
Pourquoi les marques sous-estiment encore la puissance des marketplaces
Les marketplaces ne sont plus un canal parmi d’autres. Pourtant, de nombreuses marques les relèguent encore à un rôle périphérique, voire les évitent, par crainte de cannibalisation, de dilution de marque ou de guerre de prix. Une erreur stratégique majeure, à l’heure où Amazon, Walmart, Shein ou TikTok Shop redéfinissent les règles du jeu.
Un canal devenu stratégique
Le marketplace n’est pas un simple canal de distribution. C’est une plateforme intégrée de croissance, combinant :
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- acquisition client massive (via le search, le retail media, les badges de confiance) ;
- infrastructure logistique éprouvée (FBA, Fulfilled by Walmart, etc.) ;
- accès instantané à des marchés internationaux ;
- retour terrain immédiat via les données de recherche, conversion et avis produits.
Une donnée souvent ignorée : plus de 70 % des recherches sur Amazon sont non-marquées. Les consommateurs ne cherchent pas une marque, mais une solution. Ce biais structurel donne un avantage décisif aux produits les mieux positionnés en visibilité et en conversion. Une marque absente de ces résultats laisse mécaniquement sa place à un concurrent mieux optimisé.
L’illusion de la cannibalisation
La question du moment : le marketplace est-il accréditif ou cannibalise-t-il les ventes DTC ? Oui, il y a déplacement de canal. Mais le marché total s’élargit. L’argument est simple : un client situé hors des zones urbaines n’a pas accès à une boutique physique. Le marketplace lui donne accès à la marque. La visibilité devient géographique, non plus promotionnelle.
Autre point souvent sous-estimé : les ventes sur Amazon stimulent les recherches Google, et réciproquement. Ignorer Amazon revient à créer une zone aveugle dans le parcours d’achat.
Une architecture logistique taillée pour la vitesse
Contrairement au modèle traditionnel du retail, fondé sur des prévisions de commandes et des PO (purchase orders), le marketplace fonctionne en demande temps réel. Cela impose une adaptation logistique profonde : cycles courts, gestion des stocks plus dynamique, adaptation permanente du pricing.
Des acteurs comme Zara ou Shein ont justement bâti leur dominance en maîtrisant cette logique. Le marketplace n’est pas qu’un canal de vente : c’est une méthode de production-distribution, pilotée par la donnée.
Le piège de l’organisation en silo
Chez beaucoup de marques, les équipes marketplace et DTC ne collaborent pas. Elles poursuivent des objectifs différents, parfois concurrents. Résultat : absence de stratégie unifiée, vision client fragmentée, messages dissonants.
Une approche intégrée suppose de penser le marketplace comme un prolongement cohérent du CRM et de la politique de marque, et non comme une entité indépendante ou concurrente.
Retail media et IA : le marketplace devient média
L’essor du retail media, notamment chez Amazon, transforme encore la donne. Avec Amazon DSP, Prime Video, Thursday Night Football et désormais Shop for Brands, Amazon devient un acteur publicitaire de premier plan. Il ne s’agit plus seulement de vendre des produits, mais de capter l’attention, créer de la préférence, monétiser la donnée.
L’introduction de Rufus, assistant IA d’Amazon, marque un tournant supplémentaire : il répond aux questions que les consommateurs se posent sur la fiche produit, et leur propose une expérience personnalisée. La fiche produit devient interface conversationnelle, et la capacité à fournir des réponses claires, rapides et rassurantes devient un avantage compétitif.
Le bon moment, c’est maintenant
« Ce n’est pas trop tard. En réalité, le vrai changement ne fait que commencer. » Le modèle marketplace est en restructuration accélérée, porté par l’IA, les tensions géopolitiques, et les nouveaux usages (TikTok Shop, Instagram Shopping).
Les marques qui entrent maintenant peuvent encore poser les fondations d’une stratégie long terme, sans subir les erreurs passées. Celles qui attendent prennent le risque de devenir invisibles dans le parcours d’achat digital.
Ce qu’il faut retenir
Mythe | Réalité |
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Le marketplace cannibalise les ventes DTC | Il élargit le marché adressable et renforce la présence omnicanale |
C’est un canal comme un autre | C’est un levier logistique, marketing, data, croissance et image |
Il est trop tard pour y entrer | Le changement de paradigme ne fait que commencer |
Il dilue l’image de marque | Il expose la marque aux bons moments dans le parcours d’achat |
C’est juste un point de vente | C’est aussi un média, un moteur publicitaire et une source de feedback |