[DECODE] Le Chinois DaDa, une licorne de l’EdTech à la conquête du monde
Selon une étude réalisée par The Telegraph en 2017, environ 10 millions de Chinois, soit 1% de la population du pays qui s’élève à 1,39 milliard d’habitants, sont capables de tenir une conversation en anglais. Si l’enseignement public de l’anglais tient une place importante dans le système éducatif chinois, la langue de Shakespeare étant l’une des trois matières principales de l’enseignement secondaire depuis 1983, il produit néanmoins des résultats décevants, la faute à une méthode d’enseignement s’appuyant énormément sur le bachotage. Et pendant que la majorité de la population chinoise peine à apprendre l’anglais, l’élite envoie ses enfants faire leurs études dans les meilleures écoles et universités nord-américaines et britanniques (Harvard, Oxford…), créant ce déséquilibre linguistique.
Malgré le peu de Chinois qui parlent anglais à l’échelle du pays, les autorités ont préféré ces dernières années diminuer la part de l’anglais dans les épreuves du Gaokao, l’équivalent du baccalauréat en Chine. Dans les années 1980 et 1990, l’apprentissage de l’anglais à l’école était pourtant vu par beaucoup de Chinois comme le signe d’une ouverture intellectuelle, rendue possible par la fin du totalitarisme maoïste et l’essor économique de la Chine. Face à un enseignement insuffisant de l’anglais dans le système éducatif de l’Empire du Milieu, Hui Zhi, une Chinoise à la recherche d’un professeur particulier d’anglais pour son fils, a alors eu l’idée de créer un programme attrayant pour que les anglophones puissent enseigner la langue de Shakespeare aux étudiants chinois.
Une solution pour remédier à un enseignement inadapté de l’anglais en Chine
Cela s’est matérialisé en avril 2013 par la création de la société DaDa, anciennement DaDaABC, avec Dennis Lee, son associé. Pour démocratiser l’apprentissage de l’anglais auprès des jeunes Chinois, la jeune pousse basée à Shanghaï a mis sur orbite une plateforme proposant aux enfants âgés de 4 à 16 ans un enseignement de l’anglais en ligne.
Concrètement, la plateforme connecte les étudiants aux professeurs d’anglais pour leur permettre d’apprendre la langue par le biais de scénarios interactifs et immersifs qu’ils peuvent retrouver dans la vie quotidienne. Ces professeurs sont sélectionnés par l’équipe de DaDa, qui revendique un taux d’acceptation de 3% parmi les candidatures reçues. A partir de sa sélection de professeurs, la société utilise des algorithmes pour faire correspondre les enseignants aux étudiants, mais aussi pour sélectionner le contenu et réorganiser les cours en fonction des disponibilités des professeurs. Depuis 2017, la start-up propose aussi des cours d’apprentissage de français et d’espagnol. On peut imaginer que la société étende cette méthode d’enseignement à d’autres langues dans les prochains mois.
DaDa a levé plus de 800 millions de dollars en moins de trois ans
A ce jour, la plateforme compte plus de 100 000 étudiants et 10 000 professeurs. Outre l’enseignement en ligne, DaDa a également noué des partenariats avec des structures éducatives de renom dans le monde entier, comme National Geographic Learning, Pearson Education, McGraw Hill Education et Oxford University Press, afin de proposer leurs programmes d’apprentissage aux utilisateurs de la plateforme. Depuis la création de DaDa, il y a près de six ans, la société s’est étendue à l’international. Dans un périmètre proche de la Chine, DaDa a lancé sa plateforme dans plusieurs pays asiatiques, notamment en Corée du Sud et au Japon, avant de mettre le cap sur l’Europe, en France et en Allemagne par exemple.
Pour financer son développement et promouvoir ses ressources pédagogiques auprès d’un nombre croissant d’étudiants chinois, l’entreprise a levé plus de 800 millions de dollars au cours de ces trois dernières années. Après avoir levé 500 millions de dollars en avril 2016, puis 100 millions de dollars en janvier 2018 auprès notamment du fonds new-yorkais Tiger Global Management, DaDa vient tout juste de boucler un tour de table de 255 millions de dollars en série D auprès du fonds américain Warburg Pincus et de ses investisseurs historiques, TAL Education Company, une EdTech cotée à Wall Street, et Yonghua Capital.
La Chine va injecter 30 milliards de dollars dans l’EdTech d’ici 2020
Sur le marché chinois de l’éducation en ligne, la start-up Yuanfudao a également gonflé les muscles fin 2018 en bouclant un tour de table de 300 millions de dollars. Pour réaliser cette opération, la société, basée à Pékin, s’est notamment entourée de Tencent, le géant chinois qui édite l’application WeChat, et de Warburg Pincus, fonds new-yorkais que l’on retrouve au capital de DaDa. Cette dernière levée de fonds a permis de porter la valorisation de Yuanfudao à 3 milliards de dollars.
Autre EdTech chinoise, la société Zuoyebang, également basée à Pékin, a levé 350 millions de dollars en juillet dernier. Dans le cadre de cette opération, la société avait été accompagnée par la banque d’affaires américaine Goldman Sachs, signe de l’attractivité grandissante du secteur auprès des investisseurs étrangers.
La tendance devrait s’accélérer puisque la Chine a annoncé son intention d’investir au moins 30 milliards de dollars dans les jeunes pousses de l’EdTech d’ici 2020. Au niveau mondial, le marché représentait 3 milliards de dollars en 2017 et devait dépasser les 8 milliards d’investissements en 2018. 90% des investissements sont réalisés en Chine et aux États-Unis.
En France, les investissements dans le secteur ont été multipliés par cinq en l’espace d’un an, passant de 40 millions d’euros en 2017 à 220 millions d’euros en 2018. Bien loin des montants colossaux investis dans l’Empire du Milieu.
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