux profils et de nouveaux métiers apparaissent que les entreprises ont souvent du mal à intégrer. Car elles aussi doivent se réinventer, en terme d’organisation, pour apporter des réponses adaptées aux attentes des nouvelles générations notamment. 

Nous vivons tous, à des degrés différents, ce tiraillement entre le plaisir et l’émerveillement que nous apportent les nouvelles techno et l’appréhension de ne plus maîtriser et comprendre le monde qui nous entoure.

Qui sont vos modèles? 

T T-B: Ceux qui arrivent à ne pas rentrer dans des cases et à tracer leur route. Je ne pense pas avoir de modèle même si je suis admirative de certains parcours de vies.

En fait, je suis très touchée par la combativité de certaines personnes face à des situations complexes auxquelles elles sont confrontées. J’aime beaucoup écouter les gens et découvrir leurs différentes facettes, faites nécessairement de forces et de faiblesses. Je n’ai pas de modèle mais je me considère comme particulièrement chanceuse de rencontrer et de côtoyer des personnes, dont j’apprécie la sensibilité et la manière de trouver leur place dans la société.

Je suis souvent beaucoup plus inspirée et émue par des personnes de mon entourage ou des rencontres fortuites que par des figures emblématiques d'héroïnes et d'héros connus qui me semblent toujours un peu fabriquées pour répondre à nos besoins d’idéalisation.

Quels sont vos projets à moyen et long terme?

T T-B: Je souhaite continuer à développer des dispositifs de communication et de marketing digital sur des problématiques très variées comme je le fais dans le cadre de Vivendi.

Je continue à développer des projets digitaux artistiques et autres avec les membres du collectif WeLoveTheNet. C’est très rafraîchissant et stimulant d’interroger le monde qui nous entoure à travers un angle humoristique, décalé et poétique. C’est une démarche de mise à distance salutaire dans l’univers digitalisé dans lequel nous baignons. Nous avons des projets en commun en préparation que nous pourrons partager dès qu’ils seront davantage formalisés.

Je poursuis mon observation des mutations petites et grandes dans le domaine de la communication digitale et je travaille sur une deuxième étude.

 

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