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Le «virus» Uber passé au crible par Fabernovel

Créée en 2009, Uber est aujourd’hui la start-up la mieux valorisée au monde avec 68 milliards de dollars de valorisation. C’est 1,5 fois plus que le constructeur General Motors, qui a quant à lui été créé en 1908, selon l’étude annuelle «Uber, the transportation virus», réalisée par Fabernovel et publiée ce mardi 12 juillet. L'an passé, l'agence digitale s'était intéressée aux quatre grands types de stratégies mises en oeuvre par les GAFA. 


Au-delà de sa valorisation spectaculaire, c’est la vitesse à laquelle elle s’est développée qui interpelle les experts de l'étude. Il aura en effet fallu à peine plus de deux ans à Uber pour devenir une licorne (société valorisée plus d’un milliard de dollars, ndlr), alors que Facebook, pourtant considérée comme un modèle de croissance exponentielle, aura mis cinq ans pour atteindre ce niveau de valorisation.

Comment la société a-t-elle réussi à atteindre ces niveaux de performances en quelques années?

Les auteurs ont schématisé le modèle de développement d’Uber, qu’ils décrivent comme similaire au développement d’un virus, qui se réplique par lui-même et se développe très rapidement.

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1. Le point de départ: un «triangle d'incompatibilité» made in France

L’histoire derrière la création d’Uber est bien connue: venus à Paris assister à la conférence LeWeb en 2008, les deux cofondateurs d’Uber ont été frappés par le fonctionnement des services de taxis parisiens. Les deux entrepreneurs ont mis le doigt sur ce que Fabernovel appelle un «triangle d’incompatibilité»: s'il était possible de se déplacer à Paris grâce à un taxi, il n'était pas possible d'avoir à la fois un prix compétitif, un service fiable, et une bonne expérience en tant qu'utilisateurs. Les deux entrepreneurs ont donc recréé l'expérience de la réservation d'un taxi sur une application mobile, grâce à laquelle ils ont pu améliorer l'ensemble de l'expérience. 

Premier point différenciant de l'offre imaginée par les deux associés: la société de transport n'a pas choisi de se constituer une flotte de véhicules en propre. Partant du constat qu'aux Etats-Unis, un véhicule ne circule pas 96% du temps, Uber a en effet décidé de permettre aux chauffeurs d'utiliser leurs propres voitures. 

Autre élément structurant de l'offre d'Uber, le système de notations des chauffeurs qui a été mis en place, permettant ainsi de créer un lien de confiance entre les utilisateurs et les chauffeurs, condition sine qua non pour accepter de monter en voiture avec un inconnu. 

En automatisant un maximum d'étapes du processus de réservation d'un taxi, la société a également réussi à construire un modèle qui lui permet de se développer à un coût marginal nul une fois sa masse critique d'utilisateurs atteinte. 

Enfin, le traitement des données en temps réel permis par l'application est un véritable atout pour garantir un bon niveau de service, et surtout adapter la tarification en temps réel en fonction de la demande. La force d'Uber est donc d'avoir réussi à construire un réseau de chauffeurs et d'utilisateurs, connectés les uns aux autres en temps réel. Le principe même d'un réseau étant de prendre de la valeur à mesure qu'il grossit, plus il y a d'utilisateurs et de chauffeurs inscrits sur la plateforme, plus le service Uber devient efficace. 

2. Pour s'imposer, il faut atteindre un grand volume de transactions 

Une fois son offre standard définie et testée à petite échelle, Uber a commencé à se développer. Sur ces marchés sur lesquels se développent les GAFA, ainsi que des sociétés comme Uber, l'enjeu n'est en effet pas d'être le premier à se lancer, mais d'être le premier à avoir suffisamment de «liquidités», c'est-à-dire à traiter un grand volume de transactions. 

Si son offre est par nature facile à répliquer, Uber a ainsi malgré tout opté pour un développement par étape, recréant des réseaux locaux de chauffeurs et d'utilisateurs dans chacune des villes dans lesquelles son service est proposé. Uber s'appuie ainsi sur des business developpers recrutés localement et qui ont pour mission d'«ouvrir» une ville en moins de huit semaines. 

Au-delà de sa stratégie commerciale, la société n'a pas hésité à massivement investir pour couvrir ses coûts de fonctionnement, très élevés au démarrage, au détriment de sa propre rentabilité. Pour les trois premiers trimestre de l'année 2015, la société affichait en effet des pertes d’un montant de 1,7 milliard de dollars, comme le rappellent les auteurs de l’étude.  

Enfin, pour s'assurer d'être la première entreprise à atteindre cette liquidité tant recherchée par l’ensemble des acteurs du marché, Uber a choisi de donner la priorité au recrutement de ses chauffeurs. Elle a ainsi mis en place un certain nombre d'incitations financières pour attirer ces derniers: des primes pour les chauffeurs qui délaissent d’autres plateformes au profit d’Uber, un revenu horaire garanti dans les nouvelles villes couvertes par le service, ou encore des partenariats négociés avec des revendeurs d’automobiles pour permettre aux chauffeurs de bénéficier de tarifs avantageux. Une fois son réseau de chauffeurs construit, Uber fait la promotion de son service auprès de sa communauté d'early adopters, comptant sur eux pour convaincre d'autres catégories d'utilisateurs. 

3. Créer de la viralité grâce à ses utilisateurs

Dans un modèle comme celui d'Uber, ce sont les utilisateurs qui sont les premiers ambassadeurs de la marque, qu’il s’agisse des chauffeurs ou encore des utilisateurs. Fidèle à sa stratégie qui met l'accent sur la communauté des chauffeurs, la société a ainsi mis en place un système de parrainage leur permettant d’augmenter leurs revenus s’ils amènent de nouveaux chauffeurs à la plateforme. De plus, l’interface développée par Uber est la même, quelle que soit la ville considérée. 20% des chauffeurs Uber ont ainsi déjà proposé des courses dans une autre ville que leur ville d’origine.

La société a également profité de la viralité des réseaux sociaux pour faire parler d'elle à moindres frais. Les offres additionnelles qu'elle a successivement testées sont autant d’histoires à raconter à ses utilisateurs, que ces derniers peuvent partager et commenter (à l’image de sa campagne Uber Ice Cream testée en 2014 et relancée cette année, qui propose de se faire livrer une glace à domicile gratuitement, et en quelques minutes). 

Enfin, partant du principe que ses futurs utilisateurs étaient vraisemblablement clients d’autres services numériques, la société a ouvert un ensemble d’API permettant d’intégrer ses services à d’autres applications, comme Trip Advisor ou encore Startbucks.

4. Une culture de la mutation permanente

Fidèle à son ADN de start-up agile, Uber a fait évoluer sa mission d’entreprise (et donc son modèle de revenus) trois fois depuis sa création, tout en conservant sa raison d'être: proposer une alternative au fait de posséder son propre véhicule. Les lancements de nouveaux services tels que UberEATS (service de livraison de repas) ou encore UberPOOL (qui permet de partager une course avec un autre utilisateur) en sont autant d’exemples.

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Et la société n’a pas fini de faire évoluer son modèle, comme en témoigne le lancement de son offre Uber Top Experiences qui, en permettant à ses utilisateurs d’utiliser leurs applications favorites pendant leur course Uber, fait de la société un nouveau media. Son ambition à terme est de transporter ses utilisateurs au sein de véhicules autonomes. 

5. Un virus qui se défend des corps étrangers

La croissance exceptionnelle qu'a connu Uber depuis sa création ne laisse pas indifférent, et de nombreuses voix s'élèvent pour critiquer son modèle de développement. Pour continuer à croître de cette manière, la société doit ainsi face à un certain nombre de menaces.

Première menace qui vient spontanément à l'esprit, et certainement la plus critique pour la société: gérer la pression des gouvernements qui cherchent à protéger leurs réseaux de taxis. Uber y répond de différentes manières suivant les villes (adaptant son offre, s’engageant à y implanter un siège social, ou tout simplement renonçant à s'y implanter). Face aux résistances des gouvernements, la meilleure carte à jouer pour la firme est de convertir ses utilisateurs en défenseurs d'une cause: le droit à l'initiative individuelle. 

La seconde menace qui touche la plateforme concerne sa capacité à  préserver sa communauté de chauffeurs, et à prendre en compte leurs revendications (notamment en termes de maintien de leur niveau de rémunération). 

Enfin, le marché étant aujourd'hui «évangélisé», Uber doit désormais faire face à une concurrence accrue. D'autres entreprises se lancent sur ce créneau du transport, développant des offres de services complémentaires à celles d'Uber (à l’image de Caltrain par exemple), ou bien en concurrence directe (comme chauffeur-privé en France). D’autres acteurs ont fait le pari de s’associer à Uber, pour coupler leurs forces (Fiat Chrysler travaillerait par exemple avec Uber sur un projet de voiture autonome).

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La question reste de savoir quelle stratégie de développement va adopter Uber à l’avenir: une stratégie similaire à celle d’Apple, centrée sur le développement d'OS pour les voitures autonomes, ou bien une stratégie proche de celle de Google, centrée sur le développement d'un OS pour les voitures autonomes mis à disposition des constructeurs de voitures autonomes?

 

  • 1 million de chauffeurs Uber dans le monde
  • 1 milliard de courses réalisées depuis 2010
  • Chaque jour, les chauffeurs Uber parcourent en distance l'équivalent de 80 voyages jusqu'à la Lune
  • Uber est présent dans 470 villes, et dans 70 pays différents. 
  • La société a levé 14 milliards de dollars depuis sa création; elle a bouclé 16 tours de financement différents. 


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