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L’économie du cloud n’est pas nécessairement compatible avec la vôtre

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Le cloud s’est imposé en dix ans comme un dogme, flexibilité, rapidité, économies d’échelle, mais à mesure que les entreprises atteignent leur maturité, une autre évidence s’impose: l’économie du cloud n’est pas celle de leurs modèles.

Le modèle du cloud : consommation contre amortissement

Le principe du “pay-as-you-go”, payer ce que l’on consomme, séduit les startups en hypercroissance. Il permet d’expérimenter ses projets sans immobiliser de capital, d’ajuster les capacités à la demande et de se concentrer sur le produit, mais ce modèle s’effrite lorsque la croissance ralentit et que la charge devient prévisible. Les coûts variables se transforment alors en charges fixes déguisées, sans la visibilité ni la stabilité d’un amortissement matériel.

37signals, l’éditeur américain de Basecamp et Hey, en a fait l’expérience. Sa facture cloud a culminé à 3,7 millions de dollars par an, avant que l’entreprise ne décider de rapatrier son infrastructure. Depuis, ses coûts sont tombés à un peu plus d’un million de dollars annuels, tout en gagnant en performance. « Nous avons gaspillé plus de dix millions de dollars entre 2018 et 2023 », reconnaît son cofondateur David Heinemeier Hansson.

Un désalignement d’intérêts

L’économie du cloud repose sur la croissance continue de la consommation, ainsi plus les entreprises stockent, transfèrent ou calculent, plus les fournisseurs gagnent. À l’inverse, pour les entreprises qui cherchent à réduire leur coût marginal par utilisateur, à stabiliser leurs dépenses, à capitaliser sur leurs actifs, le modèle du cloud devient paradoxal :

plus une entreprise est efficiente, moins elle profite du cloud.

Les egress fees (frais de sortie de données), les coûts de duplication et de résilience, nécessaires pour garantir la disponibilité sur plusieurs zones. ou les engagements contractuels de long terme, souvent incompris (S3, EC2 reserved instances), transforment la promesse de flexibilité en dépendance contractuelle. Pour des sociétés rentables et stables, la logique du “tout locatif” devient économiquement incohérente.

Le retour du capital productif

Les entreprises matures redécouvrent ainsi les vertus du matériel amorti, du contrôle énergétique et de la performance sur serveurs dédiés. Pour autant, le retour à la propriété ne traduit pas un repli technologique, mais une optimisation rationnelle : mieux vaut posséder ce que l’on maîtrise que louer ce que l’on subit. C’est la logique de Dropbox, de Cloudflare ou de 37signals, des acteurs qui voient désormais leurs infrastructures comme des leviers d’efficacité, et non comme des postes de dépense subis.

Vers un nouveau réalisme technologique

Si le cloud ne disparaît pas, il redevient un outil d’agilité tactique, utile pour expérimenter, déployer ou absorber un pic de charge, et moins un modèle unique. Dans un contexte où la rentabilité redevient centrale, les entreprises peuvent revoir leurs arbitrages : cloud pour la vitesse, propriété pour la stabilité. L’heure est venue de réconcilier la logique du produit avec celle de l’infrastructure, avant que la facture ne parle d’elle-même.

 

 

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