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Dans les coulisses de l’aventure Afrostream

Par Tonjé Bakang, fondateur et CEO d'Afrostream

Cher(e)s abonné(e)s, partenaires, entrepreneurs et amis,

Le 13 septembre 2017, deux ans quasiment jour pour jour après le lancement du service de vidéo à la demande Afrostream, nous arrêtons la commercialisation des abonnements. Le service ferme définitivement en France, Royaume-Uni Belgique, Luxembourg, Suisse et dans 24 pays africains dont le Bénin, le Burkina Faso, le Cameroun, le Congo, le Gabon, la Guinée-Bissau, le Sénégal ou encore le Togo. Merci aux milliers d’abonnés qui nous ont fait confiance et aux centaines de milliers de fans qui nous ont suivis sur les réseaux sociaux.

 

L’entrepreneuriat est un jeu de coup par coup, il suffit d’en rater un pour que tout s’arrête.

 

C’est la fin d’une aventure entrepreneuriale formidable débutée en novembre 2013, il y a presque quatre ans. La fermeture d’une entreprise est toujours un choc pour un entrepreneur mais c’est aussi une expérience et des enseignements qui constitueront un capital précieux pour d’autres projets ainsi qu’une réserve de savoir et de «best practices» que je serai ravi de partager avec d’autres entrepreneurs.

 

J’ai mené Afrostream jusqu’ici mais il est possible d’aller encore bien plus loin.

 

Nombreux sont ceux qui vivent l’annonce de cette fermeture avec tristesse. Certains spéculent déjà sur les raisons qui nous ont amenés à cette fin prématurée. Je tiens donc à partager avec vous une première prise de recul sur la naissance, la croissance puis la fermeture d’Afrostream en France.

Un OVNI dans le paysage audiovisuel

Afrostream est né d’un constat simple, les films et séries africaines, afro-caribéennes et afro-américaines méritent d’avoir une plus large diffusion. Un public en quête de représentation ou de découvertes n’a pas toujours facilement et légalement accès à ces contenus aspirationnels. La solution que nous avons apportée est un service de streaming légal par abonnement proposant plus de 2000 heures de contenu disponible sur les ordinateurs, téléphones, tablettes et depuis l’été 2016 sur les box de plus de 12 millions de foyers en France dans l’offre de Bouygues Telecom et sur la TV d’Orange.

 

Une mission Impossible

Lancer un media digital nécessitant l’acquisition légale de droits de films et séries auprès des grands studios hollywoodiens, des chaines américaines et de plus de 100 producteurs africains semblait être une mission impossible quand on démarre seul un projet. Le fait qu’Afrostream ait pu exister est presque un petit miracle dans l’industrie des médias en Europe et particulièrement en France.

Pour réaliser cette vision, j’ai commencé par m’entourer d’une équipe talentueuse. Une équipe spécialisée dans les medias, dont les membres sont passés par M6, Le groupe Lagardère et Molotov. J’ai été accompagné et formé à l’écosystème des start-up avec TheFamily et leur formation Koudetat et Koudetat fundraising, j’ai bénéficié de la formation à l’entreprenariat du Cantillon et de l’incubateur de start-up Orange Fab.

À l’époque, sur la page Facebook d’Afrostream, les 50 000 fans qui suivaient la genèse du projet imaginaient alors qu’Afrostream était déjà une grosse entreprise aux reins solides alors que nous n’étions que 2 personnes, mon cofondateur et moi-même.

L’enthousiasme des fans sur les réseaux sociaux pour l’arrivée d’Afrostream fut l’un de mes principaux arguments pour convaincre les détenteurs des droits de films et séries de débuter des négociations sur l’achat de licences de diffusion de leur contenu.

Le partenariat avec TF1

Malgré mes ressources personnelles limitées, (j’avais abandonné tout autre activité professionnelle pour me consacrer uniquement à Afrostream) j’investissais massivement sur les réseaux sociaux pour promouvoir le concept auprès de clients potentiels. Cette stratégie a été validée quand l’équipe de TF1 nous a contacté pour créer un partenariat entre MYTF1VOD, leur plateforme de vidéo à la demande et Afrostream qui n’était à l’époque qu’une page Facebook et une page d’accueil sur le Web. Ce partenariat a donné naissance à Afrostream VOD, une sélection de films Afro diffusés pour la première fois via le plus grand media européen.

 

 

Fort d’une nouvelle notoriété générée par cette alliance stratégique et après avoir financé la naissance d’Afrostream sur mes fonds propres il était temps de rencontrer des investisseurs et de lever des fonds.

L’art de la levée de fonds: épisode 1

 

 

Les fondateurs de la structure privée d’accompagnement des start-up en Europe, TheFamilyAlice ZaguryOussama Ammar et Nicolas Colin ont été les premiers supporters de l’écosystème start-up à croire au potentiel d’Afrostream. Grâce à leur programme de formation et d’accompagnement j’ai pu monter le dossier nécessaire pour séduire les VCs. Oussama Ammar m’a mis en relation avec une trentaine de patrons de fonds à Paris et Londres. Malgré des entretiens courtois, aucun de mes interlocuteurs investisseurs ne comprenaient réellement le problème qu’Afrostream tenait à résoudre. À l’époque, ils n’étaient pas non plus convaincus que l’Afrique puisse être un continent d’opportunités pour un media payant. Ce premier road show fut un échec cuisant. Je me suis retrouvé face à un mur qui aurait pu me conduire à jeter l’éponge.

Pourquoi vouloir lever des fonds au lieu de rester indépendant?

Beaucoup d’internautes ne comprennent pas que pour diffuser des films et séries sur un service de vidéo à la demande il faut qu’Afrostream paye des droits. Souvent nos fans considèrent que le contenu est gratuit puisque qu’il se trouve également sur des sites de streaming illégaux qui monétisent leur piratage grâce à la publicité. C’est bien la nature illégale de ces sites Internet qui leur permet d’avoir un large catalogue qu’ils mettent gratuitement à disposition d’internautes.

 

Ok…

 

Pour une offre légale comme la nôtre, nous devions être en mesure de payer entre 1000 euros et 15 000 euros par épisode pour une série et entre 2000 et 50 000 euros pour un film, ceci uniquement pour une année d’exploitation et sur une liste de territoire bien défini. Le montant des droits dépend de plusieurs facteurs; notoriété du programme, notoriété du casting, qualité de la production, disponibilité d’une version française, exclusivité, piratage du programme.).

Sortez vos calculettes

Prenons l’exemple d’une série de 2 saisons de 10 épisodes par saison à 1000 euros l’épisode par an. Pour ce prix il s’agit d’une série indépendante, souvent confidentiel, sans doublage et sous titre disponible en Français.

  • 2 saisons x 10 épisodes x 1000 euros par épisode = 20 000 euros.

Pour créer les sous-titres français d’un épisode en anglais il faut ajouter 500 euros par épisode soit 10 000 euros. Nous en sommes donc à 30 000 euros pour 1 série indépendante sans grande notoriété qui sera disponible sur Afrostream. Pour promouvoir ce programme il faut créer de nouvelles bandes annonces avec la charte graphique d’Afrostream, créer des visuels et investir dans la publicité en ligne (Facebook Ads, Mailchimp, médias partenaires…) et créer des événements. Le budget marketing pour une série indépendante comme celle-ci est à minima de 10 000 euros.

Nous en sommes donc à 40 000 euros pour un an d’exploitation d’une série indépendante de 2 saisons.

«Go big or go home»

Mais une série ne suffit pas pour créer une offre suffisante pour un abonné. Combien de séries faut-il? 10 séries? Sur la base de mon exemple cela représente un budget de 400 000 euros pour un an. 30 séries? 1 200 000 euros pour un an d’exploitation. Gardez bien en tête que dans mon exemple j’ai utilisé le prix par épisode le moins cher.

Pour les films c’est évidemment la même mécanique.

Prenons l’exemple d’un long métrage afro-américain indépendant ou africain nigérian (Nollywood) à 3000 euros par année d’exploitation. Pour ce prix il s’agit d’un film sorti il y a 2 ou 3 ans, sans notoriété dans les pays francophones, sans doublage et sous-titres disponibles en Français.

Pour créer les sous titres français d’un long métrage en anglais + langues locales nigérianes, il faut ajouter 1000 euros. Nous en sommes donc à 4 000 euros pour un film sans grande notoriété. Pour promouvoir ce film il faut ajouter un budget marketing d’un minimum de 10 000 euros.

Nous en sommes donc à 14 000 euros pour un an d’exploitation d’un film afro-américain indépendant ou africain nigérian sorti il y 2 ans.

Combien de film faut-il pour constituer un catalogue intéressant? 50 films? Sur la base de mon exemple cela représentent un budget de 700 000 euros pour un an. 100 films? 1 400 000 euros pour un an d’exploitation. Ici aussi j’ai utilisé le prix par film le moins cher.

On ne peut pas aller dans une arène de gladiateurs muni d’une épée de paille

Donc pour 30 séries indépendantes de 2 saison et 100 films afro-américains indépendants ou africain nigérian avec des sous titres en français, il faut un budget de 2 100 000 euros pour un an d’exploitation.

Un service comme Netflix a près de 3000 films et séries (source) mais malgré ce chiffre, de nombreux abonnés trouvent que le choix de contenu est limité. Alors imaginez leur réaction pour un service avec uniquement 30 séries et 100 films…

Pour amortir le coût de ces 30 séries et 100 films (2 100 000 euros par an), il faut environ 25 000 abonnés payant un abonnement à 7 euros par mois pendant 12 mois sans interruption.

Le budget pour le contenu n’inclut pas le budget pour développer la plateforme de streaming, les coûts des serveurs, ceux du développement des applications pour les smartphones, tablette et box des opérateurs téléphoniques. Il faut compter là 500 000 euros. Il faut également ajouter les frais de fonctionnement, les salaires de l’équipe, les factures des consultants, avocats, les bureaux, les déplacements à l’étranger, le marketing de l’offre. Au total cela représente environ 1 000 000 euros par an.

Dans ce scenario à minima, pour l’année de lancement du service de streaming d’Afrostream le besoin de financement pour le contenu + la technologie et frais de fonctionnement, s’élève à 3 600 000 euros. Pour amortir ce budget, il faut environ 44 000 abonnés payant un abonnement à 7 euros par mois pendant 12 mois sans interruption.

En mai 2015, il n’était pas envisageable pour moi de récolter 3 600 000 euros avec une campagne de crowdfunding auprès de nos 60 000 fans Facebook! Face à ces chiffres colossaux et le refus des investisseurs européens de me suivre, le projet se retrouvait dans une impasse.

Le rêve américain: Welcome to the Silicon Valley

Notre salut viendra des États-Unis, précisément de la Silicon Valley à Y Combinator.

En Juin 2015, nous avons la chance d’être sélectionnés par le plus prestigieux accélérateur de start-up au monde. Cette sélection nous permet de recevoir un financement de 120 000 dollars et un accompagnement au développement de notre entreprise pendant quatre mois à San Francisco. À l’issue de ce programme, nous allions présenter nos progrès et ambitions à plus de 400 investisseurs, lors d’une journée de présentation nommée Demo Day, pour tenter de lever les fonds nécessaires pour lancer notre service.

L’investissement de 120 000 dollars de Y Combinator était un montant énorme pour moi, même si ce montant ne me permettait toujours pas de lancer mon service de streaming.

Remettons ces 120 000 dollars dans leur contexte.

Ressortez vos calculettes

  • Logement dans la Silicon Valley, l’une des régions américaines aux loyers les plus élevés: 4 mois x 5000 dollars de loyer pour un 3 pièces = 20 000 dollars
  • Vols A/R + ordinateurs + transports et alimentation pour 4 personnes durant 4 mois = 10 000 dollars.

Il reste donc 90 000 dollars pour financer nos 2 100 000 euros de contenu, nos 500 000 euros de plateforme technique et les 1 000 000 euros de frais de fonctionnent pour la première année… Mission impossible je vous ai dit.

L’art de la levée de fonds: épisode 2

 

 

Quel progrès pouvions-nous faire en quatre mois pour impressionner les investisseurs de la Silicon Valley? Lancer le service? Impossible! Nous n’en avions évidemment pas les moyens. De nouveau c’est l’impasse.

Sur les conseils de Michael Seibelpartner à Y Combinator, nous lançons une campagne de pré-abonnements à Afrostream pour nos fans Facebook. L’idée était simple, prouver à de potentiels investisseurs que nous nous adressions à un public prêt à payer pour un service conçu pour répondre à un besoin qu’ils avaient exprimé. Nous proposions donc de souscrire en avance à un abonnement annuel pour bénéficier de 40% de réduction et un accès au service un mois avant les autres. La formule proposée était à 39,99 euros pour 1 an de films et de séries. Nous proposons ces préventes à nos 60 000 fans et au bout de 3 mois nous vendons 2000 abonnements annuels. C’est moins de 4% de notre base de fans mais suffisamment important prouver l’engagement de notre cible. Et je tiens à nouveau à remercier ces premiers abonnés sans qui rien n’aurait été possible!

A la suite de notre présentation face aux investisseurs, j’ai réussi à lever au total environ 4 000 000 dollars pour développer Afrostream pendant 2 ans.

Pour ceux qui ont sauté les paragraphes précédents 4 000 000 dollars peut sembler être une somme colossale à dépenser en 2 ans. Ce n’est rien quand il s’agit d’un média.

La comparaison au géant Netflix

Pour mettre ce chiffre dans son contexte comparons le à ce que Netflix à dépenser pour son lancement en France la première année (source):

  • Environ 33 millions euros pour le marketing,
  • 900 000 euros pour les salaires des 6 employés.

Ni les droits des films et séries, ni les coûts de développement informatiques ne sont inclus dans les dépenses de la filiale de Netflix en France.

Fin décembre 2015, Netflix France avait environ 500 000 abonnés payants en France. Ce qui veut dire que, hors coût du contenu et coût technique, Netflix France a dépensé 66 euros pour recruter chaque abonné. Je répète ceci n’intègre pas les milliards de dollars que Netflix consacre au contenu et à sa technologie.

À 66 euros de coût d’acquisition, il faudrait à Afrostream un budget marketing de 2 904 000 euros pour recruter 44 000 abonnés… Soit les 3/4 des 4 000 000 dollars levés. Quand je vous dis que 4 000 000 ce n’est pas grand-chose au final!

Le cheval de Troie

Seul dans un petit studio nantais le jour du lancement

Peu après le lancement de notre offre le 1 septembre 2015, malgré les défauts de jeunesse du service (bugs, taille du catalogue, problèmes de sous-titres) nous avons rencontré une forte progression des abonnements. Ce qui n’était qu’un projet est devenu un service auquel des milliers de personnes souscrivaient. Je m’étais tellement appliqué à créer un branding fort autour de la marque que la plupart des abonnés attendaient de nous une qualité de service irréprochable, comparable à celle de Netflix. Personne ne connaissait notre plus grand secret… Celui dont à l’époque j’avais à la fois honte et dont j’étais aussi fier… Alors que nous avions des milliers d’abonnés, l’équipe permanente d’Afrostream se constituait de seulement quatre personnes! Trois ingénieurs, chargés de créer et de maintenir la technologie, et moi, chargé du business développement, de l’acquisition du contenu, du marketing, du community management, et bien-sûr de lever les fonds!

Très vite nous avons signé des partenariats stratégiques avec de grands studios américains (Sony PicturesWarner BrosViacomLionsgateDisney), avec des chaines africaines comme la RTI en Côte d’Ivoire ou encore la chaîne BET pour une distribution de leurs contenus en live et en replay.

La fin des débuts

En avril 2016, huit mois après notre lancement nous franchissions le cap des 10 000 abonnés. Un chiffre impressionnant compte tenu de notre budget marketing réduit. Il était donc temps pour moi de rependre ma casquette de leveur de fonds et de convaincre nos premiers investisseurs de réinvestir et de nous aider à en convaincre d’autres.

Puis le début de la fin

Après avoir établi un nouveau business plan revoyant à la hausse nos besoins en financement pour: faire croître la base d’abonnés en France, investir dans le contenu original et financer une expansion dans 24 pays africainsPour ce plan ambitieux nous avions besoin de 10 millions de dollars pour trois ans. Alors que je pensais que la croissance d’Afrostream serait suffisante pour les investisseurs, la plupart d’entre eux nous reprochaient de n’être pas arrivé à la rentabilité avant de les solliciter pour une nouvelle levée de fonds. Il est vrai qu’il est recommandé aux start-up d’être à l’équilibre, «break even», ou rentable quand elles entreprennent leur deuxième levée de fond.

C’est à ce moment-là que j’ai réalisé que contrairement à ce que je pensais Afrostream n’était pas une start-up mais un média avec des besoins de financement liés à l’industrie audiovisuelle.

Dans notre industrie, il est tout à fait normal de ne pas être rentable les premières années.

C8 (ex-D8) a cumulé 371 millions d’euros cumulés depuis sa création. NRJ 12 cumule 163 millions d’euros de pertes (source). Netflix a 4,8 milliards de dettes (source).

On the road again

Malgré la frilosité d’une partie de nos investisseurs historiques, je suis reparti en road show à Paris, Genève, Milan, Londres, New York, Los Angeles, San Francisco, Abidjan, Lagos, Johannesburg pour convaincre de nouveaux investisseurs de nous financer pour accompagner notre croissance.

Quand le succès de votre offre devient votre faiblesse

Car même si cela semble contre intuitif, plus nous avions d’abonnés plus nous avions besoin de financement pour le contenu. Nous avons constaté que les abonnés les plus fidèles visionnaient la plupart de titres qui les intéressaient en trois mois. Pour les conserver il fallait en permanence mettre en avant notre catalogue et acheter des nouveaux contenus. De plus, on ne satisfait pas 2000 abonnés et 10 000 abonnés avec la même taille de catalogue. Plus nous avions de nouveaux abonnés plus la palette des goûts des abonnés s’élargissait. Plus simplement, quand vous décidez d’aller au cinéma avec quatre amis le choix du film est un peu plus difficile que quand vous y allez à deux car les goûts diffèrent.

Quand on a les poches vides, il vaut mieux porter un beau costume!

Durant l’été 2016, toujours sur la route, loin de mon équipe, tentant de lever de fonds, je décide de recruter des talents pour mieux structurer notre force commerciale et marketing.

Face à l’impossibilité de financer l’achat de nouveaux contenu ma stratégie était de mieux mettre en avant la richesse de notre catalogue et de mieux commercialiser notre offre à travers une distribution dans les box Orange et Bouygues, la vente des cartes d’abonnement prépayées chez 20 000 buralistes en France, sur des sites de e-commerce, et de proposer le paiement en Francs CFA dans certains pays africains.

Innover ou mourir

Nous innovons en lançant Afrostream Life, un portail d’articles gratuits dédiés à la pop culture Afro. Peu de temps après nous produisions et diffusions gratuitement notre premier programme original, un podcast: Le Tchip. Un talkshow proposant un point du vue inédit sur l’actualité.

Ces deux projets avaient pour but de familiariser une large audience à l’univers et aux valeurs d’Afrostream. Le Tchip rencontre un succès immédiat alors qu’Afrostream Life peine à se développer car avec une équipe réduite, ce projet ambitieux n’avait pas de pilote pour le mener à bien.

The walking dead

En novembre 2016, plus d’un an après notre lancement, des discussions avancées avec deux investisseurs me laissent penser que nous sortions du tunnel. Après les fêtes des fin d’année, alors que les négociations autour la levée de fonds piétinent je décide de partir à nouveau à l’étranger pour convaincre le dernier investisseur hésitant. Le 17 mars après quelques faux espoirs, la mauvaise nouvelle tombe. Un des investisseurs a changé d’avis à la dernière minute, il se retire. Il n’y aura plus d’investissement dans Afrostream.

Cet événement a signé la mort clinique d’un projet en croissance, un projet pour lequel l’équipe se battait sans relâche, un projet avec un réel impact social et culturel, un projet auquel j’ai consacré quatre ans de ma vie.

Get «saved» or Die Tryin’

 

Pour nos abonnés, pour tous ceux qui croyaient au bien fait de la mission d’Afrostream ainsi que pour ceux qui ont été inspirés par mon parcours d’entrepreneur et qui ont cru en moi, je me devais de ne pas abandonner aussi facilement et de tout tenter pour sauver Afrostream.

Alors que nous n’avions plus les moyens d’acheter du contenu, plus les moyens de mener des actions marketing dans un sursaut d’énergie et de motivation je décide de lancer une version «light» d’Afrostream au Royaume-Uni. En effet j’avais acquis les droits d’exploitation d’une partie de notre catalogue pour ce pays. Ce lancement rapide crée un buzz autour d’Afrostream qui me permet d’aborder plus sereinement des concurrents et partenaires en vue de la vente d’Afrostream. Je souhaitais à tout prix éviter la fermeture du service quitte à rejoindre un grand groupe et perdre un peu de mon indépendance et celle de mon équipe. Car la portée d’un projet comme Afrostream dépasse mes desiderata de fondateur et d’entrepreneur.

On the road again and again

Entre avril et août 2017, j’entame des discussions avec plus de 10 repreneurs potentiels, je me déplace à Los Angeles, Miami et New York pour les convaincre d’avancer rapidement car je sais que notre trésorerie ne nous permettrait pas de passer l’été. Même s’ils sont passionnés par Afrostream, les membres de l’équipe, à présent au nombre de huit, ont besoin de leur salaire à la fin du mois. Avec l’expiration de certains droits de diffusion et sans marketing le montant des revenus liés aux abonnements mensuels chute rapidement.

Fin aout, je n’ai plus les moyens de payer tous les salaires… Il est temps de raccrocher les gants.

La fermeture du service

J’aurais voulu emmener mon projet plus haut, plus loin mais ça ne marche pas toujours comme prévu. Donc j’accuse le coup, je marque une pause… Pour mieux redémarrer!

Les discussions avec les repreneurs américains n’ayant pas abouti, j’ai pris la décision de suspendre l’activité de la filiale française, Afrostream Studio France et la commercialisation de l’offre en France, Belgique, Luxembourg, Suisse et dans 24 pays africains.

La marque Afrostream et la technologie développée demeurant la propriété de la société américaine Afrostream Inc, la maison mère de la filiale française, une vente est toujours envisageable encore pour quelques temps.

Une équipe en or

Afrostream fut et reste une aventure humaine et entrepreneuriale formidable.

Mon équipe et moi-même avons prouvé que l’on ne peut pas limiter notre expertise à une thématique culturelle Afro ou au marché africain. Nous avons créé un media digital en France créé une offre de contenus payants pour des milliers d’abonnés plutôt urbains et âgés de 20 à 40 ans. Nous avons créé une marque à forte notoriété auprès d’une communauté de fans partageant un même centre d’intérêt. En Europe, nous avons créé de la valeur autour de contenus que l’industrie audiovisuelle française considère souvent inexploitables. Ce que l’équipe d’Afrostream a réalisé en peu de temps est un petit miracle qui n’est pas dû au hasard mais à l’audace et à l’expérience d’une équipe d’experts des médias. Il ne fait aucun doute que chacune et chacun d’entre eux trouvera rapidement des opportunités pour mettre en lumière leur talent et exprimer leur créativité.

Mon avenir?

Ce n’est pas parce que je ne suis pas millionnaire que j’ai perdu… Je suis devenu riche d’une expérience inestimable.

Quant à moi, je suis plus que jamais convaincu qu’il y a un espace grandissant pour l’innovation, l’expérimentation et la disruption dans les medias, en particulier dans la production de fictions originales. Je vais donc continuer à créer de la valeur au sein de cette industrie créative dans laquelle j’ai commencé à travailler dès l’âge de 16 ans.

Des centaines de porteurs de projet, inspirés par mon parcours, voient en moi un mentor. Il me tient à cœur de nourrir leur passion pour l’entreprenariat et l’innovation.

Je souhaite également partager plus en détails les enseignements de mes nombreuses expériences entrepreneuriales avec ceux qui souhaitent se lancer. Mon réseau international d’entrepreneurs, d’investisseurs et d’influenceurs est un capital que je partagerai avec un écosystème de startupeurs qui m’a tant soutenu.

Merci

Encore 1000 mercis à nos abonnés, à mon équipe, nos investisseurs, nos partenaires, ma famille et mes amis.

Retrouvez moi sur Instagram et Twitter: tonjebakang

PsLancer une start-up c’est comme créer un profil Tinder. A première vue c’est attrayant. Quand on y regarde de plus près, ça a l’air compliqué. Au troisième coup d’œil, ça s’annonce insurmontable. Mais comme dans toutes les rencontres amoureuses, lancer une start-up commence par de la passion mais finit quelques fois par un déchirement. Comme dans toute relation, la peur de souffrir à la fin ne doit pas occulter tout le bonheur qui précède. C’est exactement la même chose avec l’entreprenariat. Après un échec, il faut recommencer. Si c’était à refaire, je le ferais.

Le contributeur:

 

Tonjé Bakang est le fondateur et le CEO d’Afrostream.

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Un commentaire

  1. Bravo Tonje pour ce récit

    Seriez vous prêt a faire un livre….

    Vous pouvez contacter

    Bruno Salgues
    Directeur de collection d’ouvrage

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