Les dernières actualités de la techLes ExpertsMedia

[Expert] Le « journalisme long » se perd ? Tant mieux ! par Cyrille Frank

Les grands journaux américains publient de moins en moins de longs articles (plus de 2000 mots), révèle une étude du Columbia Journalism Review. Un constat que l’on pourrait faire aussi chez nous, mais est-ce vraiment grave ? Pas nécessairement.

La fameuse revue d’études sur le journalisme américain, la Columbia Journalism Review révèle que les grands journaux nationaux américains, le New York Times, le Financial Times, le Los Angeles Times et le Washington Post produisent des articles moins longs qu’autrefois. Entre 2003 et 2012, le nombre d’articles comportant plus de 2000 mots a baissé de façon drastique.

Connaissez vous la DATAROOM de FRENCHWEB.FR notre base de données de startups et sociétés innovantes françaises: informations clés, fonds levées, chiffres d'affaires, organigramme, axes de développement. Accédez aux informations que nous avons collecté concernant plus de 1000 sociétés

courbes journaux et longueur textes - Columbia Journalism Review

La courbe ci-dessus est édifiante. Elle montre une baisse de 25% pour le New York Times, de 35% pour le Wall Street Journal, de 50% pour le Washington Post et de 86% pour le Los Angeles Times !

Le New York Times reste un cas à part, car dans le même temps, le nombre d’articles qu’il a publié de plus de 3000 mots a augmenté de 32% et représente plus de deux fois et demi le nombre total de ses articles ! On peut donc dire que ce sont surtout les articles de taille intermédiaires qui ont disparu, mais que les longs formats se portent toujours très bien au New York Times

courbes journaux et longueur textes - Columbia Journalism Review2

De fait, cette tendance mesurée aux Etats-Unis semble se confirmer intuitivement à l’échelle de la presse française, même si je n’ai trouvé aucune étude pour le confirmer. L’analyse du CJR entre en résonance avec les arguments développés par les créateurs de la revue XXI qui dans leur manifeste, dénoncent la fin d’un journalisme de profondeur, en raison du diktat de la publicité notamment.

LA LONGUEUR N’EST PAS SYNONYME DE QUALITÉ

Derrière ce constat de la fin du “long-journalism” point l’argument de la fin du bon journalisme, celui qui permet de développer des explications, argumentations et points de vue complexes, seuls à même de pouvoir expliquer le monde.

Même si cette assertion est partiellement vraie, elle mérite d’être fortement nuancée. D’abord la longueur ne signifie rien en tant que telle, tout dépend de la densité du propos, comme je l’ai expliqué dans mon article “Ecriture web : la taille maximum est une hérésie“. Il me semble totalement illusoire de vouloir expliquer bien des concepts compliqués de philosophie en 1500 signes, comme la gratuité de l’oeuvre d’art selon Kant, qui doit être selon lui, l’objet d’une “finalité sans fin”.

Il me paraît compliqué d’expliquer correctement la crise grecque en un feuillet, ou alors de façon tellement raccourcie que le texte ne serait alors compris que de ceux qui connaissent déjà bien la question. C’est un peu le défaut de ces livres qui prétendent résumer de grandes questions philosophiques ou historiques en quelques centaines de pages : la synthèse n’est pas nécessairement la meilleure méthode pédagogique.

Mais a contrario, il nous est tous arrivé de tomber sur des articles ou des oeuvres “verbeuses” qui disent peu de choses avec beaucoup de mots.

Je suis le premier à déplorer cette ère d’efficacité systématique qui limite la divagation, la contemplation et la cyber-flânerie. Mais en même temps, combien de scènes longues, pesantes et inutiles dans certains films nombrilistes ? Combien de pages inutiles où l’écrivain, aussi talentueux soit-il par ailleurs, se regarde écrire ? Je ne donnerai aucun nom tant ce sentiment est aussi partagé que subjectif. Je ne parle pas de ces moments volontairement longs qui servent un propos et une narration par cette lente montée de tension du calme précédant la tempête (cf. “Les sept samuraï”, “Key Largo” ou la mythique scène d’attente du train dans “il était une fois dans l’ouest”).

Le journaliste, de la même façon, n’est pas là uniquement pour se faire plaisir. Il doit penser avant tout à son lecteur et au service qu’il doit lui rendre : d’intelligibilité, de découverte, d’émotion… Sur ce point, je suis entièrement d’accord avec Laurent Beccaria et Patrick de Saint-Exupéry, auteurs du manifeste de XXI.

LA CONCISION AUSSI EST UN SERVICE AU LECTEUR

Justement, parmi les services que le journalisme doit rendre au lecteur, il y a celui de lui faire gagner du temps. Le format du mook (mélange de magazine et book) choisi par XXI, ne promeut pas ce service particulièrement. La valeur ajoutée de ce format est plus celle de la découverte, de l’expérience immersive du récit littéraire qui a besoin de temps pour installer une ambiance. Cela est très bien mais tous les formats journalistiques ne sont pas adaptés à cette longueur (voire langueur).

Il faut tenir compte des motivations du lecteurs qui sont multiples et de ses modes de réception de l’information. Le matin, les lecteurs ont plutôt tendance à s’intéresser à l’actu chaude, récente, immédiate qui va leur permettre de se socialiser. En gros d’avoir du grain à moudre à la machine à café. Et là, il faut être efficace, bref et brut : le format dépêche d’agence froide convient tout à fait. D’ailleurs, même Mediapart, dont les articles longs sont légendaires, écrit ses brèves avec concision et efficacité.

breve-Mediapart

S’agissant du contexte de réception, de plus en plus de lecteurs consultent les informations via leur mobile, comme ces 37% de jeunes Américains. Un article de plus de 3000 mots sur de l’actualité du matin, publié entre 8h et 9h30 semble peu adapté au besoin de ce public, à ce moment là, même s’il faut sortir du cliché “mobile veut dire court”. Des retraités ou des chômeurs seront peut-être ravis de ce choix, mais il faut alors proposer une ligne éditoriale cohérente par rapport à cette cible. Oui messieurs de XXI, on peut tourner autour du pot, mais il s’agit bien de cela et ce terme de “cible” n’est ni dévalorisant, ni sale. Il exprime depuis longtemps, et en presse magazine aussi, un besoin d’adapter le contenu aux besoins de son public qu’il faut bien tenter de cerner dans les grandes lignes, même si fort heureusement, il n’y a aucun déterminisme. Bien des gens échappent aux catégories dans lesquelles on les range, et c’est heureux !

Faire un magazine, concevoir un journal n’est pas une expérience solitaire gratuite et totalement artistique, même si l’art doit y avoir sa place. C’est un produit qui répond à des besoins, c’est pourquoi le marketing se montre utile pour définir ces attentes. Après, il incombe au directeur de la rédaction de ne pas se caler entièrement sur ces informations et d’apporter au lecteur ce qu’il demande, mais aussi ce qu’il ne demande pas. Formule que je résume par des “Haribo ET des haricots verts”.

UN CHANGEMENT DE SOCIÉTÉ QUI NÉCESSITE UNE ADAPTATION

Se plaindre du manque de longueur des articles, de la fin du cyber-flâneur, de la disparition de l’argentique ou des petits cinéma de quartier relève de la nostalgie quelque peu passéiste. Oui, le rythme global de nos existences s’est bien accéléré et la mondialisation, ainsi que la globalisation culturelle des médias, n’y sont pas étrangers. On a le droit de le déplorer, ce que je ne me gêne pas de faire sur certains papiers un peu plus philo ou sociologiques.

Ceci dit, concrètement, on n’y peut pas grand chose. Se lamenter sur la disparition d’un monde, dont on exagère rétrospectivement les vertus, par procédé classique de “cristallisation” Stendhalien, est Don-Quichottesque.

Le mieux est de voir comment s’adapter à cette nouvelle donne, pour tenter de limiter la casse. Je prétends, moi, qu’il faut adapter les formats pour séduire un jeune public qui se désintéresse de l’actualité quotidienne. Ce que fait XXI dans son domaine est tout à fait remarquable, mais il oeuvre dans le domaine magazine, et sur un certain contenu. Sa solution correspond à un certain type de besoins et je ne crois pas un instant qu’il soit réplicable en presse d’information générale. Mais c’est une innovation qui va dans le bon sens : apporter de la valeur au lecteur (ne serait-ce que “positionnelle” : “t’as pas lu le dernier XXI ? Ouhais trop bien…”)

Dans un contexte de concurrence générale de l’attention, de sollicitations multiples entre médias (TV, presse, radio, internet), réseaux sociaux (Facebook, Twitter), activités ludiques (jeux video) ou de passion (bricolage, jardinage…), il faut faire la preuve de son service, mais le faire vite ! Nous sommes sur le bord de la voie ferrée et tentons de capter l’attention des passagers du TGV : “j’ai un truc sympa à te montrerrrrrrr….”

Il faut tâcher, autant que faire se peut, de ne pas sacrifier le fond à la forme et de produire de l’intelligence, mais sous un emballage plus attractif. Le caractère accrocheur des titres (comme celui de cet article d’ailleurs) fait partie de cet attirail, tout comme le ton décalé ou le format plus court ou les visuels soignés. C’est ce que nous essayons de faire chez Quoi.info, AskMedia ou que tente de faire lui aussi le site citoyen Upworthy, de manière beaucoup plus radicale que nous d’ailleurs !

Tout est bon pour attirer le lecteur vers l’intelligence et la profondeur qui feront de lui un citoyen mieux armé socio-économiquement, et plus apte à voter “en conscience”. Refuser les adaptations et se cramponner à d’anciennes recettes est une position élitiste qui laisse sur le bord de la route de nombreuses personnes. Mais encore une fois, tout est question d’équilibre entre le fond et la forme; entre la simplification et l’amputation. On a eu ce débat autrefois lorsqu’ont été publiés les fameux profils d’une oeuvre qui font un résumé des pavés que les lycéens boudent de plus en plus. Ne pas encourager le renoncement à l’effort, mais tenir compte aussi de ceux qui n’ont pas les moyens de toutes façons de suivre, et pour qui ces résumés sont “mieux que rien”.

Ceux qui se replient derrière des chapelles de lecteurs CSP++ ne mesurent pas l’aggravation des inégalités socio-culturelles pour des franges importantes de citoyens. Produire des contenus de qualité pour une société de clercs et de jeunes individus sociologiquement favorisés est tout à fait respectable. Mais il faut aussi penser à tous les autres, et laisser les confrères tenter de trouver des solutions et de nécessaires compromis.

Cyrille Frank  (Article original)

Sur Twitter

Sur Facebook

Sur Linkedin

Suivez nous:
CATHAY INNOVATION EDUCAPITAL XANGE
A Global Venture Capital Firm Connecting Innovators Everywhere The largest European Edtech & Future of Work VC Today's disruption, Tomorrow's daily life
DECOUVRIR DECOUVRIR DECOUVRIR
Connaissez vous la DATAROOM de FRENCHWEB.FR notre base de données de startups et sociétés innovantes françaises: informations clés, fonds levées, chiffres d'affaires, organigramme, axes de développement. Accédez aux informations que nous avons collecté concernant plus de 2000 sociétés

10 commentaires

  1. Cyrille, je trouve que tu écris beaucoup (trop ?) et qu’au final tu noies le poisson.
    Tu opposes des contenus (pourquoi pas) et des supports (c’est plus délicat). Comment mettre dos à dos les journaux papier et leurs pendants sur le web ? Reprocher aux journaux de ne pas savoir évaluer, occuper l’espace temps de leurs lecteurs, ne pas savoir évaluer la pertinence du couple contenu & moment : oui. Mais aujourd’hui il n’est plus question de format, de longueur mais de propose la bonne info au bon format au bon moment.

    Il y a du bon en chaque chose, chaque usage conforte un modèle et la somme des modèles ne reflète pourtant pas les usages…
    Personnellement je rêve d’une chose : que sur mon mobile je puisse zapper rapidement parmis les news lire un court résumé et la mettre de côté pour lire un article de fond un peu plus tard et pourquoi pas un dossier.

    Je travail « dans le web » sur le web et avec le web depuis 1995 et je n’ai pas peur de dire que j’aime aussi prendre mon XXI et y lire des articles déconnectés de : la people-isation de l’info, le dictat des médias, le politiquement correct… bref le marketing qui finit par noyer l’information. Tout les supports sont complémentaires… et une seule chose compte c’est le continuum informatif.

    Le problème aujourd’hui est justement totalement l’inverse : à force de zapper d’une info à une autre et de ne plus lire un seul contenu de fond, on fini par faire des générations de gens qui ont une culture générale surfacique énorme mais incapables d’être experts dans aucun domaine… même le leur. La relation de l’information à la culture a toujours été très forte et aujourd’hui l’une est en train de projeter l’autre au fond du gouffre (mais c’est un autre débat).

    Là où tu fais une erreur majeure à mon avis, c’est en introduisant le loup dans la bergerie ou le marketing dans l’information. C’est déjà ce qui se passe certes, mais est-ce pour autant qu’il faut envisager l’avenir comme et tel que l’on nous le propose ? je ne le pense pas. nous avons tous à perdre dans un modèle de communication qui supplantera l’information.

    Je pense que les 2 sont viables… et que une seule chose compte : que survivent les supports qui répondent à une attente et à un usage et que les autres disparaissent… c’est la loi de l’offre et de la demande non ? Mais je souhaite et j’espère que le contenu journalistique à base d’enquête et d’investigation réelles va perdurer faute de quoi nous ne parlerons bientôt plus du tout d’information mais de communication et ce serait extrêmement préjudiciable pour notre liberté individuelle à moyen terme.

    1. Bonjour Jean Luc,

      Hahaha, j’aime bien ce contre-pied d’entrée, j’écris trop, je suis confus : d’emblée je suis pris en faute. ok. ;-)

      Sur le fond, je ne comprends pas les reproches que vous me faites. Ce que je vous dites n’est absolument pas en contradiction avec mon propos, bien au contraire. « Proposer la bonne info au bon format au bon moment », « tous les supports sont complémentaires »… je ne dis pas autre chose.

      Relisez moi bien, vous verrez que nous sommes d’accord.

      Sauf sur deux points :

      1/ le marketing. Actuellement, ce sont souvent des commerciaux qui décident, via les régies pub qui décident de monter plus ou moins bien une aire éditoriale « sponsorisée ».

      En donnant les armes aux journalistes, on limite une fois de plus la casse, on ménage mieux la chèvre et le chou : la rentabilité et l’expérience utilisateur. On fait les bons arbitrages.

      Les journalsites ne peuvent plus se contenter de regarder de loin les problèmes de monétisation et de rentabilité économique de leur entreprise. Il est de leur devoir d’y songer pour assurer la pérénité de leur mission et l’indépendance de leur titre. D’illustres journalistes comme Eric Israelewitz avaient bien compris cette nécessité et se sont battus pour trouver des financements, publics, mais aussi privés.

      Qu’il y ait ensuite une grande barrière entre pub et rédaction, je dis oui ! Bien sûr ! Mais pas de distance méprisante d’un métier contre l’autre. Les deux doivent travailler en « collaboration », un mot qui devient totalement inévitable pour faire face aux mutations d’aujourd’hui.

      2/ Sur la question de la culture et de l’information, je pense que vous vous trompez. Ce sont les inégalités socio-économiques initiales qui sont accentuées par les médias et la grande bouillie informationnelle. Le problème vient d’un manque de moyens éducatifs (et une très mauvaise répartition!) et d’une pauvreté sociale. Les enfants de cadres n’ont jamais pris autant d’avance, eux ! Il y a plus que jamais facilité d’accès à l’information et diversité de l’offre.

      A condition d’avoir les bases d’instruction et le niveau scolaire ad hoc pour en bénéficier. Les autres avaleront de la Star Ac et du Koh Lantah. L’école et l’éducation, voilà les terrains à améliorer. On accorde une fois de plus trop d’importance aux médias !

      Bien cordialement

      Cyrille

  2. A vouloir être trop synthétique on on est parfois trop court ;)

    L’intro, c’était de la provocation gratuite… j’avoue mais j’ai vraiment eu du mal avec votre contenu : le reproche que je vous fais pour faire court c’est de dire tout et son contraire, de ménager la chèvre et le chou (malgré les feuilles de choux) et au final de conclure que tout est bien mais pourrait être mieux… franchement faire aussi long pour dire ça.. désolé mais c’est ultra décevant. C’est politiquement correct, voilà. (

    1/ Pour le marketing nous sommes effectivement pas d’accord, si le journaliste commence à se soucier de la rentabilité de ses papiers il va faire du publi-rédactionnel. C’est comme pour tous les métiers qui relèvent d’une technicité particulière : il y a le technicien et le gestionnaire, et l’on ne demande ni à l’un ni à l’autre de faire le métier de l’autre. Il y a peut-être à chercher du côté des têtes des grands quotidiens ou hebdo où l’on a mis trop souvent des anciens journalistes plus ou moins célèbres incapables de gérer… bref.

    Qu’un responsable éditorial, rédac chef ou responsable d’un quotidien donne le LA et la ligne de conduite de son journal et surtout la direction économico stratégique, soit (et si seulement cela pouvait exister…)… mais que le journaliste ou le reporter ait à se soucier de l’aspect bankable de ses contenus c’est une bêtise sans nom ! Avec un système de ce genre on retombe très vite dans les émissions et la soupe que vous citez.

    Si les journalistes ont un défaut majeur, et depuis des années déjà, c’est celui d’être restés hermétiques au changement de société et d’avoir ignorés trop longtemps le digital… ça oui. Mais la diversification des supports ne signifie pas plus qu’avant la rentabilité de leurs contenus en tout cas, pas pour les journalistes en tant que producteurs de contenus.

    Il y a des gens dont c’est le métier de rentabilisé les contenus, de faire de la pub etc. celui du journaliste est de relater des faits… c’est complémentaire et chacun doit avoir conscience de la présence de l’autre.

    2/ Effectivement nous ne sommes pas d’accord et ne vivons pas dans le même monde ;)

    Vous dites vous même que la majorité des gens passent leur temps devant leur écran ou de sinfos… mais que celles-ci ne sont pas forcément adaptées à la façon dont ils consomment… il n’est donc pas forcément question ici d’inégalités… cela n’a pas grand chose à voir, en tout cas si l’on ne regarde pas par le petit bout de la lorgnette, c’est beaucoup trop facile comme raisonnement. Améliorer l’éducation : évidemment c’est un chantier prioritaire et où tout est à refaire… mais il va de paire avec l’information… Votre raisonnement vient à se poser la question suivante : où se situe le seuil de la culture et de l’information dans l’éducation ? Pour moi il est très important et d’autant plus aujourd’hui quand l’information est aussi accessible, et ce, quel que soit le niveau social. Il y a des familles où ce sont les enfants qui lisent le journal à leurs parents lesquels apprennent à lire du même coup !

    Nous sommes dans un monde de l’image et je fais aujourd’hui le pari que l’on peut annihiler 8h d’éducation par 8 minutes d’images au journal de 20h et qu’à contrario on peut soutenir ou enrichir grandement l’éducation par une information approfondie et de qualité. Je suis d’un milieu ouvrier et c’est grâce au journaux, magazines et à mon esprit critique que j’ai réussi à développer mon libre arbitre à faire de mon éducation une richesse intellectuelle.

    Le journaliste doit poursuivre son travail de fond, là où se situe sa valeur ajoutée : l’analyse, le décryptage, le terrain etc. Le métier qui consiste à pondre des brèves adaptées à un support n’est pas le métier de journaliste ou reporter. Il me semble que les rédactions sont pleines de pigistes qui ont à se faire la plume avant d’accéder à d’autres tâches peut-être plus sympas…

    Qui a commis la première erreur en séparant les rédactions print et web ? A ce moment là on a confondu le contenu et le support et ça c’est un des grands drame du journalisme d’aujourd’hui… Il suffisait d’imaginer que le journaliste produit un contenu qui est repris sur des supports différents et fonction de l’usage qu’en font les lecteurs… c’est tout.

    Quoi.info n’est-il pas en train d’inventer un nouveau métier ? Est-ce qu’écrire sur le web est un autre métier ? (je pense que oui). Il n’est que temps de se préoccuper des utilisateurs finaux… de leurs modes de consommation et de la continuité de l’information. Les articles de 10 000 mots ne sont pas contradictoires avec un Tweet de 140 caractères… mais si un Tweet m’interpelle et qu’il pointe vers un article court et que je peux signaler mon intérêt afin d’accéder à un contenu plus fouillé voir à un dossier complet sur le sujet, je pense que j’ai là une chaine de valeur qui me permet de progresser intellectuellement et de m’enrichir culturellement.

    Si l’on rentre dans un schéma vertueux on peut imaginer qu’un journaliste produit un contenu dit « lourd » et complet, et que par exemple dans quoi vous écrivez un contenu adapté à votre lectorat qui pointe ensuite vers ce contenu plus complet non ?

    Désolé pour la longueur et ne vous y trompez pas, je suis le premier à exprimé mon mécontentement face à la façon dont les journalistes travaillent aujourd’hui et au mépris qu’ils ont pour les lecteurs.

  3. Bon Jean-Luc,

    Pas d’accord avec bcp de choses…

    Vous êtes d’origine modeste et vous avez réussi à vous élever, c’est très très bien, mais hélas assez rare. Je ne vais revenir sur 30 ans d’études sociologiques corroborées qui montrent hélas les fortes corrélations entre niveaux socio-économiques de base et réussite sociale ou pratiques culturelles; je vous invite à consulter ce site de référence : http://www.inegalites.fr/

    Non, on n’annihile pas l’éducation par 8 minutes d’images au 20h. c’est une vision pavlovienne qui date des années 30. Et qui n’a d’ailleurs jamais été vraie.

    Les rédactions web ont été séparées dès l’origine car les journalistes papier méprisaient cet outil peu noble. oui « il suffisait ».. haha, mais les syndicats et les différences culturelles ont été des freins puissants à cette intégration.

    Non, écrire pour le web n’est pas fondamentalement un autre métier. Il y a de nouveaux formats, mais la base est la même : compréhension, vérification, hiérarchisation, reformulation.

    Oui je suis d’accord avec ce point : j’appelle cela le double niveau d’accès à l’info, le « stop ou encore ».

    Non, les journalistes n’ont pas de mépris pour leurs lecteurs, en tout cas, je n’en ai que très rarement croisé. Mais il y a certes des choses à améliorer et des erreurs à corriger. C’est du côté d’Edwy Plenel que je penche et vers son analyse de son manque d’indépendance face aux pouvoirs économiques et politiques (via les aides à la presse).

    Cordialement

    Cyrille

  4. Effectivement nous ne partageons vraiment pas le même point de vue mais c’est aussi ce qui enrichit le débat…

    Une vision pavlovienne… mais le conditionnement n’est pas dans mon analyse mais il est présent partout, derrière chaque information (je force le trait). On a aujourd’hui beaucoup moins de liberté d’expression qu’il y a 20 ou 30 ans ! L’information qui nous est balancée aujourd’hui est pire que celle de l’époque où il y avait un ministère de la communication. Vous parlez marketing mais qu’est-ce que le marketing si ce n’est jouer avec le reflexe pavlovien des consommateurs ?

    Et je continue de penser que quand on fait des heures de cours sur la seconde guerre mondiale à des enfants qui chaque soir au JT consomment des images de violence comme une crème glacée ou qui refont la dite guerre des milliers de fois sur leurs consoles, cela change totalement la donne. Le prof que j’ai été pendant quelques mois vous confirme l’impact des images et de l’information sur l’éducation, elle sont même devenues l’une des sources principales de références pour les ados !

    Mais si, justement écrire pour le web est un autre métier… pour les mêmes raisons que vous exprimez dans votre article, le support est différent, le public est différent, les usages sont différents, les codes sont différents, et c’est justement en s’imaginant que c’est la même chose que l’on obtient le résultat que vous critiquez (c’est la raison de ma principale critique à votre article…dire tout et son contraire). C’est comme dire qu’être journaliste TV, Presse écrite ou Radio c’est la même chose : eh bien non, désolé, ce sont des métiers différents. Vous parlez du métier sans vous préoccuper de l’écosystème du média qui est un rouage essentiel dans la compréhension et l’adaptation des contenus à leurs lecteurs / consommateurs. Oui la façon de « consommer » sur le web est différente, parce que les supports sont très variés et qu’ils recoupent parfois d’autres supports… la vidéo, l’écrit, le son etc. Le web est en ce sens particulier, qu’il n’est pas vraiment un média mais plutôt un méga média… ça c’était la vision d’avant. Avant quoi ? Avant que les masses en fassent un média à part entière en intégrant ce support à leurs vies.

    Nous sommes aujourd’hui dans un modèle de communication de masse, le mass média et nous passons petit à petit dans un modèle de média des masses où l’instantanéité de l’information est générée par les foules et où le rôle du journaliste est justement de se retirer de cette course folle qui mêle vitesse et précipitation, de prendre du recul et surtout de donner du recul afin de faire un travail d’analyse, et d’informer réellement et de faire justement contre-poids avec cette consommation à outrance d’informations instantanées et peu fiables.

    Pour finir, je vous invite à consulter ce « reportage prospectif daté de 2014 » , qui synthétise avec humour le chemin qui va nous mener à la fin des médias traditionnels pour aboutir à des fils d’informations automatiques, personnalisés, reconstitués à partir d’une multitude de témoignages mis en ligne par les internautes du monde entier…

  5. Pour info :

    Le débat lancé par Internet Actu sur les différences entre lecture online et offline révèle que la lecture sur Internet se rapproche du zapping télévisuel. Moins de temps consacré à des contenus longs, recherche plus rapide et plus pointue d’élements significatifs et synthétiques… Par curiosité, j’ai cherché sur la toile s’il existait des scripts assez simples permettant de moduler l’affichage d’un article publié sur le web. Après avoir légèrement modifié une fonction javascript, qui n’était pas du tout prévue pour ça, je suis arrivé à un résultat assez satisfaisant d’outil de modulation de lecture (optimisé pour Firefox) : http://contriclub.free.fr/blog/test.html

    J’ai pris comme exemple de texte celui d’Internet Actu (pour rester dans l’esprit ;-)), et je n’ai pas été jusqu’au bout de l’élagage du style, mais l’idée est là : en fonction du temps que je souhaite accorder à un contenu, avoir la possibilité d’afficher tout ou partie des éléments “contextuels”. Bien sûr, en dehors des balises de type img, h3, et des parenthèses, qui peuvent être identifiés quasiment sans aucune manipulation, c’est un travail particulièrement fastidieux de rajouter des balises permettant d’indiquer que tel passage est une citation, tel autre une digression ou une précision. Conclusion : vivement le web sémantique. Gageons qu’une des futures killer apps du web 3.0 sera celle qui permettra d’obtenir des “résumés” de e-book quasi-instantanément…

  6. « dénoncent la fin d’un journalisme de profondeur, en raison du diktat de la publicité notamment.

    LA LONGUEUR N’EST PAS SYNONYME DE QUALITÉ »
    Article incohérent, sans aucune source sérieuse en France, dont la logique est absente. Tout ça pour cracher sur l’investigation et surtout l’analyse, fondements du journalisme. Je ne sais pas qui ce(tt)e Frank, mais il/elle ira loin dans les coulisses ultra-liberales de la presse commerçante.

Bouton retour en haut de la page
Share This