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Secondaire, comment la liquidité rebat les cartes du private equity

Le marché secondaire du private equity n’est plus un outil de secours. Il est devenu un mécanisme central de gestion, intégré aux stratégies des GPs et aux contraintes de cash des LPs.

+12 % de taux de rotation moyen. C’est ce qu’observe Lexington Partners sur un marché historiquement illiquide. La revente de parts de fonds ou d’actifs n’est plus marginale : elle s’inscrit désormais dans une logique structurelle de pilotage. Les LPs ne se contentent plus de « buy and hold ». Ils arbitrent, allègent, optimisent. La liquidité devient une variable de gestion, plus seulement un aléa.

Ce changement s’explique en partie par un déséquilibre inédit entre appels de fonds et distributions. Selon Bain & Company, les retours sur NAV (Net Asset Value) ont chuté à 9–12 %, contre 22–24 % dix ans plus tôt. Résultat, les distributions ne couvrent plus les appels et le « net cash flow » devient négatif.

Pour de nombreux LPs, fonds de pension, assureurs, fonds souverains, cela signifie une impasse. Ils doivent soit puiser dans d’autres lignes budgétaires, soit retarder de nouveaux engagements. Soit vendre. Ce déséquilibre alimente mécaniquement l’essor du marché secondaire. La vente de parts devient une variable d’ajustement comptable autant qu’une stratégie de gestion du risque.

Côté GPs, la stratégie évolue aussi. Le nombre moyen de participations en portefeuille a doublé en dix ans. Les sorties classiques (IPO, M&A) ralentissent. Pour rester exposés à leurs meilleurs actifs tout en répondant aux besoins de liquidité des LPs, les gestionnaires montent des vehicules de continuation, vendent en strip, utilisent le NAV lending. Ces outils, naguère réservés aux situations complexes, deviennent des standards.

La frontière entre marché primaire et secondaire s’efface. De nombreux deals secondaires concernent aujourd’hui des actifs sains, des participations premium, parfois même renforcées par les GPs existants. Le marché secondaire n’est plus l’antichambre des opportunités ratées, il devient le prolongement stratégique des fonds, à la fois outil de sortie, de liquidité et de re-underwriting.

Et pour les startups ?

Ce changement de paradigme a des effets en cascade. Moins de liquidité en amont = plus de sélectivité à l’entrée.

Dans les phases early-stage, la raréfaction des distributions pèse sur les tickets Seed et Serie A. Les GPs réduisent leur rythme d’investissement, priorisent les modèles rentables plus rapidement, et resserrent leurs critères. L’argent est plus lent, plus cher, plus exigeant.

Dans les phases de scale, les levées deviennent plus composites. De nouveaux entrants (fonds secondaires, co-investisseurs, SPVs) prennent des parts dans des deals structurés. Certaines startups voient leur capital bouger sans avoir levé officiellement. D’autres participent à des processus de liquidité partielle pour les fondateurs ou salariés clés.

Enfin, pour les startups matures, les sorties sont repoussées. Mais cela ouvre aussi la porte à de nouvelles formes de financement. Les single-asset continuation vehicles permettent de refinancer une pépite, tout en assurant un alignement stratégique avec les anciens investisseurs. Ces montages apportent du cash et de la visibilité, au prix d’une gouvernance parfois plus complexe.

 

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