
OTAN, un tournant discret mais stratégique vers le cloud européen
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L’Agence d’information et de communication de l’OTAN (NCIA) vient d’attribuer un contrat à Thales et Proximus, au sein d’un nouveau consortium, pour moderniser l’infrastructure IT de son réseau d’entreprise. Derrière la sobriété de l’annonce, se dessine (enfin) un ancrage de l’Alliance dans des solutions cloud managées, portées par des industriels européens.
Ce partenariat vise à déployer une infrastructure en tant que service (IaaS) et des dispositifs utilisateurs en tant que service (DaaS), hébergés sur un cloud certifié, et assortis de mécanismes de cybersécurité avancés. L’objectif affiché est de garantir une connectivité fluide et une performance continue sur l’ensemble des cinq sites de la NCIA, tout en renforçant la sécurité, la compatibilité et la résilience des systèmes.
« Thales réaffirme son engagement à renforcer la résilience numérique de l’OTAN, en fournissant une infrastructure IT sécurisée, performante et durable », a précisé Alex Bottero, vice-président Réseaux et Systèmes d’infrastructure chez Thales.
De son côté, Proximus assurera le déploiement de 5 000 ordinateurs portables multi-domaines sécurisés, la modernisation des réseaux Wi-Fi de La Haye et Braine-l’Alleud, et la fourniture d’une connectivité haut débit vers son propre cloud. Le fournisseur belge, longtemps perçu comme un opérateur télécom local, consolide ainsi sa position dans des écosystèmes critiques, à l’intersection des télécoms, de l’IT et de la défense.
« Ce projet stratégique reflète notre engagement à fournir des solutions de connectivité, de mobilité et de sécurité à la pointe de la technologie », a déclaré Anne-Sophie Lotgering, Chief Enterprise Market Officer de Proximus.
Une externalisation sous contrôle
La NCIA, qui centralise les fonctions numériques de l’OTAN, adopte ici une architecture externalisée à haute exigence contractuelle, encadrée par des indicateurs de performance (SLA) détaillés et opposables. L’enjeu ne se limite pas à la technologie mais engage la manière dont l’Alliance conçoit son autonomie opérationnelle dans un environnement de plus en plus interconnecté.
Cette approche traduit une lecture renouvelée de la souveraineté numérique, qui ne repose plus uniquement sur le contrôle total des infrastructures, mais sur la capacité à en garantir la sécurité, l’évolutivité et l’interopérabilité. Dans un contexte marqué par la pression cyber, la fragmentation technologique et la compétition géopolitique, ce contrat illustre une volonté d’ancrer les fonctions critiques dans des écosystèmes industriels européens reconnus.
Vers une nouvelle géographie du cloud militaire
Si l’OTAN a déjà eu recours à des fournisseurs nord-américains pour des services IT, ce choix en faveur d’un duo Thales-Proximus indique un rééquilibrage, au moins partiel, dans les arbitrages d’infrastructure. Il met également en lumière un paysage industriel en recomposition, où les entreprises européennes renforcent leur capacité à adresser des environnements sensibles en combinant cybersécurité, cloud souverain et services intégrés.
Le projet ouvre aussi la voie à un modèle de défense numérique partagée, fondée sur des blocs technologiques certifiés mais opérés de manière mutualisée. Cette approche pourrait s’étendre à d’autres agences ou missions au sein de l’OTAN, dans une logique de standardisation sécurisée.