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EBITDA, le standard (trop) retouché des investisseurs classiques

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Pendant des années, l’EBITDA a servi de référence universelle pour évaluer la performance financière d’une entreprise. Facile à calculer, à comparer et à projeter, il reste un indicateur central dans les grilles de lecture des investisseurs traditionnels, en particulier en private equity. Pourtant, derrière sa simplicité apparente, l’EBITDA masque parfois plus qu’il ne révèle, et à l’heure où la transparence opérationnelle redevient une exigence, il convient d’en interroger la pertinence.

Tout au long du mois de juillet nous vous proposons une série consacrée aux indicateurs clés de pilotage financier de l’entreprise. Retrouvez cette série dans la rubrique Cash is King

Que mesure l’EBITDA ?

EBITDA = Résultat d’exploitation + Amortissements + Provisions

L’EBITDA (Earnings Before Interest, Taxes, Depreciation and Amortization) mesure la performance opérationnelle brute de l’entreprise, avant les choix de financement, les charges fiscales et les dépréciations d’actifs. Il permet d’évaluer la capacité de génération de résultats avant éléments non cash et hors exploitation directe.

Pourquoi l’EBITDA reste un repère pour les investisseurs ?

Un indicateur simple et standardisé

L’EBITDA facilite la comparaison entre entreprises de secteurs et de tailles variées, indépendamment de leur structure financière ou de leur politique fiscale.

Une base de valorisation largement utilisée

Les multiples d’EBITDA (généralement x6 à x12 dans le midmarket) sont utilisés dans les opérations de LBO, les cessions industrielles ou les valorisations de sociétés matures.

Un proxy rapide de la rentabilité opérationnelle

Il donne une image approximative de la trésorerie dégagée par l’activité, utile pour les analyses rapides ou les screening de dossiers.

Un indicateur-clé pour les prêteurs

L’EBITDA est la base de calcul des covenants bancaires (ex. : ratio dette nette / EBITDA) dans les financements structurés.

Mais pourquoi il est parfois insuffisant (voire trompeur) ?

Il ignore la consommation réelle de cash

L’EBITDA ne reflète ni les besoins en fonds de roulement, ni les investissements (CAPEX), ni le remboursement de la dette.

Il est facilement manipulable

L’EBITDA “ajusté” ou “normalisé” peut inclure de nombreux retraitements : coûts “exceptionnels”, dépenses de croissance, frais de restructuration… au point de devenir parfois un indicateur marketing.

Il ne mesure pas la rentabilité nette

Une entreprise à EBITDA positif peut avoir un résultat net fortement négatif ou une trésorerie en chute libre.

Il devient obsolète dans les modèles à forte intensité d’abonnement ou de plateforme

Dans le SaaS ou les marketplaces, des indicateurs comme l’ARR, la marge brute, le cash conversion ou la capital efficiency sont plus pertinents.

Benchmarks par secteur

Secteur Marge EBITDA cible (%)
SaaS B2B mature 20 – 35 %
Services numériques 15 – 25 %
E-commerce 5 – 15 %
Logiciel on-premise > 30 %
Edtech / Healthtech < 10 % (early-stage)

En early-stage, une marge EBITDA négative est tolérée. À partir de la série B, les investisseurs attendent une trajectoire claire vers un EBITDA break-even.

Comment utiliser l’EBITDA intelligemment ?

  1. Comparer avec d’autres indicateurs de rentabilité
    – Free Cash Flow, EBE, Cash Conversion
    – Identifier les écarts significatifs
  2. Clarifier les retraitements
    – Ne pas multiplier les “ajustements exceptionnels” à chaque tour
    – Justifier les éléments sortis du calcul avec cohérence
  3. Croiser avec la structure du BFR et du CAPEX
    – Un EBITDA élevé mais un cash flow négatif = signal de gestion déséquilibrée
  4. Suivre l’évolution sur 12 à 24 mois glissants
    – Pour lisser les effets ponctuels et identifier une tendance structurelle

L’EBITDA reste une métrique incontournable pour les investisseurs traditionnels, mais son usage doit être encadré. S’il permet une lecture simplifiée de la performance, il peut aussi masquer les failles d’un modèle ou les tensions sur la trésorerie. Dans l’environnement actuel, il est utile comme point d’entrée, mais ne suffit plus à lui seul. Les investisseurs exigeants regardent désormais au-delà de l’EBITDA, vers ce qui compte vraiment : le cash, la récurrence, l’efficacité opérationnelle.

Rendez vous demain pour parler de cash conversion, ou comment transformer son bénéfice en cash réel.

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