
L’IA enrichira une minorité, et ruinera tout le reste.
💥 Hard Reset : pour en finir avec les mythes de la tech
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L’intelligence artificielle ne sauvera pas l’économie, elle l’accélère, et ce dans tous les sens. Car si les gains de productivité sont réels, massifs, et mesurables, ils s’ajoutent à un modèle budgétaire et social qui, lui, est déjà hors-sol.
Trop de décideurs confondent progrès technique et progrès économique, or l’IA n’est pas une solution, mais un amplificateur. Elle enrichira ceux qui y sont préparés, et précipitera les autres dans une déstabilisation brutale, que ce soient les États, classes moyennes, ou encore les systèmes sociaux.
Une économie qui se passe de l’humain
La boucle vertueuse travail → revenu → consommation est en train de se rompre. Les entreprises les plus avancées n’embauchent plus et automatisent. En aucun cas elles ne cherchent à “créer des emplois IA”, mais cherchent à réduire les coûts, industrialiser les processus, et verrouiller autant que possible leur chaîne de valeur.
La productivité augmente, mais sans redistribution, et pire, elle élimine la nécessité de redistribuer car on produit plus… avec moins de personnes.
Or le capitalisme sans travail, c’est une contradiction, si les salariés deviennent une variable d’ajustement remplacée par des modèles, qui va financer la demande ? Qui paie les cotisations ? Qui alimente les systèmes de retraite, de santé, ou encore d’assurance ?
Des états insolvables face à des entreprises hyper rentables
Pendant que les entreprises rationalisent, et les startups se crééent désormais dans avec des équipes minimalistes, les États s’endettent. En France comme aux États-Unis, les déficits explosent, les dépenses sociales montent, quand les recettes fiscales stagnent. La base imposable des salaires se contracte, alors que les besoins publics augmentent avec le vieillissement de la population, la précarité, la désindustrialisation, la transition écologique, et un instabilité géopolitique croissante.
Les modèles IA sont détenus par des acteurs privés mondialisés, avec des bénéfices extraterritoriaux difficilement taxables. Dans le même temps, les États nationaux doivent assumer seuls les coûts sociaux d’une transition technologique qu’ils ne contrôlent pas.
Ce n’est pas une crise, mais une transition de régime.
Il faut arrêter de croire qu’on vit une “révolution technologique” au sens classique, car ce n’est pas une nouvelle phase industrielle qui s’ouvre, mais une véritable rupture historique.
Dans les précédentes transitions (énergie, numérique, automatisation), les gains de productivité étaient diffusés par l’emploi, les infrastructures, la consommation de masse. L’IA fait complètement sauter ce schéma avec des outils légers, distribuables, peu dépendants du tissu local. Leur efficacité repose sur les modèles, la centralisation des données, les compute et l’énergie.
C’est une nouvelle économie qui se crée, sans friction, sans bras, sans frontière, mais aussi, sans équilibre.
Le vrai sujet : le contrat social est en train de s’effondrer
Le contrat implicite du XXe siècle reposait sur une promesse: si vous travaillez, vous aurez accès à un certain niveau de sécurité économique, or ce contrat est en train d’être dissous par les dynamiques technologiques (IA, robotisation), sans que personne ne le remplace.
L’école et l’enseignement supérieur sont en retard, les politiques fiscales sont obsolètes, les débats publics sont à contretemps, et les classes moyennes décrochent, non pas par faute de talent, mais par faute de visibilité sur leur place dans cette nouvelle économie.
La question n’est plus de savoir ce que peut faire l’IA, mais de que fera-t-on du monde qu’elle produit ?
Il est temps d’arrêter de fantasmer l’IA comme un miracle économique. Elle exige de reconstruire un équilibre perdu, car si l’on continue à penser croissance en haut et austérité en bas, productivité privée et dette publique, automatisation sans redistribution, alors on aura la réponse à la question posée, oui, l’IA enrichira une minorité, et ruinera tout le reste.