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Ask A VC : comment modéliser un compte de résultat — Partie 4/6 : la courbe de cash en J

par Rodrigo Sepulveda Schulz, Investor. Advisor. Board member.

Dans les trois premiers articles de cette série, nous avons examiné comment construire un compte de résultat: Chiffre d’affaires, Coûts Variables et Coûts Fixes, ce qui nous a amenés à calculer l’EBITDA et, avec des hypothèses simples, à calculer le Flux de Trésorerie Disponible (Free Cash Flow) de l’entreprise.

C’est déjà plus d’informations que ce qu’un capital-risqueur obtient habituellement sur une présentation d’un dossier d’investissement : 3 à 5 ans de chiffre d’affaires (Revenus), et l’excédent brut d’exploitation correspondant (EBITDA). Ce sont toujours de très bons chiffres à communiquer car ils montrent au capital-risqueur que vous avez travaillé votre dossier financier, réfléchi à vos métriques unitaires, et montrez votre ambition avec le chiffre d’affaires de la cinquième année.

La beauté d’un modèle financier est qu’avec juste quelques manipulations supplémentaires, vous pouvez en extraire beaucoup plus d’informations. Vous pouvez maintenant identifier de combien d’argent votre entreprise aura besoin pour atteindre la rentabilité, quand cela se produira, et quelle devrait être votre stratégie de financement. Vraiment ? Oui !

Revenons à notre modèle. Je vais maintenant le retraiter légèrement et ajouter en bas, 6 nouvelles lignes, prenant MAINTENANT comme le moment t0 de votre modèle.

  • La SOMME de tous les flux de trésorerie ENTRANTS par période : c’est assez facile, c’est la somme de tous vos revenus (chiffre d’affaires des différentes lignes de produit). Si vous avez de l’argent en banque, ajoutez également cette somme. Si vous prévoyez d’obtenir d’autres entrées de trésorerie (subventions du gouvernement, capital d’investissement déjà engagé, prêts bancaires, TVA remboursée, arriéré de revenus, etc.), ajoutez-les simplement à la période correspondante. Bien sûr, si votre besoin en fonds de roulement produit de la trésorerie (vous êtes payé cette période avant de payer vos fournisseurs à la période suivante), ajoutez-le aussi.
  • Ensuite, une autre ligne pour la SOMME de tous les flux de trésorerie SORTANTS par période : facile encore, c’est la somme de tous les Coûts Variables (COGS) et de tous les Coûts Fixes (Ventes et Marketing, Rechnologie, RH, Général et Administration).
  • Maintenant, l’astuce consiste à additionner chacune de ces sommes, sur 2 nouvelles lignes à partir du moment t0 (maintenant), ce qui signifie que je peux savoir à tout moment, combien d’argent est entré depuis t0, et combien d’argent est sorti depuis t0. Si par exemple on vous posait ces questions au mois 13, regardez simplement les chiffres dans la colonne 13. Dit autrementn, si vous considérez la trésorerie comme de l’eau dans un réservoir, combien d’eau avez-vous consommé en douches, en lavant, etc. depuis t0. Facile ! Ajoutez simplement les entrées/sorties de trésorerie du mois en cours, avec le total des entrées/sorties de trésorerie du mois dernier, et faites glisser la formule vers la droite.
  • Dernière ligne à ajouter, vous voulez ajouter (somme de tous les flux de trésorerie entrants) – (somme de tous les flux de trésorerie sortants), et cela vous donnera le montant de trésorerie produit ou consommé pendant cette période, cumulativement. Le faire juste par mois, sans la formule cumulative, vous donnera le « burn » par période (mois).

Ajout de formules pour afficher les entrées et sorties de trésorerie

Bien sûr, c’est un peu difficile à lire, mais vous pouvez trouver le nombre le plus bas dans cette formule, et cela vous montrera le montant maximum de trésorerie que votre entreprise consommera ; et quand !

Une manière plus facile d’afficher l’information est de la représenter sous forme de graphique !

Arriver à la courbe de cash en J (en gris)

Cette courbe en J ici n’est pas très raide ou prononcée, car elle dépend à la fois des hypothèses de votre modèle, et des axes utilisés. Mais vous voyez que le point le plus bas est au mois 48 (j’aurais pu également le voir dans le tableau), et que mon besoin total de financement pour cette entreprise est proche de 1,073 millions d’euros.

L’information se trouve également dans le modèle.

Changer l’axe pour lire la courbe en J plus facilement

La bonne nouvelle, c’est que nous avons une valeur plancher (environ 1,1 million), et que la courbe remonte, ce qui signifie que l’entreprise commence à produire de la trésorerie. Si ce n’est pas le cas, alors soit votre modèle d’affaires est défectueux et vous ne gagnerez jamais d’argent (mais peut-être création d’une valeur terminale pour un actif que vous pourrez vendre), soit vous devez ajuster plusieurs de vos hypothèses pour que le modèle fonctionne: soit nécessiter moins de trésorerie pour les dépenses, soit générer plus de revenus. Il y a aussi une variante dans laquelle vous pouvez essayer de rendre votre entreprise rentable (positive en termes de flux de trésorerie) plus rapidement : ici c’est au mois 48, ce qui est un peu tard ; essayez de viser le mois 36, et avec les aléas hab ituels, vous pourriez atteindre ce point entre les années 3 et 4.

Maintenant, nous avons discuté dans un article précédent de combien d’argent lever. Vous pourriez décider de lever ici 1,1 million pour couvrir vos besoins en trésorerie pour les 4 prochaines années (48 mois), et ne plus jamais lever de fonds.

Habituellement, le besoin en trésorerie est beaucoup plus élevé, disons 5 millions, et si vous étiez seulement prêt à céder 20% des parts, cela impliquerait une valorisation post-money de 5 millions / 20% = 25 millions, donc une valorisation pre-money de 25 millions – 5 millions de nouvel argent = 20 millions. Si vous êtes un entrepreneur à succès, ou très célèbre, ou toute combinaison de ces tours de passe-passe, vous pourriez convaincre les investisseurs que vous valez déjà 20 millions sans avoir rien fait ou prouvé avec ce projet. Normalement, vous ne devriez pas pouvoir exiger cette valorisation. Par conséquent, vous devrez lever moins, disons 2 millions, avec une valorisation post-money de 10 millions, c’est-à-dire 8 millions de valorisation pre-money à ce stade.

Supposons que vous vouliez de l’argent seulement pour les prochains 18 mois. Mon graphique vous montre que vous aurez besoin de 363K€ pour financer ces 18 mois. Il serait plus prudent de demander 400K€ à ce stade, probablement avec une note convertible ou une note SAFE. Beaucoup plus facile à faire que le montant précédent plus élevé.

Trésorerie nécessaire au mois 18.

Dans 12 à 14 mois, vous aurez constitué davantage votre équipe, développé votre produit, peut-être généré des revenus, prouvé certaines hypothèses concernant vos coûts (acquisition de clients), et globalement, vous aurez réduit les risques et démontré une capacité d’exécution. Cela facilitera les discussions avec les investisseurs à ce moment-là, permettra d’obtenir une réponse plus rapidement, et probablement une valorisation plus élevée, réduisant ainsi votre dilution par rapport à si vous aviez levé tout votre argent en une fois.

Vous aurez alors besoin (si rien n’a changé) de lever 1,1m€ (le besoin initial) – 0,4m€ (le montant pré-amorçage que vous avez levé) = 700K€ pour financer l’entreprise pour les 30 prochains mois (48 mois est le point de trésorerie le plus bas – 18 mois de besoin en trésorerie). Vous pourriez décider de lever à nouveau seulement pour les 18 prochains mois pour réduire encore la dilution, et plus tard encore pour les 12 mois restants. Cela s’appelle lever des fonds en tranches.

Vous pouvez ajouter ces 6 lignes comme nous l’avons montré à tout compte de résultat qui vous est envoyé pour analyse, et presque immédiatement avoir une idée des besoins de financement de toute entreprise (en supposant aucun autre CAPEX), et déduire une stratégie de financement appropriée.

Que se passe-t-il si vos hypothèses sont incorrectes, ou si quelque chose ne se passe pas selon votre plan en cours de route ? Ce sera le sujet de la partie 6/6 lorsque nous discuterons de l’analyse de sensibilité.

La prochaine fois, nous examinerons ce modèle et une manière de vérifier rapidement s’il est cohérent ou non.

Je fais du conseil pour des entreprises et des startups, et les aide à aborder des questions comme celle-ci et bien d’autres. N’hésitez pas à me contacter sur www.rodrigosepulveda.com.

Retrouvez l’ensemble de ces articles sur www.askavc.fr

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