
Michel Devoret et l’équipe de Google Quantum AI repoussent la frontière du calcul au-delà du classique
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Dans une étude publiée dans Nature, les chercheurs de Google Quantum AI, parmi lesquels le physicien Michel H. Devoret, lauréat du prix Nobel de physique 2025, présentent l’algorithme “Quantum Echoes”. Exécuté sur le processeur Willow, cet algorithme démontre pour la première fois un avantage quantique vérifiable, c’est à dire un calcul reproductible sur d’autres plateformes et impossible à simuler avec un superordinateur classique.
Selon l’équipe, Quantum Echoes s’est exécuté 13 000 fois plus vite que le supercalculateur Frontier, aujourd’hui référence mondiale. Cette performance place Google en tête d’une course que l’entreprise avait lancée en 2019 avec son expérience de “suprématie quantique”, mais dont l’utilité restait symbolique. Cette fois, les chercheurs affirment avoir franchi le seuil où la puissance du calcul quantique devient scientifiquement exploitable.
De la suprématie à la vérifiabilité
L’enjeu du travail publié dans Nature dépasse la seule question de puissance. L’algorithme “Quantum Echoes” repose sur la mesure d’un observable quantique appelé Out-of-Time-Order Correlator (OTOC), une grandeur qui décrit comment un système quantique devient chaotique.
Les chercheurs ont fait évoluer un système de 103 qubits selon deux directions temporelles, une “avant” (U) et une “arrière” (U†), séparées par des perturbations élémentaires. Ce processus, répété des milliers de fois, a révélé une interférence constructive dans un régime de chaos quantique.
Contrairement aux expériences précédentes de “random circuit sampling”, où chaque résultat était aléatoire et non reproductible, Quantum Echoes produit des valeurs physiques vérifiables : magnétisation, densité, vitesse ou courant. Ces données peuvent être confirmées par d’autres ordinateurs quantiques ou par des systèmes naturels, un jalon essentiel pour la traçabilité expérimentale du calcul quantique.
L’effet papillon à l’échelle du qubit
L’expérience menée sur Willow reproduit, dans le monde quantique, un principe bien connu du chaos classique à savoir l’effet papillon. Une minuscule perturbation appliquée à un seul qubit se propage dans tout le système, modifiant la corrélation entre les particules.
Les chercheurs ont observé que ces corrélations pouvaient être amplifiées lorsque le système satisfait à une condition de “résonance quantique”. Cette amplification lente, en loi de puissance plutôt qu’exponentielle, marque une différence fondamentale avec les modèles classiques, où les signaux se dissipent rapidement.
Les équipes de Google ont passé plus de dix années-personnes à tenter de reproduire ces résultats avec neuf algorithmes classiques différents. Aucun n’a pu simuler le comportement observé au-delà du second ordre d’OTOC. Là où Willow a calculé en deux heures, un supercalculateur aurait nécessité plus de trois ans.
Une approche nouvelle pour comprendre la matière
L’intérêt scientifique du projet va bien au-delà de la démonstration de puissance. Les OTOCs peuvent être utilisés pour caractériser les interactions internes des systèmes physiques complexes, notamment dans la chimie, la physique des matériaux et la biologie moléculaire.
Dans un second article en cours de relecture, les chercheurs montrent que le même protocole appliqué à la résonance magnétique nucléaire (RMN) permet d’affiner les modèles moléculaires. En simulant les signaux mesurés sur des molécules réelles et en les comparant à ceux générés par l’ordinateur quantique, l’équipe obtient des estimations plus précises des structures atomiques.
Cette méthode, baptisée Hamiltonian learning, pourrait devenir une des premières applications concrètes du calcul quantique, en particulier dans la conception de nouveaux matériaux et la découverte de médicaments.
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