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Doit-on taxer Google en France?

La balance commerciale de la France sur le marche « internet » est une catastrophe

Bonne nouvelle, le gouvernement a pris conscience du déséquilibre incroyable qui existe sur le marché de l’internet français! Pour prendre les repères généralement utilisés dans l’économie traditionnelle, la balance commerciale de la France, qui établit le rapport entre l’importation et l’exportation, est celle d’un pays sans ressource. Nous importons presque toutes les technologies et services qui sont utilisés sur Internet d’aujourd’hui.

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Mais lorsqu’il s’agit d’Internet, on peut difficilement évaluer l’importation dans la mesure où tout est immatériel. De ce fait, il est impossible de connaitre la valeur de ce qui rentre, et le prix qui est payé pour ces services et ces contenus. D’autant qu’ils sont en grande partie financés indirectement par de la publicité.

Dans ce domaine, un problème se pose aujourd’hui en France: jusqu’à présent les entreprises qui voulaient faire connaitre leurs services ou produits auprès des français dépensaient de l’argent sur des supports eux aussi français (télé, radio, presse, affichage). Avec Internet, le gros des budgets part sur des supports/plateformes étrangers comme Google, Yahoo, Microsoft, Facebook etc… tout simplement parce que leurs services sont massivement adoptés par les français. Or les bénéfices de ces sociétés sont taxés hors de France, et la création d’emplois ne se fait pas ici non plus. De cette mutation dans les usages, il résulte une perte de parts de marché pour l’écosystème des sociétés françaises et une perte de revenus pour l’état. Voilà ce dont le gouvernement se rend compte aujourd’hui. Mieux vaut tard que jamais!

Cyniquement, je dirai qu’on se retrouve un peu dans la situation de certains pays autrefois colonisés, qui ne captaient qu’une très faible partie de la valeur des ressources qui était (ou sont encore!) exploitées par des étrangers sur leur territoire (travail et matière premières).

La comparaison fonctionne bien lorsqu’on regarde ce qui se passe sur le marché de l’énergie. Avec Internet, c’est la France qui est dans la situation de faiblesse et de dépendance.

Ce déséquilibre va continuer à s’accentuer

Mais ce n’est pas tout. La question de la délocalisation du marché de la publicité n’est qu’une petite partie de ce que l’avenir réserve. Les applications, les contenus et les jeux vendus directement sur des plateformes comme l’iPhone, la Xbox, la Wii, sont payés depuis la France à des entreprises établies à l’étranger. Ces marchés vont vite représenter des sommes bien plus importantes que la pub.

Apple, qui est à peu près le seul à avoir réussi à créer une place de marché pour les contenus à destination des français, opère bien entendu depuis l’étranger. Savez vous combien de personnes travaillent pour Apple sur iTunes en France? A ma connaissance une seule. Sur cette activité de vente, la France ne touche quasiment rien.

Nos lois confortent malheureusement les industries en perte de vitesse dans leur immobilisme

Dans son coin, Hadopi semble donner un peu de temps au cinéma français. Inutile de travailler sur le problème de la VOD, puisque le cinéma sera sauvé par cette loi! Les « pirates » (qui sont aussi les plus fidèles consommateurs) n’ont qu’à bien se tenir! Malheureusement, la seule conséquence pour la France sera de subir le marché dans qq mois ou années avec des offres de VOD impeccables qui viendront de sociétés étrangères. Je suis prêt à prendre les paris: le futur montrera qu’Hadopi aura été le frein à l’innovation qui aura définitivement mis la France hors de la competition sur les sujets du cinéma et de la musique. D’autres s’en occuperont bien mieux que nous.

Je rappelle qu’aucune offre de VOD digne de ce nom n’existe en France! Les possesseurs de Mac en savent qq chose puisqu’il est tout simplement impossible d’acheter un film Français avec un Mac.

La musique, le cinéma, les jeux, les logiciels… voilà autant de sujets qui vont provoquer une fuite de valeur importante vers l’étranger, faute d’avoir construit des vraies places de marché en France.

Taxer serait déplacé et n’est techniquement pas possible

La réponse proposée par le gouvernement à ces deux problèmes est simple: il faut taxer les entreprises étrangères pour financer nos artistes. La tendance des recettes et dépenses de l’état explique très clairement la motivation à vouloir faire rentrer de l’argent à court terme. Mais ce réflexe protectionniste est bien trop primaire… et parfaitement déplacé. Pourquoi veut on taxer ces sociétés? Car Internet aurait détruit de bons modèles au détriment des artistes? En réalité, ce sont les modèles de revenus de l’industrie de la culture qui sont dépassés sur Internet. Cette industrie a pris l’habitude de vendre des supports et pas des contenus. Maintenant que les supports disparaissent, elle ne sait plus quoi vendre. Les artistes n’ont rien à voir la dedans! D’ailleurs eux sont bien contents que les cartes soient redistribuées. Ils ne touchaient de toutes façons plus grand chose dans cette chaine de valeur.

Comment peut on vouloir financer les artistes sur le dos de Google comme on a essayé de le faire avec la redevance pour la copie privée?? Ces sujets n’ont aucun rapport.

Bref, la solution qui pointe son nez, c’est à dire la taxation des revenus publicitaires, est sans issue pour 3 raisons:

  • Il est impossible de tracer l’ensemble des revenus pub réalisés « sur » le territoire (quid d’Apple qui paie Google pour faire connaitre un nouveau produit auprès des Français? Qui va pouvoir tracer ce mouvement d’argent?).
  • Il y aura toujours des parades pour requalifier ce que l’on appel aujourd’hui « pub » en d’autres services.
  • Aucune société ne choisira la France pour y développer des activités internationnales, de peur d’être taxée à nouveau.

La question est bien entendu ailleurs

Ce n’est pas sur une machine à gaz fiscale sur laquelle il faut travailler, mais sur les questions essentielles:

  • Pourquoi un projet comme Quaero est un bide?
  • Pourquoi les entreprises du web réussissent mieux en Californie qu’en France?
  • N’y a-t-il pas un problème de monopole de Google au niveau de l’Europe et certainement pas au niveau de la France?
  • Pourquoi les médias français préfèrent parler en permanence depuis un an de Twitter qui n’a jamais séduit le grand public en france, plutôt que des start-up françaises qui ont une vraie proposition de valeur et qui ont besoin d’un support médiatique?

La seule solution est de jouer un rôle actif dans cette industrie mondiale. Donc de pousser les entreprises et les formations dans ce sens.

Le réflexe de la taxe serait un aveu d’impuissance, une façon de dire: comme on y peut rien, on installe un péage. C’est un très mauvais choix pour l’avenir. Remarquez, on a bien financé des retraites en taxant les automobilistes

Frederic Montagnon, co fondateur de Nomao, le moteur de recherche géolocalisé qui classe les résultats en fonction de ce que vous aimez. Mon blog: http://www.frederic-montagnon.com

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Un commentaire

  1. Bonjour! Article très intéressant, merci (comme beaucoup de tous vos articles, d’ailleurs)! Ce que je voudrais savoir, c’est quelle est la part de la publicité « online » par rapport à la publicité « offline » en général? Si vous avez la réponse, merci beaucoup pour votre aide!

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