La publicité, levier idéal pour augmenter la rémunération des chauffeurs d’Uber et Lyft ?
Sur un marché des VTC où les chauffeurs se plaignent régulièrement du traitement que leur réserve les plateformes, Uber et Lyft ont peut-être trouvé la solution pour augmenter la rémunération de ces derniers, sans en faire payer le prix fort au client. En effet, les deux plateformes américaines s’intéressent de plus en plus à la publicité pour compenser les pertes des chauffeurs, victimes ces dernières années des mesures prises par Uber et Lyft pour réduire leurs coûts.
Lors de leur arrivée sur le marché au début des années 2010, les deux groupes américains avaient établi des grilles tarifaires assez avantageuses pour les chauffeurs afin d’obtenir une masse critique pour faire face à la demande. Cependant, cette approche s’est révélée particulièrement coûteuse pour Uber, Lyft et consorts, qui n’ont pas hésité à modifier leurs grilles tarifaires au fil du temps, entraînant de facto une diminution sensible de la rémunération des chauffeurs. Selon une étude du JPMorgan Chase Institute, les chauffeurs d’Uber et Lyft gagnaient ainsi 53% de moins en 2017 par rapport à 2013.
12 millions de produits vendus par les chauffeurs d’Uber à 35 millions de passagers
Dans ce contexte, la publicité apparaît comme un moyen pour Uber et Lyft d’augmenter leurs revenus et ceux de leurs chauffeurs. Uber avait montré la voie dès 2018 en s’alliant avec la start-up new-yorkaise Cargo, spécialisée dans les services in-car. Avec ce partenariat, Uber permettait à ses chauffeurs d’obtenir un revenu complémentaire, en leur offrant la possibilité de vendre des produits (barres chocolatées, boissons, chargeurs, lunettes de soleil, AirPods…) à bord de leurs véhicules.
Réservé aux chauffeurs les mieux notés de la plateforme (au moins 4,7 étoiles sur 5), le dispositif leur permettait de gagner 1 dollar à chaque transaction et une commission de 25% sur le prix du produit vendu. Lors du lancement de ce service de vente in-car, Cargo estimait qu’il pouvait permettre aux chauffeurs d’avoir entre 1 500 et 3 000 dollars de revenus supplémentaires par an. En début d’année, Jeff Cripe, le patron de Cargo, indiquait à Axios que les chauffeurs d’Uber avaient gagné 13 millions de dollars en vendant 12 millions de produits à 35 millions de passagers dans 14 villes et trois pays.
La publicité sur le toit des véhicules VTC en plein essor
Toujours avec Cargo, Uber a commencé à tester en 2019 à Atlanta un programme pour mettre des panneaux publicitaires sur le toit des voitures de ses chauffeurs. Avec ce projet, qui existe déjà pour les chauffeurs de taxis, ceux d’Uber peuvent gagner 40 dollars pour les 20 premières heures de conduite chaque semaine, puis 10 dollars supplémentaires toutes les cinq heures, avec un maximum de 150 dollars par semaine. Cargo voit dans les panneaux publicitaires sur les VTC un moyen de se réinventer puisque l’entreprise a récemment arrêté son activité de vente in-car pour se concentrer sur la publicité.
Sur ce segment d’activité, Cargo se retrouve en concurrence avec la start-up californienne Firefly, soutenue par Google, qui collabore également avec Lyft. Les panneaux de Firefly ont la particularité de pouvoir mesurer la température extérieure et le niveau de pollution, mais aussi d’analyser les freinages des voitures environnantes. Autant de données que l’entreprise pourra ensuite monétiser. Les chauffeurs concernés peuvent gagner en moyenne 300 dollars supplémentaires par mois avec ce dispositif.
Des revenus complémentaires pour les chauffeurs… et les plateformes
Lyft semble croire à ce modèle de publicité sur les toits des véhicules de ses chauffeurs puisque la plateforme américaine vient de mettre la main sur la start-up new-yorkaise Halo Cars, opérationnelle à New York et Chicago. Les modalités financières de l’opération n’ont pas été dévoilées. Toutefois, Lyft a confirmé cette acquisition auprès d’Axios. Halo Cars permet aux chauffeurs d’installer des panneaux publicitaires connectés sur le toit de leur voiture pour gagner jusqu’à 400 dollars supplémentaires par mois. Dans le même temps, les annonceurs peuvent savoir exactement où le véhicule circule pour adapter les publicités en fonction des zones visitées, de l’heure ou de la météo.
Si la publicité permet aux chauffeurs d’obtenir un revenu complémentaire, il en est de même pour les plateformes. En effet, Uber et Lyft empochent une commission sur le chiffre d’affaires généré par ces publicités ambulantes. Un apport bienvenu dans la mesure où les deux géants américains concèdent encore des pertes colossales. Uber a perdu 8,5 milliards de dollars en 2019, dont une perte record de 5,2 milliards de dollars au deuxième trimestre. De son côté, Lyft a enregistré 2,6 milliards de dollars de pertes l’an passé.
En quête de rentabilité, les deux entreprises ont taillé dans leurs effectifs au cours de ces derniers mois. De plus, la Californie a envoyé un message fort aux plateformes comme Uber et Lyft en septembre 2019, en leur imposant de traiter leurs chauffeurs VTC comme des employés. Après son adoption, le projet de loi, appelé Assembly Bill 5 (AB5), est entré en vigueur le 1er janvier 2020, ouvrant la porte à une requalification des chauffeurs qui doit leur permettre de bénéficier de la protection sociale dont ils étaient privés jusque-là (chômage, maladie, retraite, temps de travail, salaire minimum…). Dans ce contexte, tout revenu complémentaire est plus que bienvenu.
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