
Intent data, scoring, qualification : enfin un terrain commun entre Sales et Marketing ?
L’alignement entre Sales et Marketing est un serpent de mer des organisations B2B. Objectifs mal synchronisés, temporalités divergentes, définitions floues de la « lead quality » : les tensions sont connues, les remèdes souvent théoriques. Mais une évolution récente change la donne en profondeur : l’exploitation conjointe des signaux comportementaux – ou intent data – ouvre enfin la voie à un alignement réel, fondé sur l’action.
Le marketing n’est plus seul à produire l’amont
Traditionnellement, le marketing générait des leads, que les commerciaux jugeaient trop froids. Le marketing répondait par des volumes, les ventes réclamaient de la chaleur. Le problème n’était pas le canal, mais la fracture dans la lecture du cycle d’achat.
Aujourd’hui, les outils permettent de détecter des comportements à faible bruit mais à forte valeur : navigation répétée sur des pages clés, recherche sur des mots-clés sectoriels, engagement indirect via des partenaires ou comparateurs. Ces signaux, longtemps réservés aux plateformes spécialisées comme Bombora ou 6sense, deviennent accessibles directement depuis les CRM ou les plateformes web.
Le marketing ne fournit plus seulement un nom et un email. Il fournit un contexte, une trajectoire comportementale, un niveau d’intention. Le commercial ne reçoit plus un lead abstrait, mais une situation activable.
Trois piliers pour un terrain commun
Pour que Sales et Marketing convergent autour de l’intent, encore faut-il poser un cadre opérationnel clair. Trois piliers s’imposent :
1. La construction d’un scoring partagé
Un score d’engagement sans score de fit ne vaut rien. Un score de fit sans engagement n’est pas prioritaire. Le modèle le plus efficace croise :
- le niveau d’intention détecté (fréquence, pages consultées, durée),
- le niveau d’adéquation avec la cible stratégique (secteur, taille, techno utilisée).
Ce scoring doit être co-construit entre les équipes, et non imposé par le marketing. Il devient alors une grille de lecture commune, non une source de contentieux.
2. La formalisation des playbooks d’activation
Chaque combinaison “score comportemental x profil client” doit déboucher sur une action prédéfinie :
- Retargeting + contenu si le signal est faible mais le fit élevé.
- Séquence email personnalisée si l’intent est moyen.
- Appel immédiat si l’intent est fort et le compte prioritaire.
Ces playbooks sont des protocoles tactiques partagés : ils évitent les pertes de temps et clarifient les responsabilités.
3. Un suivi unifié des performances
Le reporting ne peut plus être dissocié. Le marketing suit le volume de signaux détectés, les ventes mesurent les conversions et les cycles. La clé est le chaînage des données, de l’intention à la transformation. Cela impose des outils communs, mais surtout une lecture partagée des indicateurs.
Un bénéfice collatéral : le recentrage sur les vrais comptes
L’intérêt de l’intent data n’est pas de multiplier les pistes, mais de réduire le bruit. En croisant les signaux avec le TAM (Total Addressable Market), les équipes identifient les comptes qui bougent réellement. Cela réduit les frictions internes, évite les débats subjectifs sur la “qualité des leads”, et recentre les efforts sur des entreprises concrètes, identifiables, à potentiel immédiat.
Le SalesOps comme chef d’orchestre
Ce nouveau modèle n’est viable que si une fonction transversale pilote les données, les workflows et les arbitrages. Le SalesOps, ou à défaut un tandem Sales-Marketing Ops, devient le garant de la cohérence entre sources de signal, critères de qualification, et temporalité d’activation.
L’alignement, par les faits
L’intent data ne résout pas magiquement les tensions entre Sales et Marketing. Mais elle change le terrain de jeu. Elle permet de passer du lead théorique au signal contextualisé, du volume à la pertinence, du débat à l’action.