
G42 veut créer des ambassades numériques pour remplir sa future IA factory
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Le projet de UAE-US AI Campus, mené par le groupe technologique émirati G42, ne se limite pas à attirer des hyperscalers américains, l’entreprise entend transformer ses infrastructures de calcul en un instrument diplomatique inédit en proposant des « ambassades numériques », aux gouvernements étrangers pour héberger et sécuriser leurs données critiques aux Émirats arabes unis.
Le concept reprend l’idée initiée par l’Estonie en 2017, lorsqu’elle a ouvert au Luxembourg une copie extraterritoriale de ses registres publics, conçue pour assurer la continuité de l’État en cas d’attaque cyber ou militaire. G42 veut industrialiser cette logique, en offrant aux pays tiers un hébergement sacralisé de leurs données.
L’argumentaire repose sur trois promesses, à commencer par la résilience face aux catastrophes naturelles ou aux cyberattaques, réduction des coûts liés à l’énergie et au foncier par rapport à l’Europe ou l’Asie, et garantie diplomatique avec un statut assimilable à l’extraterritorialité.
Reste la question de régime juridique et là plusieurs options sont envisageables pour donner un statut juridique aux ambassades numériques. La plus ambitieuse mais long terme, consisterait à élaborer une convention internationale sous l’égide de l’ONU, inspirée de la Convention de Vienne. À plus courte échéance, la voie bilatérale paraît plus réaliste, à l’image de l’accord signé en 2017 entre l’Estonie et le Luxembourg. Des solutions régionales pourraient également émerger, comme un cadre européen ou du Conseil de coopération du Golfe, mais elles seraient confrontées à la diversité des régulations existantes. Enfin, à défaut de reconnaissance diplomatique, les Émirats pourraient s’appuyer sur un régime contractuel hybride (certifications, audits, arbitrage international) qui offrirait des garanties techniques mais sans valeur de souveraineté.
Elle interroge également sur le rôle des États-Unis, partenaires technologiques clés du projet via Nvidia, AMD ou encore Google, et sur la portée réelle de l’immunité qui serait accordée à ces « ambassades ».
Au delà de l’enjeu commercial pour G42, en proposant d’héberger la souveraineté numérique d’autres nations, les Émirats cherchent à se positionner comme un hub de confiance dans la géopolitique des données, face à une Arabie saoudite concurrente qui combine déjà investissements dans les infrastructures et rapprochement avec des acteurs chinois comme Lenovo. Une nouvelle diplomatie qui démarre par une guerre commerciale complexe.