
OpenAI : 100 milliards de dollars de plus pour bâtir la nouvelle industrie lourde de l’IA
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OpenAI vient de sceller un partenariat historique avec NVIDIA, destiné à déployer au moins 10 gigawatts de datacenters IA équipés de plusieurs millions de GPU. NVIDIA s’engage à investir jusqu’à 100 milliards de dollars dans OpenAI, sous forme d’actions sans droit de vote. Un montage circulaire qui permet à OpenAI d’utiliser directement le cash pour acheter les puces de son partenaire. La première tranche, construite autour de la nouvelle plateforme Vera Rubin, doit entrer en service au second semestre 2026.
Cette annonce spectaculaire, par son ampleur financière et énergétique, illustre la bascule de l’intelligence artificielle dans une véritable industrie lourde. Mais elle prend tout son sens replacée dans une perspective plus large, depuis cinq ans, Sam Altman structure méthodiquement un écosystème d’alliances équilibrées, conçu pour éviter toute dépendance excessive et partager la valeur entre partenaires stratégiques.
NVIDIA : la puissance immédiate et le capital
La relation entre OpenAI et NVIDIA remonte aux premiers supercalculateurs DGX. L’accord de 2025 change d’échelle avec NVIDIA qui n’est plus seulement fournisseur, mais devient investisseur stratégique, garantissant l’accès d’OpenAI au compute critique. En contrepartie, OpenAI reste captif de son principal fournisseur, toutefois pour compenser ce risque, l’entreprise prépare déjà une alternative avec Broadcom.
Microsoft : le partenaire financier et la porte d’accès au marché
Depuis 2019, Microsoft a investi plus de 13 milliards de dollars dans OpenAI. Son cloud Azure héberge ChatGPT et ses API, tandis que Copilot diffuse les modèles au cœur de Microsoft 365. Microsoft incarne la couche marché et distribution de l’écosystème. Mais cette exclusivité crée une dépendance, pour rééquilibrer, OpenAI a engagé un partenariat de long terme avec Oracle.
Oracle : l’infrastructure lourde et la diversification cloud
À partir de 2027, OpenAI activera un contrat colossal avec Oracle de 300 milliards de dollars sur cinq ans, pour 4,5 GW de puissance électrique, répartis entre le Texas, le Wyoming et la Pennsylvanie. L’équivalent de deux réacteurs EPR ou de la consommation de quatre millions de foyers français. Cet accord, au cœur du projet Stargate, vise à sécuriser une capacité à très long terme et à réduire la dépendance exclusive à Azure.
L’engagement annuel représente six fois le chiffre d’affaires 2024 d’OpenAI (10 Md$), et Oracle concentre une part critique de ses revenus futurs sur un seul client.
Broadcom : l’indépendance technologique
En parallèle, OpenAI a commandé pour 10 milliards de dollars de puces custom co-développées avec Broadcom. Les premières livraisons sont attendues dès 2026. Contrairement à Google ou Amazon, ces puces resteront réservées à un usage interne.
Stargate Norway : l’ancrage européen
En Europe, OpenAI sera le premier client de Stargate Norway, un projet mené par Nscale et Aker près de Narvik. Avec 230 MW extensibles à 520 MW, le site doit accueillir 100 000 GPU H100 d’ici fin 2026. Le site d’implantation a été soigneusement choisi, avec pour atouts, une hydroélectricité décarbonée, un climat tempéré, un foncier extensible. Contrairement aux projets communautaires EuroHPC, Stargate Norway est financé par le privé, garantissant une exécution rapide. Ce site illustre la stratégie OpenAI for Countries, qui vise à bâtir des bases régionales de compute en partenariat avec des acteurs locaux.
Une architecture composée d’équilibres vertueux
Le plan de développement de Sam Altman est structuré pour avancer le plus vite possible et au delà de la dynamique, est recherché un point d’équilibre afin que chaque accord réponde à une dépendance :
- NVIDIA sécurise la puissance brute, Broadcom prépare l’autonomie hardware.
- Microsoft assure capital et marché, Oracle réduit la dépendance cloud.
- Stargate Norway complète l’ancrage énergétique et territorial en Europe.
C’est aussi une stratégie positionnante en rupture avec le marché, plutôt que d’intégrer toute la chaîne comme Google ou Amazon, OpenAI construit un écosystème distribué. Chacun des partenaires détient une brique essentielle, ce qui évite le verrouillage et crée un ensemble plus résilient.
Le capital tourne en rond, mais produit de la puissance : le pari d’OpenAI
OpenAI et NVIDIA ont mis au point un montage circulaire d’une ampleur inédite, à la croisée de la finance, de l’énergie et du calcul intensif. En investissant jusqu’à 100 milliards de dollars dans OpenAI sous forme d’actions sans droit de vote, NVIDIA injecte directement du capital dans la startup, qui l’utilise aussitôt pour acheter des GPU du même fournisseur.
Autrement dit, l’argent circule dans un cycle fermé, NVIDIA finance son propre carnet de commandes tout en sécurisant un client captif sur plusieurs années. Cette structure, inspirée à la fois des logiques industrielles du XXᵉ siècle et des boucles de financement modernes de la tech, crée un effet multiplicateur d’investissement car chaque dollar investi se traduit à la fois en revenus, en part de marché et en accélération de la production de semi-conducteurs.
Mais cette circularité va au-delà d’un simple échange bilatéral, elle illustre la philosophie systémique que Sam Altman applique désormais à l’ensemble de l’écosystème OpenAI : chaque partenaire stratégique est placé dans une position d’interdépendance équilibrée. NVIDIA garantit la puissance de calcul immédiate, Broadcom prépare la relève avec des puces sur mesure, Microsoft fournit la couche marché et la liquidité, Oracle diversifie les capacités cloud et énergétiques, tandis que Stargate Norway incarne l’ancrage territorial et la stabilité énergétique en Europe. Ce réseau forme une économie du compute distribuée, où les flux de capitaux, d’énergie et de données convergent dans un système auto-renforçant, pensé pour soutenir la course vers l’intelligence artificielle générale.
En agissant ainsi, Sam Altman inverse la logique traditionnelle du capitalisme industriel, ce n’est plus la production qui attire le financement, mais le financement qui déclenche la production. OpenAI n’achète pas seulement des puces, elle préfinance la prochaine génération d’usines, incitant tout un secteur à investir dans des capacités qui n’existaient pas encore. Cette stratégie confère à OpenAI un rôle quasi macroéconomique : celui d’un moteur systémique qui synchronise innovation technologique, infrastructures énergétiques et flux financiers mondiaux, au prix toutefois d’une dépendance croisée où la moindre rupture, qu’elle soit technologique, géopolitique ou réglementaire, pourrait fragiliser la boucle entière.
L’accord avec NVIDIA marque une nouvelle étape spectaculaire par son ampleur, mais il ne prend sens qu’au sein d’une stratégie plus large, de Microsoft à Oracle, de Broadcom à Nscale, OpenAI ne se contente pas de développer des modèles d’IA mais bâtit une industrie complète, cohérente et durable, capable de soutenir l’économie du compute et d’accompagner la marche vers l’intelligence artificielle générale, objectif clé d’Altman.






