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Uber France VS Taxis: pourquoi le cadre juridique est imparfait

Quelle est la législation actuelle qui régit la société Uber France et les taxis? Si l'on a tendance à opposer ces deux acteurs, une chose est sûre, les derniers arrêts font, eux, clairement la distinction entre deux catégories professionnelles différentes. Voici les principaux arrêts rendus ces derniers mois:

Depuis la Loi du 22 juillet 2009, la profession chargée du transport de particuliers à titre onéreux a été scindée en deux catégories : les taxis et les véhicules de tourisme avec chauffeur (VTC). Cette avancée législative a été appuyée par une décision QPC du Conseil constitutionnel en date du 17 octobre 2014 qui est venue confirmer la conformité du texte à la Constitution.

Le développement rapide des VTC, à l’instar de la société californienne Uber, a été à l’origine d’une forte gronde des chauffeurs de taxis, s’estimant victimes d’une concurrence déloyale. C’est pourquoi, le législateur français a adopté le 1er octobre 2014 la Loi dite « Thevenoud » (dont les dispositions ont été précisées par un décret d’application du 30 décembre 2014) afin d’encadrer l’essor des VTC tout en obligeant les chauffeurs de taxis à se moderniser pour reconquérir des parts de marchés.

La nouvelle législation impose notamment aux VTC :

une interdiction de la maraude, y compris électronique, réservée exclusivement aux taxis,

une interdiction de stationnement sur la voie publique,

une interdiction de facturation en fonction de la distance parcourue. Uber, principale entreprise de VTC, a contesté ces nouvelles dispositions. Le Conseil constitutionnel a été amené à se prononcer sur leur validité lors d’une décision QPC du 22 mai 2015. La décision rendue a déclaré conforme à la Constitution l’interdiction de la maraude et a fortiori celle de stationnement sur la voie publique obligeant les chauffeurs de VTC à ne prendre des clients que sur réservation. En revanche, a été retoquée l’interdiction de tarification horokilométrique comme portant atteinte excessive à la liberté d’entreprendre.

A l'inverse, le Conseil d'Etat a jugé le 9 mars dernier contraire au droit européen l'interdiction de l’outil de géolocalisation pour les VTC, sous prétexte, comme le laissait entendre la loi « Thévenoud », que celle-ci s'apparentait à de «la maraude électronique», le cœur d’activité des sociétés de taxis.
 Le décret interdisait jusqu'ici «aux VTC d'informer les clients, avant la réservation, de la localisation et de la disponibilité d'un véhicule».

Mais, le Conseil d'Etat a jugé que «cette interdiction (…) constituait une exigence visant l'accès à un service de la société de l'information». Ainsi elle autorise cette utilisation de géolocalisation. Aussi, le Conseil d'État valide la possibilité pour le VTC de calculer leurs trajets sur le même principe qu'une course de taxi.

Rappelons que la société Uber a dû suspendre le service Uber Pop en juillet 2015 pour apaiser les tensions des chauffeurs de taxis. Ce service permettait à des particuliers d’effectuer des courses pour le compte de passagers réservant leur course depuis l’application mobile. Néanmoins, le Tribunal Correctionnel de Lille a pu condamner le 18 mars dernier le service UberPop au paiement d’une amende de 50 000 euros à un chauffeur de taxi pour « pratique commerciale trompeuse » ayant porté plainte pour « concurrence déloyale ».

La loi distancée par l'innovation

Plus d’un an après l’adoption de la réforme, force est de constater qu’un certain nombre de dispositions mettent du temps à être opérationnelles, notamment l’obligation pour les chauffeurs de taxis de s’équiper d’un terminal de paiement électronique ou encore la disparition du système de revente des licences de taxis (revente née de la pratique en dépit de la délivrance gratuite de la licence par l’autorité administrative).

Sur le plan européen, la Commission européenne s’est lancée à la fin de l’année 2015 sur une étude visant à déterminer si la société Uber est un service de transports (et est donc soumis à des conditions d’exercice plus strictes) ou simplement un service numérique. Les lois nationales en la matière devraient également être passées en revue afin de déterminer si une règlementation européenne doit intervenir afin de remédier aux litiges opposant la société Uber aux chauffeurs de taxis européens.

Cet aperçu du conflit nous permet d’identifier un certain nombre d’arguments qui pèsent en faveur des chauffeurs de taxis et certains autres venant à l’appui de l’essor d’une entreprise de VTC, telle que Uber. -du côté des taxis, il est normal qu’ils bénéficient d’un certain nombre de privilèges par rapport aux chauffeurs de VTC puisqu’ils sont soumis à des obligations plus strictes.

En effet, ils doivent détenir une licence professionnelle dont l’obtention est conditionnée par un certain niveau de formation professionnelle entre autres. Ces conditions plus strictes visent à maintenir une certaine qualité du service rendu aux consommateurs.

Face à une concurrence croissante de la part des VTC, les taxis doivent néanmoins chercher à se moderniser, notamment en adoptant des moyens de paiements électroniques plus adaptés aux attentes des clients. Par ailleurs, il serait favorable de revoir les tarifs pratiqués par les taxis et donc de revoir la pratique actuelle relative aux licences. -en faveur des chauffeurs de VTC, peut être invoquée la liberté d’entreprendre qui légitime l’apparition de nouvelles entreprises censées dynamiser le marché.

In fine cela permettra d’accroitre la qualité des prestations offertes aux consommateurs. Uber peut constituer un bon exemple de cette dynamique apportée au marché : prix attractifs, qualité des services offerts aux consommateurs (notamment à travers des obligations imposées par la plateforme à ces chauffeurs). Néanmoins, afin que les VTC ne portent pas atteinte à la concurrence de manière déloyale, il convient de revoir les conditions auxquelles ils sont soumis et de s’intéresser aux obligations fiscales et sociales imposées aux plateformes.

 

gwenaëlle-arturGwenaëlle Artur est avocat associée et responsable du pôle social au sein de la société Aston Avocats, depuis 2012. 

 

 

 

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