BIG TECHIN THE LOOP

TIKTOK visé par une enquête du parquet de Paris, “L’impunité de l’algorithme est terminée”

📩 Pour nous contacter: redaction@fw.media

Le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire visant TikTok, soupçonnée d’avoir mis en danger la santé et la vie de ses utilisateurs. La procédure, confiée à la Brigade de lutte contre la cybercriminalité (BL2C) de la préfecture de police de Paris, fait suite au signalement du député Arthur Delaporte (PS), à la suite des conclusions de la commission d’enquête parlementaire sur les effets psychologiques de TikTok.

“Je salue l’ouverture d’une enquête préliminaire par le parquet de Paris contre la plateforme TikTok à la suite de mon article 40.
L’impunité de l’algorithme est terminée.
– Arthur Delaporte, député du Calvados, sur X (ex-Twitter)

Un signalement fondé sur des “dysfonctionnements graves”

Dans un communiqué publié mardi, la procureure de Paris Laure Beccuau précise que le parquet a été saisi le 11 septembre 2025 par Arthur Delaporte, à la suite des “dysfonctionnements constatés par la commission d’enquête parlementaire”. Cette dernière dénonçait “une modération insuffisante de TikTok, sa facilité d’accès par des mineurs, [et] son algorithme élaboré susceptible de pousser les personnes vulnérables vers le suicide en les enfermant très rapidement dans une boucle de contenu dédié.”

Le parquet indique que la section de lutte contre la cybercriminalité “a joint à cette analyse celle de différents rapports sur cette même plateforme”, citant :

  • le rapport du Sénat (2023), qui “souligne un risque en matière de liberté d’expression, de collecte des données, et d’algorithmes offensifs dans la consultation de contenus dangereux” ;
  • le rapport d’Amnesty International (2023), qui alerte sur “les dangers de l’algorithme, jugé addictif et faisant courir des risques de passages à l’acte auto-agressif chez les jeunes” ;
  • et le rapport de Viginum (février 2025), qui met en avant “un risque critique de manipulation de l’opinion publique notamment dans un contexte électoral”.

Trois infractions principales dans le viseur des enquêteurs

Les investigations visent plusieurs infractions graves, passibles de lourdes peines :

  • la propagande en faveur du suicide, punie de 3 ans de prison et 45 000 € d’amende ;
  • la fourniture d’une plateforme pour transaction illicite en bande organisée, passible de 10 ans et 1 million € d’amende ;
  • l’altération du fonctionnement d’un système automatisé de données, également passible de 10 ans et 300 000 € d’amende.

Toujours selon le communiqué, l’enquête porte sur :

“le respect de l’obligation de notification par une plateforme des soupçons d’infractions commises par son intermédiaire, le fonctionnement de l’algorithme par rapport à la présentation qui en est faite à son utilisateur, et l’édition de contenus consistants notamment à la promotion du suicide.”

TikTok rejette les accusations et défend sa politique de sécurité

Contactée par l’AFP, TikTok “réfute fermement les accusations” et affirme proposer “plus de 50 fonctionnalités et paramètres prédéfinis spécialement conçus pour assurer la sécurité et le bien-être des adolescents”. La société dénonce une “présentation trompeuse” des conclusions de la commission d’enquête et assure collaborer avec les autorités pour démontrer la conformité de ses pratiques.

Un tournant pour la régulation des algorithmes

L’enquête ouverte par le parquet de Paris marque une première en France car c’est la conception même de l’algorithme, et non plus uniquement les contenus diffusés, qui se retrouve au cœur d’une procédure judiciaire. Cette approche pourrait ouvrir la voie à une requalification des grandes plateformes en “éditeurs de contenus algorithmiques”, les rendant responsables des effets psychologiques ou sociaux produits par leurs systèmes de recommandation. Le parquet travaille “en coopération étroite avec les différents services de l’État impliqués sur ces sujets, notamment l’Arcom et Viginum, dont les analyses sont également sollicitées”, selon Laure Beccuau.

 

Suivez nous:
Bouton retour en haut de la page